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Responsabilité pénale de la personne morale en cas d'accident mortel du travail

Nom de l'expert
Senatore
Prénom de l'expert
Audrey
Fonction de l'expert
Docteur en droit
Chapo du commentaire
La personne morale engage sa responsabilité pénale du chef d'homicide involontaire en cas de faute non intentionnelle de ses organes ou représentants, même si ces derniers n'ont commis aucune faute délibérée ou caractérisée. Ce cas d'espèce retient l'attention car il est permetde rappeler, d'une part, que seule la faute qualifiée peut engager la responsabilité pénale de l'auteur - personne physique - indirect d'un dommage et d'autre de part, que la responsabilité pénale de l'employeur, qui aurait pu être un SDIS, peut être engagée du chef d'homicide involontaire.
Texte du commentaire

Le 28 avril 2009 la chambre criminelle de la Cour de cassation confirme sa jurisprudence relative à la responsabilité pénale des personnes, consécutive à la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000, dite loi Fauchon, relative aux délits non intentionnels, renforcée par la loi n°2004-204 du 9 mars 2004, dite loi Perben II qui a supprimé le caractère spécial de la responsabilité pénale des personnes morales.

Dans la présente affaire, un salarié a été victime d'un accident mortel du travail, alors qu'il déplaçait des poutrelles métalliques à l'aide d'un pont roulant. Les traverses de stockage se trouvant sur le chemin du salarié sur le pont roulant constituait le danger à l'orgine de l'accident. La société employant le salarié et son gérant onté été cités à comparaître devant le juge correctionnel, lequel condamna la personne morale et la personne physique pour infraction à la réglementation sur la sécurité du travail : seule personne morale fut condamnée du chef d'homicide involontaire. Les prévenus se pourvoient en cassation, dont le premier moyen relatif aux règles applicables depuis la loi de 2000 est rejeté par la chambre criminelle au terme d'un raisonnement fort cohérent.

La responsabilité pénale de la personne physique

En application des dispositions des articles 121-3 et 221-6 du code pénal, le gérant, qui n'est que l'auteur indirect du décès de son salarié, ne pouvait se voir prévenu du chef d'homicide volontaire car il aurait du pour ce faire commettre une faute qualifiée, c'est-à-dire caractérisée ou délibérée.

Le comportement fautif du gérant (omission de prendre les mesures nécessaires et d'aménager les lieux de travail de manière à assurer la sécurité des travailleurs) ne remplissait pas les conditions de la faute délibérée qui suppose la violation manifestement délibérée d'une obligation légale ou réglementaire de sécurité, d'autant que rien n'indiquant en l'espèce l'existence d'une telle obligation.

La faute caractérisée, quant à elle, exige une certaine gravité : l'imprudence ou la négligence doit présenter une particulière évidence. Bien que le gérant avait donné son accord pour l'aménagement du lieu de travail qui a causé l'accident mortel, les juges du fond ont considéré que les négligences du gérant n'taient pas d'une suffisante gravité pour retenir une faute caractérisée. En l'absence de faute qualifiée, le gérant, auteur indirect du dommage, ne pouvait pas voir sa responsabilité pénale engagée du chef d'homicide involontaire.

La responsabilité de la personne morale

Selon la loi Fauchon la personne morale est toujours responsable en cas de faute en lien causal indirect avec le décès, sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'une faute qualifiée. Ici la société (ailleurs le SDIS) est déclarée coupable d'homicide involontaire, « même en l'absence de faute délibérée ou caractérisée de la personne physique », conformément aux articles 121-2 et 121-3 du code pénal. La preuve d'une faute, même simple, commise par les organes ou représentants (ici le gérant, ailleurs le DOS ou le COS) de la personne morale suffit à engager sa responsabilité. Le gérant étant redevable d'une faute simple le juge ne pouvait retenir sa responsabilité du chef d'homicide involontaire, mais cela suffisait pour engager la responsabilité de la personne morale.

La chambre criminelle confirme ainsi une jurisprudence constante dans l'application de la loi sur les délits non intentionnels.

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