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Règlementation dans la lutte contre l'épidémie du Covid-19

Nom de l'expert
Touache
Prénom de l'expert
Alexia
Fonction de l'expert
Elève-avocate - CERISC
Chapo du commentaire
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Texte du commentaire

Ces derniers jours, la règlementation en la matière a progressivement évolué vers un durcissement du dispositif. Il n'y a pas un jour où un décret ou arrêté n'est pas paru. Fait rare, un JORF a été mis en ligne ce lundi 16 mars.

Plusieurs mesures ont ainsi été prises afin d'endiguer cette pandémie lesquelles sont de plusieurs ordres. Seules les mesures qui portent atteintes au quotidien des personnes seront aujourd'hui mentionnées.

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Les mesures d'ordre exceptionnel

Tout d'abord, les rassemblements, réunions ou activités "mettant en présence de manière simultanée plus de 100 personnes en milieu clos ou ouvert" sont désormais interdites sur le territoire et ce jusqu'au 15 avril 2020.

Cette interdiction s'étend également "aux navires de croisière et aux navires à passagers transportant plus de cent passagers" de faire excale ou de mouiller dans les eaux intérieures et territoriales.

Ensuite, une liste d'établissement a reçu l'ordre de ne plus accueillir du public et ce jusqu'au 15 avril 2020 : les salles d'auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple ; les centres commerciaux, les restaurants et les débits de boissons ; les salles de danse et les salles de jeux ; les bibliothèques et les centres de documentation ; les salles d'expositions ; les établissements sportifs couverts ; les musées ; les chapiteaux, les tentes et les structures, les établissements de plein air ; les établissements d'éveil, d'enseignement, de formation ; les centres de vacances, les centres de loisirs sans hébergement.

Restent toutefois ouverts au public : les commerces présentant un caractère indispensable : les commerces alimentaires, pharmacies, banques, stations-services ou de distribution de la presse ; les services publics ; les services assurant les services de transport ; les établissements de culte.

Cependant concernant les établissements de culte, tout rassemblement de plus de 20 personnes y est interdit jusqu'au 15 avril 2020, à l'exception des cérémonies funéraires.

A cela s'ajoutent les garages automobiles, les commerces d'ordinateurs, les cavistes, les quincailleries, les bureaux de tabac, les commerces de cigarette électronique, les commerces d'aliments et fournitures pour les animaux de compagnie, les blanchisseries-teintureries...

Dans un autre registre, afin de limiter les déplacements pour les personnes disposant d"un traitement chronique, "lorsque la durée de validité d'une ordonnance renouvelable est expirée, les pharmacies d'officine peuvent dispenser, dans le cadre de la posologie initialement prévue, un nombre de boîtes par ligne d'ordonnance garantissant la poursuite du traitement jusqu'au 31 mai 2020".

Par ailleurs, les pharmacies d'officine sont autorisées à distribuer gratuitement des boîtes de masques de protection issues du stock national aux : médecins généralistes, médecins spécialistes, chirurgiens-dentistes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, sages-femmes, et pharmaciens.

Il est demandé à la population de respecter les mesures d'hygiène et de distanciation sociale dite "barrières" en tout lieu et en toute circonstance.

Depuis le 17 mars, le confinement est imposé à l'ensemble de la population présente sur le territoire.

Seuls les déplacements pour les motifs suivants sont autorisés : pour aller travailler, "lorsque ces déplacements sont indispensables pour des activités ne pouvant être interrompues ni organisées sous forme de télétravail" ; pour faire des courses en respectant les mesures d'hygiène et les distances de sécurité ; pour aller à la pharmacie ou chez le médecin ; pour porter assistance à une personne vulnérable ; pour sortir son chien ou faire une activité physique sans "se retrouver en groupe".

Toutes les personnes qui circuleront doivent dorénavant justifier de leurs déplacements via une attestation.

Le non-respect de cette obligation de confinement est sanctionné d'une amende forfaitaire de 135 euros (contravention de 4ème classe) qui peut être majorée à la hauteur de 375 euros.

Certains concours sont maintenus mais doivent impérativement respecter les règles d'hygiène et les distances sociales (l'examen de commandant de SPP et concours de colonel de SPP ont été reportés).

Enfin, les compétences des services de santé universitaires sont étendues "pour permettre de réaliser le suivi sanitaire des étudiants isolés, en résidence universitaire ou des personnels de ces résidences".

En parallèle de ces mesures nationales, les autorités administratives locales (maire, préfet) ont pris des mesures restrictives par le biais d'arrêtés. Dans le cadre du confinement, certains élus ont interdit l'accès à certains lieux publics tels que les plages ou les parc, d'autres ont instauré un couvre-feu.

A noter, que le gouvernement a activé le plan blanc maximal. A ce titre, les hôpitaux et les cliniques ont reçu l'ordre d'annuler toute chirurgien non-urgente pour accueillir le maximum de malades du Covid-19. Les étudiants en santé ainsi que les retraités sont réquisitionnés.

Sans doute, dans les jours suivants, de nouvelles mesures restrictives seront adoptées. Dans l'attente, il importe de s'intéresser au cadre juridique de ce dispositif exceptionnel qui se justifie par la gravité de la situation. Certaines mesures restreignent indéniablement les libertés individuelles.

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Le cadre juridique

L'état d'urgence, qui est une forme d'état d'exception permettant aux autorités administratives de prendre des mesures restrictives de liberté, est actuellement exclu. Le gouvernement ne l'a tout simplement pas décrété.

Il faut, sans doute, envisager une ancienne théorie du droit administratif, celle des circonstances exceptionnelles.

Les circonstances exceptionnelles permettent, sous le contrôle du juge, lorsque les événements l'exigent et pour assurer la continuité des services publics, à l'administration de ne pas respecter la légalité ordinaire.

A l'instar de l'état d'urgence, l'exécutif dispose de pouvoirs élargis en vue d'adapter le droit et ce parfois de manière très importante.

Les autorités administratives peuvent donc adopter des décrets pris en conseil des ministres pour instaurer des mesures attentatoires aux libertés individuelles telles que l'interdiction de circulation, la mise en place d'un couvre-feu ou encore les atteintes au droit à la manifestation.

Cette théorie a été développée par le Conseil d’État durant la Première Guerre Mondiale. Il avait admis, pour la première fois, que la puissance publique en la personne du préfet puisse disposer de pouvoirs exceptionnellement étendus en matière d'ordre et de sécurité en cas de circonstances anormales et inhabituelles (CE 28 juin 1918, n° 63412, Heyriès ; CE 28 février 1919, n° 61593, Dames Dol et Laurent).

Cette théorie a été par la suite étendue à toutes les périodes de crises, de troubles graves (exemple, mai 1968) ou encore de catastrophes naturelles (CE 18 mai 1983, n° 25308, Rodes : éruption du volcan de la Soufrière à la Guadeloupe).

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Le projet de loi d'urgence pour faire face à l'épidémie du Covid-19

Le gouvernement a, récemment, présenté un projet de loi lequel doit être débattu d'abord par le Sénat, puis par l'Assemblée nationale.

Ce projet comporte 23 articles et vise à permettre en cas de crise sanitaire d'instaurer des mesures très variées : le report des municipales, les mesures d'urgence sanitaires, le soutien à l'économie et au travail.

Parmi les mesures d'urgence sanitaires, une mesure a retenu toute l'attention, celle d'introduire "l'état d'urgence sanitaire" directement inspirée de la loi du 3 avril 1955 instituant un état d'urgence et en déclarant l'application en Algérie.

Il est précisé dans le projet que cet "état d'urgence sanitaire" pourrait être déclaré "en cas de catastrophe sanitaire, notamment d'épidémie mettant en jeu par sa nature et sa gravité, la santé de sa population" (article 4) par un décret pris en conseil des ministres à la suite "du rapport du ministre chargé de la santé" (article 5) pour une durée de 12 jours.Au-delà de ces 12 jours, une prorogation peut-être autorisée uniquement par le Parlement.

Cette déclaration permet au "Premier ministre de prendre [...] les mesures générales limitant la liberté d'aller et venir, la liberté d'entreprendre et la liberté de réunion et permettant de procéder aux réquisitions de tout bien et services nécessaires afin de lutter contre la catastrophe sanitaire mentionnée à l'article 4" (article 9).

De même, le ministre chargé de la santé dispose de pouvoirs de nature à "prendre les mesures individuelles de nature à lutter contre la catastrophe [...]" (article 10).

Ces mesures doivent être proportionnées au regard des risques encourus.

Des sanctions sont également prévues en cas d'irrespect des mesures de confinement lesquelles sont nettement supérieures à celles introduites par l'arrêté du 17 mars 2020.

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