Quelles sont les conditions de pratique d’un test de dépistage urinaire de toxiques (cannabis, amphétamine …) en milieu de travail ?
Peut faire un test inopiné en milieu de travail ?
Réponse du 29/11/2022
Dépister n’est pas un geste anodin.
C’est une atteinte aux droits de la personne. Arrêt Peintures Corona du 1er février 1980, n° 06361,
https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007685694
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1) Réalisation à l’initiative de l’employeur
Une jurisprudence en du Conseil d'État[1] établi assez clairement les règles que doit suivre l’employeur afin de mettre en place un dépistage des toxiques sur le lieu de travail.
L’employeur agit en son obligation de sécurité[2] et peut procéder au dépistage de produits stupéfiants ou d’alcool de manière aléatoire.
- 1ère condition : ce dépistage ne doit cibler que des agents travaillant sur des postes à risques. Au sein d’un SDIS, le caractère dangereux des missions exercées par les sapeurs-pompiers[3] fait que tout SP opérationnel est concerné.
Considérant les PATS et les agents non-opérationnels, une liste des postes à risque pourra être proposée en relation avec le médecin du travail et le CST.
- 2éme condition : les modalités du dépistage doivent être inscrites dans le règlement intérieur :
- 3ème condition : une contestation des résultats doit être possible grâce à une contre-expertise à la charge de l’employeur.
Le conseil d’État souligne bien que la présence d’un professionnel de santé n’est pas nécessaire pour réaliser le dépistage dans ce cadre. Les résultats restent couverts par le secret professionnel.
Enfin, cette même jurisprudence valide l’utilisation de tests salivaires pour le dépistage par l’employeur dans le respect des conditions d’utilisation du test.
Une jurisprudence de la cour d’appel d’Amiens[4] valide aussi les tests urinaires pour un dépistage à l’initiative de l’employeur.
2) Réalisation à l’initiative de la médecine du travail
Que ce soit le médecin du travail ou le médecin de sapeur-pompier, les deux professionnels de santé sont libres de prescrire des examens qu’ils jugeraient nécessaire à des fins de détermination de la compatibilité entre le poste de travail et l’état de santé de l’agent[5],[6]. Ces examens peuvent inclurent des tests de dépistage à la recherche d’une consommation récente d’alcool ou de stupéfiants.
Cependant, le dépistage d’une imprégnation en stupéfiant ou en alcool par le médecin du travail ou de sapeur-pompier ne saurait être faite à la demande de l’employeur ou en dehors d’une consultation médicale.
Il existe une particularité sur les modalités de dépistage : si les tests salivaires et urinaires utilisés par l’employeur ne sont pas considérés comme des tests de biologie médicale (car exempts de conséquence médicale) ; ces mêmes tests utilisés par un professionnel de santé doivent être réalisés sous la responsabilité d’un biologiste médical[1].
En effet, ces tests ont alors un retentissement sur la prise en charge médicale de l’agent et entrent alors dans la définition posée par le CSP[2] : « un examen de biologie médicale est un acte médical qui concourt à la prévention, au dépistage, ... ».
Évidemment, tout dépistage positif est soumis au secret professionnel et seule une restriction d’aptitude pourra être transmise à l’employeur sans mention de la cause.
[1] Art. L6211-7 CSP
[2] Art. L6211-1 CSP
[1] CE, 4ème - 5ème chambres réunies, 05 déc. 2016, 394178
[2] Art. L4121-1 Code du travail
[3] Art. L723-1 du CSI
[4] CA Amiens, 5e ch. prud'homale, 27 janv. 2021, 19/04143
[5] Art. 22 du Décret n°85-603 du 10 juin 1985
[6] Art. 19 de l’Arrêté du 6 mai 2000
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Médecin de classe normale Eddie NICOLAS – eddie.nicolas@sdis78.fr
Infirmier Capitaine Pierre LEMAIRE – pierre.lemaire@sdis78.fr
Service Médico-juridique du SDIS78
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