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Fiche pratique

Les actions de la première équipe médicale sur les lieux d’un évènement avec de nombreuses victimes

Objectifs :

Connaitre les premières actions indispensables à réaliser pour la première équipe médicale sur les lieux d’un évènement avec de nombreuses victimes.

Cibles :

Médecins, infirmiers, secouristes de l’Aide Médicale Urgente.

Références :

Instruction interministérielle relative à l’élaboration du dispositif ORSEC « secours à de nombreuses victimes » dit NOVI.

Contenu :

Auteur : Dominique Pons

La première équipe médicale ou paramédicale face à de nombreuses victimes ne doit pas s’engager dans les soins mais doit organiser et renseigner. A l’identique du COS pour les pompiers, le premier médecin sur une situation catastrophique est considéré comme étant le premier DSM. Le premier infirmier en situation isolé effectuera les mêmes actions en attendant l'arrivée de renforts médicaux.

Dans ces conditions inhabituelles de prise en charge de nombreuses victimes et en situation de stress il est important de pouvoir s’appuyer sur des outils simples permettant de rationaliser les actions que l’on doit entreprendre.

Nous proposons un outil résumé par un acronyme nommé « les trois R » permettant de se remémorer les premières actions à réaliser face à un évènement ayant entrainé de nombreuses victimes. Cet outil a été imaginé et est fréquemment utilisé par les équipes médicales de la BSPP et du BMPM.

1er R comme Reconnaitre :

La reconnaissance du sinistre, « le tour du feu », est la première action à réaliser. Sans informations fiables il serait illusoire de penser pouvoir mettre en place une stratégie, des idées de manœuvre adaptées. Il faut à ce stade se donner 5 minutes pour bien évaluer la situation. Nous conseillons de regarder la montre voire d’enclencher le chronomètre.

Cette reconnaissance doit débuter par la prise de contact avec le premier COS (Commandant des Opérations de Secours) qui peut être le premier chef d’agrès du premier véhicule pompier sur les lieux. Il est souvent le pompier le plus gradé sur place et sera reconnaissable à sa chasuble « COS ». Il se situe au niveau du PC (Poste de Commandement) de colonne ou du PC de site ou sur le terrain et est joignable par radio.
Lors de ce premier point de situation le COS fournira des informations clés sur l’évènement notamment pour la sécurité des intervenants et précisera quels sont ses objectifs. Le COS vous dira comment le contacter, sur quel canal radio. Il est indispensable de rester joignable par radio en permanence jusqu’à la fin de l’intervention.

Si les conditions le permettent vous ferez ensuite une reconnaissance terrain seul ou avec le COS vous permettant de préciser :

-          Le nombre approximatif de victimes et leur gravité définie selon la catégorisation : DCD, UA (Urgences Absolues), UR (Urgences Relatives), impliqués

-          La pathologie dominante

-          L’adresse exacte du PRM (Point de Regroupement des Moyens) et/ou du PPO (Point de Passage Obligé)

-          L’évolutivité éventuelle du sinistre (propagation, risque particulier comme un effondrement, une explosion, un toxique)

-          La localisation du PRV (Point de Rassemblement des Victimes) et/ou du PMA (Poste Médical Avancé)

-          Les moyens sur place

-          Les renforts nécessaires

Remarques :

-          En cas d’attentat les forces de sécurité intérieures seront forces menantes. Le COPG (Commandant des Opérations de Police et Gendarmerie) précisera le zonage et donnera les autorisations d’accès aux secours.

-          Les critères d’implantation d’un PMA ou d’un PRV sont : sécurité par rapport au sinistre, proximité du sinistre, l’accessibilité pour les secours et ergonomie des lieux (ampleur, abris, chauffage, entrée-sortie, communications).

-          Pour évaluer les renforts nécessaires, il existe plusieurs méthodes possibles : en fonction du nombre de victimes (ex : 1 SMUR par UA) ou en fonction du dispositif que l’on imagine mettre en place (PRV, PMA, Evacuation…). Il convient donc de faire la différence entre les moyens nécessaires et les moyens sur place : Renforts = moyens nécessaires – moyens sur place. Il est conseillé de demander les renforts dont on a réellement besoin sans préjuger de leur disponibilité, le SDIS (Service Départemental d’Incendie et de Secours) et/ou le C15 (Centre 15) adapterons leur réponse.

2ème R comme Renseigner par Radio :

Après ce rapide tour du feu qui aura duré au maximum 5 à 10 minutes il est impératif de Renseigner et si possible par radio le CRRA 15 (Centre de Réception et de Régulation des Appels 15). En effet, appeler le 15 rapidement permet l’ouverture de la salle de crise, l’obtention pour le C15 d’informations précises sans perte de données, l’alerte des services hospitaliers receveurs et l’anticipation sur les places de réanimation notamment pour les services spécialisés (pédiatrie, brulés, intoxiqués).

Il est important de passer ce premier bilan ou bilan d’ambiance par radio pour éviter la perte de temps liée à l’encombrement des lignes téléphoniques et permettre l’information des véhicules en transit.

Lors de ce bilan il faut préciser :

-          Son identité : véhicule, fonction

-          L’adresse du sinistre, du PRM et/ou du PPO

-          Le type d’évènement

-          Le nombre approximatif de victimes et leur répartition en fonction de la catégorisation, le nombre d’enfants concernés

-          La pathologie dominante

-          Les risques éventuels (NRBC, explosion, effondrement)

-          Les actions en cours

-          Les renforts médicaux nécessaires en précisant le nombre de moyens demandés et les moyens déjà sur place.

Pour passer un bilan on peut utiliser la formule : « je suis, je vois, je prévois, je fais, je demande »

Remarque : il convient de s’entendre avec le COS pour la demande de renfort. Le COS par l’intermédiaire du CODIS (Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours) et du COZ (Centre Opérationnel de Zone) fera engager les moyens secouristes VSAV (groupes SAP) et les moyens médicaux du SDIS. Le médecin demandera au CRRA 15 les renforts SMUR du département et de la zone.

3ème R comme Regrouper

Une fois le 1er bilan transmis on peut commencer à s’occuper des victimes en ne rentrant cependant toujours pas dans les soins. A ce stade il serait contre-productif de traiter une seule victime au détriment des autres.

 Il faut faire faire mais ne pas s’impliquer dans les soins :

-          Faire regrouper les victimes au PRV en 2 zones distinctes UA et UR

-          S’assurer que les gestes secouristes ont été réalisés et les faire réaliser si besoin

-          Regrouper les impliqués à proximité du PRV en attente de la détermination du CAI

-          Laisser les victimes DCD à l’avant

-          Affiner le dénombrement des victimes et leur catégorisation

-          Identifier les Extrêmes Urgences chirurgicales pour être en mesure de les évacuer dans la première heure

-          Faire mettre en place les bracelets SINUS et les fiches de tri et instaurer à minima un secrétariat en faisant compléter une liste intermédiaire de victimes

-          Répartir et donner les missions aux équipes médicales et secouristes arrivant sur les lieux.

Remarque : en cas d’attentat la doctrine étant de limiter initialement l’engagement des secours il est possible de rester la seule équipe médicale sur site pendant un temps plus long qu’à l’accoutumée.

Rendre compte

Un quatrième R pourrait être ajouté « rendre compte » :

-          Au COS qui est en attente d’un bilan circonstanciel plus précis

-          Puis au DSM d’astreinte en titre qui se présentera sur les lieux et auquel il faudra transmettre une relève.

Bibliographie :

Carli P, Pons F, Puidupin A, Philippe JM, Albarello S; vademecum Agressions collectives par armes de guerre, conduite à tenir pour les professionnels de santé ; ouvrage publié sous l’égide des ministères Solidarité et Santé, Intérieur, Armées en 2018.

Publié le 18/05/21 à 17:23