• Volontariat : le télétravail intervient à la demande de l’agent ;
• Alternance : 3j./semaine maximum ;
• Réversibilité : Possibilité de remise en cause du télétravail et de retour au travail sur site ;
• Droit à la déconnexion : l’agent ne peut être contraint à travailler hors horaires ou à être disponible.
Par un récent accord entre la ministre de la transformation et de la fonction publique et différents syndicats et associations d’élus, le télétravail dans la fonction publique se voit désormais encadré assez précisément. Depuis le début de la crise de la COVID-19 et l’explosion du télétravail qui en a découlé, les règles en la matière dépendais souvent du ministre compétent, de circulaires interne unilatérales, voir même du bon vouloir du chef de service. Mais avec ce nouvel accord, l’objectif est « d'envisager la pratique du télétravail comme un des modes d'organisation du travail au bénéfice des agents publics et du service public ».
Cet accord défini le télétravail selon quatre critères cumulatifs :
« 1) L'agent en télétravail a demandé et a obtenu l'autorisation d'exercer en télétravail une partie de son temps de travail qu'il aurait pu réaliser sur site ;
2) Sur un (ou plusieurs) lieux de télétravail ;
3) En alternant un temps minimal de présence sur site et un temps en télétravail ;
4) En utilisant les technologies de l'information et de la communication. »
De cette définition, l’accord dégage quatre grands principes du télétravail.
Le volontariat. Le télétravail dans la fonction publique est un choix de l’agent. Pour manifester sa volonté de pouvoir exercer son activité en télétravail, l’agent doit faire une demande écrite auprès de son employeur qui doit donner son autorisation d’exercice de l’activité en télétravail, également par écrit. Mais si le principe est celui du volontariat de l’agent, il existe des exceptions : en effet, en cas de circonstances exceptionnelles, l’employeur peut contraindre ses agents à exercer leurs activités en télétravail afin de « concilier la protection des agents et la continuité du service public ». Dans ce cas, les dispositions en matière d’indemnisation (détaillées ci-dessous) s’appliquent automatiquement. Si l’Administration refuse la demande de télétravail, le refus devra être motivé après un entretien avec l’agent. Les décisions de refus prises en la matière sont susceptibles de recours devant la commission administrative paritaire pour les fonctionnaires ou devant la commission consultative paritaire pour les contractuels.
L’alternance. L’accord prévoit que la quotité maximum de télétravail dans la fonction publique est fixée à trois jours par semaine pour un agent à plein temps. Ce principe vise à garantir le maintien des liens avec le collectif de travail. Si l’accord rappel que le télétravail ne peut se substituer aux dispositifs sociaux de droit commun comme les congés maladie, maternité ou proche aidant, il reconnait également diverses exceptions à ce maximum de trois jours par semaine, notamment pour les femmes enceintes & pour les proches aidants (toujours à leur demande).
La réversibilité. L’accord prévoit qu’en principe il est possible de remettre en cause l’autorisation de télétravail de l’agent. Si cette remise en cause est à l’initiative de l’Administration, cette dernière devra en informer l’agent par écrit, après un entretien et de façon motivé au regard de l’intérêt du service. Si la remise en cause est à l’initiative de l’agent, ce dernier doit simplement en informer son employeur. Dans les deux cas, la remise en cause fait l’objet d’un délai de prévenance d’un mois pendant la période d’adaptation (prévue par l’autorisation de télétravail) et de deux mois ensuite. Si l’interruption de l’autorisation est à l’initiative de l’administration, toute reprise anticipée en présentiel doit être motivée et faire l’objet d’un entretien préalable. Si l’interruption de l’autorisation est à l’initiative de l’agent, la reprise se fait dans le délai le plus court dès lors qu’aucune contrainte organisationnelle ne s’y oppose. En revanche, la remise en cause de l’autorisation de télétravail ne s’oppose pas à la reprise ultérieure du télétravail. L’accord envisage également le déplacement des jours télétravaillés sur la semaine et la suspension provisoire de l’autorisation de télétravail.
L’usage d’outils numériques. L’ensemble des outils nécessaires au télétravail doivent être fournis par l’Administration employeur : le matériel bureautique mais également les outils dématérialisés comme les logiciels métiers, la messagerie d’entreprise ou l’accès aux serveurs professionnels. Le plus souvent, les outils numériques sont déjà acquis (que ce soit des ordinateurs portables ou fixes). Néanmoins, il convient de s’assurer qu’ils peuvent être remis en main propre à l’agent sur le lieu d’emploi ou livré chez lui. L’accès aux serveur doit être possible depuis une connexion privée.
Le sens du télétravail. Le télétravail doit faire l’objet d’une réflexion collective au plus proche de l’agent. L’objectif est de l’envisager comme : « un mode d'organisation parmi d'autres dans le cadre de l'accomplissement des missions de service public ». En ce sens, le deuxième point de l’accord propose une méthode de raisonnement afin de mettre en place une réflexion pour penser le mode de mise en place le plus adapté au service concerné.
L’accès au télétravail. Un délai d’un mois maximum est posé pour l’instruction des demandes de télétravail, partant de la réception de la demande ou de la date limite de dépôt d’une campagne de recensement des demandes. L’autorisation d’exercice des fonctions en télétravail devra mentionner : « Les fonctions de l'agent exercées en télétravail ; le lieu où les lieux d'exercice en télétravail ; les modalités de mise en œuvre du télétravail [durée, horaires] ; la date de prise d'effet de l'exercice des fonctions en télétravail ; le cas échéant, la période d'adaptation prévue à l'article 5 et sa durée. ». Cette autorisation est accompagnée d’un document d’information précisant notamment la nature et le fonctionnement des dispositifs de contrôle et de comptabilisation du temps de travail ainsi que les équipements mis à la disposition de l’agent pour le télétravail, avec les différentes conditions afférant à leur installation, leur utilisation, leur maintenance ou leur restitution par exemple. En sus, elle sera accompagnée de l’arrêté ou de la délibération fixant les conditions du télétravail dans la branche du service public concerné[i] ainsi que d’un « document rappelant ses droits et obligations en matière de temps de travail et d'hygiène et de sécurité. »[ii].
La prévention des risques et les accidents du travail. L’accord met en avant les effets positif du télétravail notamment sur « la concentration, l'efficacité, la qualité du travail ainsi qu'un impact sur l'environnement, la conciliation des temps de la vie personnelle et professionnelle »[iii]. Mais ces agents restent exposés aux risques inhérents au monde professionnel. Cette modalité d’organisation du travail doit donc faire l’objet d’un encadrement suffisant afin de s’assurer de la bonne santé, notamment mentale de l’agent. Pour se faire, l’accord invite donc les employeurs à prévoir, comme pour les agents travaillant sur site, des mécanismes de prévention des risques psychosociaux, mais également des « risques de troubles musculosquelettiques, de fatigue oculaire accrue du fait de l'utilisation d'ordinateurs portables. ». En effet, les agents en télétravail disposent de la même protection que les agents sur site en matière d’accident du travail. Ainsi, les accidents de service sont pris en charge dès lors qu’ils sont en lien avec ce dernier et qu’ils ont eu lieu durant le temps de travail[iv].
Le droit à la déconnexion, le temps et la charge de travail. Le temps et la charge de travail restent identique quel que soit la modalité de travail. La législation classique du travail, c’est-à-dire le statut de la fonction publique et le code du travail s’appliquent au télétravail. Ainsi, il conviendra dans l’autorisation de télétravail de déterminer les horaires auxquels l’agent peut être contacté pour des raisons professionnelles. Cette précision permet notamment d’assurer le droit à la déconnexion. En effet, l’agent en télétravail doit observer les mêmes temps de repos et de congé que s’il travaillait sur site. En ce sens, l’accord invite les employeurs publics à déterminer ces conditions dans le cadre du dialogue social de proximité afin d’adapter ces dispositions aux réalités locales.
La mise en place d’une indemnisation forfaitaire. Le télétravail peut faire l’objet d’une indemnisation des frais liés au télétravail. A ce titre, l’accord propose de mettre en place une indemnisation forfaitaire. Si elle est libre pour les collectivités territoriales (au nom du principe de libre administration), elle est plafonnée à 2.5 euros par jour de télétravail, avec un maximum de 220 euros par an[v] pour la fonction publique d’État. La prise en charge des frais de repas de l’agent en télétravail est exclue. L’Administration employeur peut néanmoins prévoir des conventionnements spécifiques à des restaurants administratifs proches des télé-centres utilisés par l’agent, mais n’y est en aucun cas contrainte.
Utilisation des données de l’agent par l’employeur. C’est à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour : « assurer la protection des données personnelles de l'agent en télétravail et de celles traitées par celui-ci à des fins professionnelles ». L’autorisation de télétravail doit donc prendre en compte la confidentialité des travaux exécutés par l’agent et prendre les dispositions nécessaires pour que leur sécurité soit assurée même en télétravail. L’arrêté du ministère de l’intérieur exclut ainsi l’autorisation de télétravail pour les agents traitant des données à caractère sensible dès lors que leur protection ne peut être assurée en télétravail.
Les situations particulières. L’accord précise qu’il est applicable aux stagiaires et aux alternants.
[i] Pour les autorités relevant du ministère de l’intérieur : Arrêté du 19 juillet 2021 portant application du décret n° 2016-151 du 11 février 2016 et fixant les modalités de mise en œuvre du télétravail au sein des ministères de l'intérieur et des outre-mer
[ii] Par exemple : Décret n°2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature + Quatrième partie de la partie législative du code du travail : Santé et sécurité au travail (Articles L4111-1 à L4831-1)
[iii] Teodorovicz, Thomaz, Raffaella Sadun, Andrew L. Kun, and Orit Shaer. "Working from Home during COVID-19: Evidence from Time-Use Studies." Harvard Business School Working Paper, No. 21-094, March 2021.
[iv] Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 14 mai 2008, req. n°293899, Publié au recueil Lebon
[v] Arrêté du 26 août 2021 pris pour l'application du décret n° 2021-1123 du 26 août 2021 relatif au versement de l'allocation forfaitaire de télétravail au bénéfice des agents publics et des magistrats