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L’actualité jurisprudentielle en matière de sécurité civile

Nom de l'expert
Touache
Prénom de l'expert
Alexia
Fonction de l'expert
Elève-avocate - CERISC
Chapo du commentaire
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Texte du commentaire

Présentation :

La loi de finances pour 2020 est finalement entrée en vigueur en fin d’année après avoir réussi le test devant le Conseil constitutionnel (DC 27 décembre 2019).

Par ailleurs, plusieurs arrêts ont trait aux pouvoirs de police générale du maire (sécurité) tandis que d’autres concernent directement les SDIS (accident de service, obligation de sécurité de l’employeur, droit de grève).

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CONSTITUTIONNALITE

 

 

Le Conseil constitutionnel a été saisi par les députés et sénateurs de l’opposition en vertu de l’article 61 de la Constitution (contrôle a priori) en vue d’apprécier la conformité du projet de loi de finances pour 2020.

Les membres du Conseil ont jugé les dispositions contestées sauf une conformes au bloc de constitutionnalité.

Ils ont estimé que l’article 154 qui vise à lutter contre la fraude fiscale ne constituait pas un cavalier législatif ; il avait donc toute sa place au sein du projet de loi.

Par contre, les sages de la rue Montpensier ont considéré qu’une « partie du premier alinéa du paragraphe I de l'article 154 de la loi déferrée » était contraire à la Constitution.

En effet, cette partie autorise également l’administration à recourir à la collecte et à l'exploitation automatisées de données en cas de défaut ou de retard dans la déclaration d’impôt dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure (article 1728, 1b du code général des impôts). 

Pour eux, ce dispositif porte atteinte de manière disproportionnée au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'expression et de communication. De plus, « les mots « b et » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 154 sont contraires à la Constitution ».

Au final, le Conseil a validé avec une réserve d’interprétation pour l’article 154.

(CC 27 décembre 2019, n° 2019-796 DC, Loi de finances pour 2020)

 

 

CIRCULATION ROUTIERE

 

 

Un propriétaire « insatisfait du sens unique de circulation de sa rue et de la gestion des stationnements », a sollicité au maire de la commune par courrier « le rétablissement d'un double sens de circulation et l'interdiction du stationnement du côté pair de la voie ».

Face au silence gardé par la commune de Juvignac, il a saisi le Tribunal administratif de Montpellier lequel a rejeté sa requête.

Pour le tribunal, le requérant ne démontre pas que « l'existence d'un sens unique présente un risque particulier en termes de sécurité ». Il n’y a donc pas de péril grave obligeant le maire de la commune à user de ses pouvoirs de police générale.

De même, il n’est pas établi que « l'existence de risques pour la sécurité, liés à un rétrécissement de la chaussée du fait d'un stationnement bilatéral, nuisant selon lui à la progression des véhicules, et notamment à celle des engins de secours ».

Les juges d’appel ont donc confirmé le jugement.

(CAA Marseille 4 novembre 2019, n° 17MA04070, M. E… C… c/ commune de Juvignac)

 

 

STATUT

 

 

Accident de service

 

Le 27 février 2007, lors d’une opération de secours, une sapeuse-pompière volontaire a chuté d’une hauteur de 2,5 mètres. Après la reconnaissance de la guérison, des douleurs se sont manifestées, une lombo-sciatique a été diagnostiquée et reconnue comme une rechute par le corps médical. A ce titre, la secouriste a été placée en arrêt maladie de 2011 à 2013.

A partir de 2013, une procédure de réforme a été ouverte, ce qui a conduit le directeur du SDIS à décider, après avis de la commission de réforme, que « les arrêts de travail et soins prescrits au titre de l'accident du 27 février 2007, devaient à compter du 1er février 2013, relever de la maladie ordinaire et qu'un taux d'incapacité permanente partielle fixé à 8 % devait être reconnu à [l’égard de la SPV] ».

L’intéressée a contesté cette décision en date du 17 janvier 2014.

Le Tribunal administratif de Grenoble a rappelé la majeure :

-          D’une part, « la date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent » ;

-          D’autre part, « la consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident ».

Les juges du fond ont jugé, au regard des divers examens médicaux et en contradiction avec le SDIS, que la victime ne pouvait être considérée comme guérie des séquelles de l’accident de service. Par conséquent, « le directeur du SDIS […] ne pouvait lui refuser, par la décision attaquée, le bénéfice des droits ouverts par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991 ».

La requête du SDIS a donc été rejetée.

 (CAA Lyon 9 avril 2019, n° 17LY01766, Mme A… C… c/ SDIS)

 

Droits et libertés

Droit de grève

 

Le SDIS a assigné, par la voie de référé, plusieurs syndicats de sapeurs-pompiers afin qu’il soit « ordonné de supprimer tout tract, article ou communication écrite ou électronique incitant, recommandant ou suggérant, même indirectement, aux sapeurs-pompiers de mettre en œuvre tout calicot, inscription à la peinture ou autre substance sur les matériels roulants ou les immeubles du SDIS ».

Le SDIS a sollicité en outre « la désactivation, ou la suppression de toute page internet, de tout insert sur une page Facebook […] ».

Les demandes du SDIS se fondent sur les dispositions du règlement intérieur « dont la légalité est par ailleurs contestée, n’est pas opposable aux syndicats qui n’en sont pas partie ».

De même, la responsabilité des Syndicats ne peut être engagée faute d’avoir participé de manière « effective et directe à la grève ».

Le tribunal rappelle que « l’incitation à la grève, comme il est allégué en l’espèce, ne saurait en effet être considérée comme une participation effective et directe du syndicat à la grève ».

Par conséquent, le juge a débouté le SDIS de l’ensemble de ses demandes.

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LEGALITE ADMINISTRATIVE

 

 

Acte administratif

 

Permis de construire

 

Par un arrêté municipal du 3 juin 2014, un couple de propriétaires ont été autorisés à exécuter des travaux de modification d’accès au droit de leur propriété située dans le hameau de Thairy. Toutefois, il leur est imposé par cet acte « de maintenir, sur son tracé projeté, la voie utilisable par les engins des services d'incendie et de secours et libre de tout obstacle ».

Les époux ont saisi le Tribunal administratif de Grenoble tendant à l’annulation de cet arrêté.

Les premiers juges ont considéré la demande fondée. La commune a relevé appel.

La Cour administrative d’appel de Lyon a infirmé le jugement. Selon elle, il est de principe et en application combinée des articles L.2212-2 et L.1424-2 du code général des collectivités territoriales que « les services publics d'incendie et de secours sont, dans le cadre de leurs missions de protection et de secours, en droit d'intervenir sur tout le territoire de la commune, sans que puisse leur être opposé le caractère privé des voies qu'ils doivent emprunter et qu'un maire peut légalement sur le fondement du 5° de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales imposer des prescriptions particulières à des propriétaires privés afin de préserver les caractéristiques physiques d'une voie d'accès permettant l'intervention de leurs engins, sans que puisse lui être opposée la circonstance que cette voie ne serait pas ouverte à la circulation publique ou grevée d'une servitude de passage ».

Or, « il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existerait une voie publique ou privée permettant l'accès par les services de secours et d'incendie aux habitations riveraines de l'impasse du Peutet, autre que la voie traversant la propriété des époux ».

En outre, la décision du maire n’empêche pas les intéressés à clore leurs parcelles cadastrées.

Les juges d’appel ont ainsi jugé que cette décision était proportionnée ; l’élu local n’a pas excédé ses pouvoirs de police générale.

(CAA Lyon 21 mars 2019, n° 17LY0489, Mme et M. D… c/ commune de Saint-Julien-en-Genevois)

 

Arrêté de péril

 

A Paris, il revient à la Préfecture de police « d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques » en lieu et place d’une maire (article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales). Il s’agit d’une spécificité parisienne.

La Préfecture a émis un arrêté de péril des travaux qui n’avaient pas été réalisés par le propriétaire.

Le propriétaire, la SCI La Pommadière de Paris et le Syndicat de copropriétaires ont saisi la juridiction administrative en vue de l’annulation de la décision. Ils ont eu gain de cause aussi bien en première instance qu’en appel.

Les premiers juges se sont fondés sur le rapport de l’architecte de sécurité de la Préfecture de police du 13 décembre 2013 lequel reconnait l’existence du péril grave au sens des articles L.511-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation.

Pour autant, ce rapport ne faisait pas mention d’un péril imminent. C’est la raison pour laquelle l’arrêté de péril du 24 octobre 2012 prescrivait des travaux propres à « assurer la stabilité et la solidité du mur pignon donnant sur la parcelle du 14 rue Emile Level en procédant à toutes les confortations nécessaires » tout en accordant un délai de deux mois pour y procéder.

De plus, « le préfet de police et la ville de Paris ne produisent devant la Cour aucun élément nouveau de nature à démontrer que l'urgence était telle qu'elle ne permettait pas de prendre les mesures nécessaires dans le respect de la procédure prévue par l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ».

En l’absence du caractère imminent, les juges d’appel ne pouvaient que rejeter la requête de la Préfecture.

(CAA Paris 9 octobre 2019, n° 19PA02017, M. F… B…, SCI La Pommadière, Syndicat de copropriétés c/ Préfecture de police)

 

 

RESPONSABILITE

 

 

Responsabilité administrative

Obligation de sécurité de l’employeur

 

Une agent technique a été victime d’agression sexuelle par un de ses collègues de travail. Elle a déposé une plainte pour ces agissements.

Par la suite, elle a accusé son employeur, la commune de Pau, d’avoir manqué à son obligation de sécurité. En effet, l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires oblige les collectivités locales à protéger ses employés « contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages ».

Pour les juges d’appel, il n’est pas établi que la commune de Pau avait connaissance de l’agression sexuelle sur la requérante.

Aucune faute ne peut être ainsi retenue à l’encontre de la commune. La requête de l’agent a été à nouveau rejetée.

(CAA Bordeaux 4 novembre 2019, n° 17BX02491, Mme E… D… c/ commune de Pau)

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