Portail National des Ressources et des Savoirs

Adoption définitive de la LOPPSI II

Chapo
Source : Dalloz Actualités - C. Fleuriot et R. Grand
Texte

Le texte de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI II), élaboré par la commission mixte paritaire le 26 janvier 2011, a été adopté par les deux chambres parlementaires mardi 8 février 2011 (sur la première lecture du projet de loi, V. Dalloz actualité, 18 févr. 2010, obs. S. Lavric et 16 sept. 2010, obs. J. Daleau, sur la deuxième lecture, V. Dalloz actualité, 3 janv. 2011, obs. S. Lavric et 25 janv. 2011, obs. C. Fleuriot). Parmi les principales dispositions de cette loi, plusieurs concernent le domaine pénal.
Lutte contre la cybercriminalité
L'usurpation d'identité d'un tiers sur internet est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende. On retiendra l'extension de l'incrimination de l'article 227-24 du code pénal (fabrication, transport, diffusion, commerce de messages violents ou pornographiques) aux messages de nature à « inciter les mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger ». Les sanctions de certains délits de contrefaçon sont aggravées quand ils sont commis en bande organisée. Pour mieux lutter contre la pédopornographie, le texte met à la charge des fournisseurs d'accès à internet l'obligation d'empêcher l'accès des utilisateurs aux contenus illicites.
Nouvelles technologies
La loi crée un chapitre sur les fichiers de police judiciaire dans le code de procédure pénale et institue un magistrat référent pour contrôler les fichiers d'antécédents et d'analyse sérielle. La création de logiciels de rapprochement judiciaire est autorisée.
Protection des intérêts fondamentaux de la nation
Le chapitre IV fixe un régime commun applicable aux personnes ayant accès à des installations relevant de secteurs d'activité sensibles. Il crée un régime de protection des agents de renseignement, de leurs sources et de leurs collaborateurs lorsque ceux-ci sont concernés par des procédures judiciaires et entend encadrer les activités dites d'intelligence économique. En matière de lutte contre le terrorisme, il sera possible pour les policiers spécialement habilités d'infiltrer via les moyens de communication électronique les groupes faisant l'apologie du terrorisme sur internet.
Renforcement de la lutte contre la criminalité
Le chapitre V allonge de quinze jours la durée des interceptions téléphoniques pour les infractions relevant de la criminalité organisée et permet des écoutes pour une durée d'un mois renouvelable une fois. Il complète le dispositif législatif relatif à la criminalité organisée pour permettre la captation des données informatiques à distance, à l'insu de la personne privée.
Des peines plancher seront applicables aux primo-délinquants ayant commis des violences aggravées punies d'au moins sept ans d'emprisonnement. Le seuil est de dix-huit mois, si le délit est puni de sept ans d'emprisonnement et de deux ans, si le délit est puni de dix ans d'emprisonnement. Le Sénat souhaitait que cette extension des peines plancher soit réservée aux délits passibles d'au moins dix ans de prison, l'Assemblée nationale optait, elle, pour une extension pour les délits passibles d'au moins trois ans de prison.
La durée de la période de sûreté est allongée en cas d'assassinat ou de meurtre en bande organisée commis sur des personnes dépositaires de l'autorité publique.
La surveillance judiciaire après la libération prévue par l'article 723-29 du code de procédure pénale pourra être étendue à toute personne encourant cinq ans d'emprisonnement pour un crime ou un délit commis en état de récidive légale. De plus, est permis le placement sous surveillance électronique mobile des personnes condamnées à une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure ou égale à cinq ans en état de nouvelle récidive.
Une nouvelle procédure permet au procureur de poursuivre directement un mineur devant le tribunal pour enfant, si certaines conditions sont remplies. Le procureur ne pourra recourir à cette procédure que si le mineur a fait l'objet d'une procédure dans les six mois précédents ou s'il a été condamné dans les six mois précédents (l'Assemblée nationale souhaitait une année).
Sécurité quotidienne et prévention de la délinquance
La répression des vols commis à l'encontre de personnes vulnérables est aggravée. De plus, le point de départ du délai de prescription de toute une série de délits commis à l'encontre d'une personne vulnérable est repoussé au moment où « l'infraction apparaît à la victime dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ». Le texte renforce aussi la répression des infractions commises dans des enceintes sportives.
Par ailleurs, de nouvelles infractions sont créées : la distribution d'argent à des fins publicitaires sur la voie publique, la vente « à la sauvette »… La transformation du délit d'occupation abusive des halls d'immeubles en contravention n'a pas été retenue. Notons également que ce texte renforce la lutte contre l'insécurité routière (V. Dalloz actualité, 29 mai 2009, obs. S. Lavric et 18 févr. 2010, obs. S. Lavric).
Enfin, les dispositions de l'article 78-2 du code de procédure pénale en matière de contrôles d'identité autour des frontières sont modifiées pour encadrer des contrôles. Ce code est également modifié pour permettre aux enquêteurs de pénétrer dans un domicile aux heures légales de perquisition afin de procéder à l'arrestation des personnes faisant l'objet d'une demande d'extradition ou d'un mandat d'arrêt européen.
Au-delà des dispositions pénales, souvent polémiques, la loi nouvelle intéresse les acteurs publics sur différents points.
De la vidéosurveillance à la vidéoprotection
Modifiant les dispositions concernant la vidéosurveillance de la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, la section 4 « vidéoprotection » de la LOPPSI II allonge la liste des cas justifiant l'usage de tels procédés d'enregistrement : prévention d'actes de terrorisme, de risques naturels ou technologiques, secours aux personnes et défense contre l'incendie et sécurité des installations accueillant du public dans les parcs d'attraction. L'autorité publique ou la personne morale qui fera le choix de ne pas exploiter elle-même son système devra conclure une convention, agréée par le représentant de l'Etat, avec l'opérateur qui en aura la charge, après information du maire de la commune concernée.
La Commission nationale de l'informatique et des libertés n'aura à se prononcer que sur les systèmes, installés sur les lieux publics, dont les enregistrements sont utilisés dans des traitements structurés permettant l'identification des personnes, les autres systèmes restant autorisés par le représentant de l'Etat après avis de la commission départementale de vidéoprotection. Cet avis ne sera pas requis dans un nouveau cas d' « autorisation provisoire », prévu lorsque le représentant de l'Etat est informé de la tenue imminente d'une manifestation présentant des risques d'atteinte à la sécurité des personnes et des biens.
La commune et la prévention de la délinquance
L'article L. 2211-4 du code général des collectivités territoriales, qui confie au maire le soin d'animer sur le territoire de sa commune la politique de prévention de la délinquance et la coordination de sa mise en œuvre, est complété. Le texte précise que, pour mettre en œuvre ces dispositions, le maire peut convenir avec l'Etat ou les autres personnes morales intéressées des modalités nécessaires à la réalisation des actions de prévention de la délinquance. De plus, la loi institue l'obligation pour les communes de plus de 50 000 habitants de créer un conseil pour les droits et devoirs des familles déjà prévu, à titre facultatif, par l'article L. 141-1 du code de l'action sociale et des familles.
Le bail emphytéotique bientôt mis en concurrence ?
La LOPPSI II prolonge la possibilité de conclure un bail emphytéotique administratif (BEA) pour les besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationales jusqu'au 31 décembre 2013 (sans prolonger, en revanche, ceux conclus pour répondre aux besoins d'un établissement public de santé ou d'une structure de coopération sanitaire) et les soumet, au-delà d'un certain seuil, à une évaluation préalable. Surtout, l'ensemble des BEA de l'article L. 1311-2 du CGCT devront être précédés, « le cas échéant », de mesures de publicité et de mise en concurrence, dont les modalités seront précisées par décret en Conseil d'Etat.
La lutte contre l'insécurité routière
La loi nouvelle réduit à deux ans le délai au terme duquel le conducteur qui n'a pas commis de nouvelle infraction entrainant retrait de points voit son permis crédité de ses douze points, excepté pour les délits et les contraventions de quatrième et de cinquième classe pour lesquels le délai reste de trois ans (dispositions non applicable aux permis probatoires). Pour les infractions ayant donné lieu au retrait d'un seul point, la loi ramène à 6 mois au lieu d'un an le délai au terme duquel, en l'absence de nouvelle infraction, ce point est réattribué. De plus, elle fixe à un le nombre de stage de récupération de points qu'un conducteur peut effectuer annuellement.
Création de la réserve civile de la police nationale
Destinée « à des missions de soutien aux forces de sécurité intérieure et des missions de solidarité […] à l'exception des missions de maintien et de rétablissement de l'ordre public », la réserve civile de la police nationale pourra être constituée de policiers retraités, comme c'était déjà le cas, mais également de volontaires de nationalité française, majeurs, aptes physiquement et au casier judiciaire vierge. Ils ne pourront « assurer, à l'exclusion de toute mission de police judiciaire et de toute mission à l'étranger, que des missions élémentaires d'exécution à la demande des fonctionnaires sous l'autorité desquels » ils seront placés. Ces réservistes souscriront un contrat d'engagement pour une durée maximale de 90 jours par an, contre 150 jours pour les réservistes retraités.
La LOPPSI c'est aussi :
• Une nouvelle procédure d'évacuation forcée des campements illicites installés sur des terrains appartenant à une personne publique est créée. Son initiative est réservée au préfet, elle n'interviendra qu'en cas de graves risques à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique, le délai minimum d'exécution de la mise en demeure est de 48 heures et le préfet pourra être autorisé par le président du tribunal de grande instance, saisi en la forme des référés et statuant sous 48 heures, à faire procéder à la destruction des constructions édifiées de façon illicite.
• seules les communes équipées à cette fin au 1er janvier 2011 auront, dans le cadre de leur mission de réception et de saisie des demandes de passeport, celle de recueillir la photographie du visage du demandeur, pour une période définie par décret.
• l'autorité administrative peut ordonner le placement sous surveillance électronique mobile de l'étranger, astreint à résider dans des lieux qui lui sont fixés, s'il a été condamné à une peine d'interdiction du territoire ou expulsé pour des actes liés au terrorisme.
• Les magistrats administratifs, dans le cadre des recours formulés contre les décisions de retrait de points, sont autorisés à accéder directement aux informations relatives au passé du conducteur (informations de l'art. L. 225-1)

fichier
-