Chères abonnées, chers abonnés,
Une nouvelle année a débuté et s’annonce d’ores-et-déjà riche pour la sécurité civile.
De nombreux textes ont été adoptés ces trois dernières semaines.
Deux se distinguent de par leur importance : la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique et la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
Toute l’équipe vous souhaite une très belle année, que 2020 soit signe de santé, bonheur et réussite !
Bonne lecture !
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La veille juridique est proposée par le Centre d'études et de recherches interdisciplinaires sur la sécurité civile (CERISC).
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Présentation :
La loi de finances pour 2020 est finalement entrée en vigueur en fin d’année après avoir réussi le test devant le Conseil constitutionnel (DC 27 décembre 2019).
Par ailleurs, plusieurs arrêts ont trait aux pouvoirs de police générale du maire (sécurité) tandis que d’autres concernent directement les SDIS (accident de service, obligation de sécurité de l’employeur, droit de grève).
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CONSTITUTIONNALITE
Le Conseil constitutionnel a été saisi par les députés et sénateurs de l’opposition en vertu de l’article 61 de la Constitution (contrôle a priori) en vue d’apprécier la conformité du projet de loi de finances pour 2020.
Les membres du Conseil ont jugé les dispositions contestées sauf une conformes au bloc de constitutionnalité.
Ils ont estimé que l’article 154 qui vise à lutter contre la fraude fiscale ne constituait pas un cavalier législatif ; il avait donc toute sa place au sein du projet de loi.
Par contre, les sages de la rue Montpensier ont considéré qu’une « partie du premier alinéa du paragraphe I de l'article 154 de la loi déferrée » était contraire à la Constitution.
En effet, cette partie autorise également l’administration à recourir à la collecte et à l'exploitation automatisées de données en cas de défaut ou de retard dans la déclaration d’impôt dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure (article 1728, 1b du code général des impôts).
Pour eux, ce dispositif porte atteinte de manière disproportionnée au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'expression et de communication. De plus, « les mots « b et » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 154 sont contraires à la Constitution ».
Au final, le Conseil a validé avec une réserve d’interprétation pour l’article 154.
(CC 27 décembre 2019, n° 2019-796 DC, Loi de finances pour 2020)
CIRCULATION ROUTIERE
Un propriétaire « insatisfait du sens unique de circulation de sa rue et de la gestion des stationnements », a sollicité au maire de la commune par courrier « le rétablissement d'un double sens de circulation et l'interdiction du stationnement du côté pair de la voie ».
Face au silence gardé par la commune de Juvignac, il a saisi le Tribunal administratif de Montpellier lequel a rejeté sa requête.
Pour le tribunal, le requérant ne démontre pas que « l'existence d'un sens unique présente un risque particulier en termes de sécurité ». Il n’y a donc pas de péril grave obligeant le maire de la commune à user de ses pouvoirs de police générale.
De même, il n’est pas établi que « l'existence de risques pour la sécurité, liés à un rétrécissement de la chaussée du fait d'un stationnement bilatéral, nuisant selon lui à la progression des véhicules, et notamment à celle des engins de secours ».
Les juges d’appel ont donc confirmé le jugement.
(CAA Marseille 4 novembre 2019, n° 17MA04070, M. E… C… c/ commune de Juvignac)
STATUT
Accident de service
Le 27 février 2007, lors d’une opération de secours, une sapeuse-pompière volontaire a chuté d’une hauteur de 2,5 mètres. Après la reconnaissance de la guérison, des douleurs se sont manifestées, une lombo-sciatique a été diagnostiquée et reconnue comme une rechute par le corps médical. A ce titre, la secouriste a été placée en arrêt maladie de 2011 à 2013.
A partir de 2013, une procédure de réforme a été ouverte, ce qui a conduit le directeur du SDIS à décider, après avis de la commission de réforme, que « les arrêts de travail et soins prescrits au titre de l'accident du 27 février 2007, devaient à compter du 1er février 2013, relever de la maladie ordinaire et qu'un taux d'incapacité permanente partielle fixé à 8 % devait être reconnu à [l’égard de la SPV] ».
L’intéressée a contesté cette décision en date du 17 janvier 2014.
Le Tribunal administratif de Grenoble a rappelé la majeure :
- D’une part, « la date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent » ;
- D’autre part, « la consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident ».
Les juges du fond ont jugé, au regard des divers examens médicaux et en contradiction avec le SDIS, que la victime ne pouvait être considérée comme guérie des séquelles de l’accident de service. Par conséquent, « le directeur du SDIS […] ne pouvait lui refuser, par la décision attaquée, le bénéfice des droits ouverts par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991 ».
La requête du SDIS a donc été rejetée.
(CAA Lyon 9 avril 2019, n° 17LY01766, Mme A… C… c/ SDIS)
Droits et libertés
Droit de grève
Le SDIS a assigné, par la voie de référé, plusieurs syndicats de sapeurs-pompiers afin qu’il soit « ordonné de supprimer tout tract, article ou communication écrite ou électronique incitant, recommandant ou suggérant, même indirectement, aux sapeurs-pompiers de mettre en œuvre tout calicot, inscription à la peinture ou autre substance sur les matériels roulants ou les immeubles du SDIS ».
Le SDIS a sollicité en outre « la désactivation, ou la suppression de toute page internet, de tout insert sur une page Facebook […] ».
Les demandes du SDIS se fondent sur les dispositions du règlement intérieur « dont la légalité est par ailleurs contestée, n’est pas opposable aux syndicats qui n’en sont pas partie ».
De même, la responsabilité des Syndicats ne peut être engagée faute d’avoir participé de manière « effective et directe à la grève ».
Le tribunal rappelle que « l’incitation à la grève, comme il est allégué en l’espèce, ne saurait en effet être considérée comme une participation effective et directe du syndicat à la grève ».
Par conséquent, le juge a débouté le SDIS de l’ensemble de ses demandes.
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LEGALITE ADMINISTRATIVE
Acte administratif
Permis de construire
Par un arrêté municipal du 3 juin 2014, un couple de propriétaires ont été autorisés à exécuter des travaux de modification d’accès au droit de leur propriété située dans le hameau de Thairy. Toutefois, il leur est imposé par cet acte « de maintenir, sur son tracé projeté, la voie utilisable par les engins des services d'incendie et de secours et libre de tout obstacle ».
Les époux ont saisi le Tribunal administratif de Grenoble tendant à l’annulation de cet arrêté.
Les premiers juges ont considéré la demande fondée. La commune a relevé appel.
La Cour administrative d’appel de Lyon a infirmé le jugement. Selon elle, il est de principe et en application combinée des articles L.2212-2 et L.1424-2 du code général des collectivités territoriales que « les services publics d'incendie et de secours sont, dans le cadre de leurs missions de protection et de secours, en droit d'intervenir sur tout le territoire de la commune, sans que puisse leur être opposé le caractère privé des voies qu'ils doivent emprunter et qu'un maire peut légalement sur le fondement du 5° de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales imposer des prescriptions particulières à des propriétaires privés afin de préserver les caractéristiques physiques d'une voie d'accès permettant l'intervention de leurs engins, sans que puisse lui être opposée la circonstance que cette voie ne serait pas ouverte à la circulation publique ou grevée d'une servitude de passage ».
Or, « il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existerait une voie publique ou privée permettant l'accès par les services de secours et d'incendie aux habitations riveraines de l'impasse du Peutet, autre que la voie traversant la propriété des époux ».
En outre, la décision du maire n’empêche pas les intéressés à clore leurs parcelles cadastrées.
Les juges d’appel ont ainsi jugé que cette décision était proportionnée ; l’élu local n’a pas excédé ses pouvoirs de police générale.
(CAA Lyon 21 mars 2019, n° 17LY0489, Mme et M. D… c/ commune de Saint-Julien-en-Genevois)
Arrêté de péril
A Paris, il revient à la Préfecture de police « d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques » en lieu et place d’une maire (article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales). Il s’agit d’une spécificité parisienne.
La Préfecture a émis un arrêté de péril des travaux qui n’avaient pas été réalisés par le propriétaire.
Le propriétaire, la SCI La Pommadière de Paris et le Syndicat de copropriétaires ont saisi la juridiction administrative en vue de l’annulation de la décision. Ils ont eu gain de cause aussi bien en première instance qu’en appel.
Les premiers juges se sont fondés sur le rapport de l’architecte de sécurité de la Préfecture de police du 13 décembre 2013 lequel reconnait l’existence du péril grave au sens des articles L.511-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation.
Pour autant, ce rapport ne faisait pas mention d’un péril imminent. C’est la raison pour laquelle l’arrêté de péril du 24 octobre 2012 prescrivait des travaux propres à « assurer la stabilité et la solidité du mur pignon donnant sur la parcelle du 14 rue Emile Level en procédant à toutes les confortations nécessaires » tout en accordant un délai de deux mois pour y procéder.
De plus, « le préfet de police et la ville de Paris ne produisent devant la Cour aucun élément nouveau de nature à démontrer que l'urgence était telle qu'elle ne permettait pas de prendre les mesures nécessaires dans le respect de la procédure prévue par l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ».
En l’absence du caractère imminent, les juges d’appel ne pouvaient que rejeter la requête de la Préfecture.
RESPONSABILITE
Responsabilité administrative
Obligation de sécurité de l’employeur
Une agent technique a été victime d’agression sexuelle par un de ses collègues de travail. Elle a déposé une plainte pour ces agissements.
Par la suite, elle a accusé son employeur, la commune de Pau, d’avoir manqué à son obligation de sécurité. En effet, l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires oblige les collectivités locales à protéger ses employés « contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages ».
Pour les juges d’appel, il n’est pas établi que la commune de Pau avait connaissance de l’agression sexuelle sur la requérante.
Aucune faute ne peut être ainsi retenue à l’encontre de la commune. La requête de l’agent a été à nouveau rejetée.
(CAA Bordeaux 4 novembre 2019, n° 17BX02491, Mme E… D… c/ commune de Pau)
Le second alinéa de l'article 2 du décret du 12 septembre 2018 relatif à certaines attributions du préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup (NOR : TREX1823994D) est annulé.
La proposition de loi comporte deux articles.
Article 1er
L’article L. 211-1 du code de l’environnement est complété par un IV ainsi rédigé :
« Dans les zones géographiques à enjeux pour la sécurité humaine et faisant face à des risques majeurs, sous réserve que ces zones soient délimitées par des procédures administratives au titre d’un plan d’action et de prévention des inondations, d’un plan de gestion et de restauration des cours d’eau, d’un plan de prévention contre les risques naturels, d’un plan de prévention contre les risques technologiques ou de toute autre procédure ayant permis la délimitation d’une zone dangereuse, les travaux effectués par les personnes publiques en qualité de maitre d’ouvrage destinés à assurer la protection des personnes peuvent être entrepris sans que soient présentées les demandes d’autorisation ou les déclarations auxquelles ils sont soumis. La personne publique qui a la maîtrise d’ouvrage des travaux en informe préalablement le représentant de l’État dans le département, qui prend, dans un délai maximal d’un trimestre, un arrêté constatant que les travaux correspondent bien à un impératif de sécurité des populations dans une zone identifiée à risque.
Cette procédure est également applicable aux études préalables à la réalisation des travaux effectués par une personne publique. »
Article 2
La seconde phrase du III de l’article 302-5 du code de la construction et de l’habitation est complétée par les mots : « ou sur des communes ayant fait l’objet d’au moins deux procédures de classement en catastrophe naturelle au cours d’une période de 20 ans ».
Les changements climatiques et environnementaux constituent « une menace indéniable sur la sécurité des populations à travers le monde, y compris en France ». Plusieurs indicateurs permettent de mesurer les changements climatiques : le réchauffement planétaire récent, la sécheresse et la désertification, la hausse du niveau de mer, l’acidification des océans, la perte des habitats des animaux, la fonte des glaces. « À cela s’ajoutent la récurrence croissante et l’intensité des catastrophes naturelles soudaines comme les cyclones et les inondations, ainsi que des événements extrêmes tels que les fortes précipitations et les vagues de canicule ».
Ces catastrophes naturelles ont pour conséquence de forcer certaines populations à quitter leur lieu de vie. Certains scientifiques estiment que « d’ici 2050, 144 millions de personnes devront se déplacer chaque année au sein de leurs propres pays pour des raisons climatiques, dont 86 millions en Afrique ».
Il s’agit d’un enjeu planétaire dont la France n’est pas épargnée. Ces dernières années, la France a connu des inondations d’ampleur. L’année 2019 a été marquée par une douzaine d’inondations dans le Sud-Est.
Pour l’auteur, il paraît urgent de mettre en place « une évaluation préventive des effets des changements climatiques et environnementaux sur la sécurité des populations, notamment par l’élaboration d’une meilleure prévision de l’intensité, de la fréquence et de l’impact des catastrophes naturelles et des bouleversements environnementaux à venir, et […] une anticipation rigoureuse de leurs conséquences ».
« La présente loi propose que le Gouvernement élabore une stratégie aux niveaux national et international destinée d’une part à consolider la connaissance et de construire des orientations partagées sur ces enjeux, en s’appuyant sur les travaux de recherche existants, tout en commanditant des nouveaux si nécessaire. Cette stratégie devra également viser une meilleure coopération internationale sur ces sujets, dans la continuité de ce qui avait été adopté à Cancun en 2010 à l’occasion de la COP16. »
« D’autre part, cette stratégie évaluera la pertinence des dispositifs existants de prévention, d’adaptation, d’atténuation, de résilience, d’information, de gouvernance, d’assistance humanitaire et de protection juridique des personnes partout où les « risques d’inhabitabilité » seront identifiés, tant en France que dans le reste du monde ; elle veillera à la cohérence de cet ensemble avec les engagements d’atténuation, d’adaptation et de respect des droits fondamentaux ; elle proposera des évolutions des dispositifs existants et la mise en place des nouveaux dispositifs si nécessaire. »
L’auteur admet que « lorsque les mesures d’atténuation, de résilience et d’adaptation ne suffisent pas à garantir un maintien des populations dans leur lieu de vie, et que la détérioration de l’environnement est telle qu’elle fragilise la dignité et la sécurité des personnes, la migration peut être une solution d’adaptation ».
La présente proposition de loi est constituée de deux articles.
« L’article 1 prévoit la mise en œuvre d’une stratégie nationale et internationale sur les déplacements de populations victimes des changements climatiques ».
« L’article 2 prévoit un rapport sur une série de réflexions à mener, en lien avec la société civile, en vue notamment de préparer la stratégie prévue par l’article 1. Ce rapport prévoit des avancées dans le domaine de la recherche concernant l’impact des changements climatiques sur la sécurité des populations, tant en France que dans le monde, il émettra des recommandations pour l’introduction nouvelles notions juridiques dans le droit français et international afin de mieux protéger juridiquement les populations affectées, des pistes pour réviser les différents plans de prévention et d’intervention prévus pour faire face aux risques naturels. Enfin, ce rapport étudiera la manière dont la France peut anticiper au mieux les migrations climatiques et environnementales en matière de coopération internationale, tant sur le plan de l’adaptation que de l’assistance d’urgence. »
Les accidents industriels de différentes natures dont le dernier en date du 26 septembre 2019 sur le site de l'usine Lubrizol " démontrent que la question de la sûreté des sites SEVESO se pose pour l’ensemble du territoire français. Alors que l’ensemble de ces événements témoignent des failles inhérentes à notre système de contrôle des sites industriels présentant un grave danger pour l’environnement et la sécurité de la population, nous pensons que l’amélioration constante des techniques d’ingénierie permet de maîtriser l’ensemble des risques industriels, au point de nous faire croire parfois à l’idéal mais irréaliste « risque zéro ». "
" Pourtant, le grave incendie de Lubrizol est venu nous rappeler à quel point les sites classés SEVESO sont dangereux et doivent faire l’objet d’une vigilance de chaque instant de la part des pouvoirs publics. La France ne compte pas moins de 1 312 sites de cette nature et, de la conception au stockage, les produits chimiques qui y sont utilisés peuvent s’avérer particulièrement toxiques et nocifs pour la santé. "
" Force est de constater que les sites industriels français et plus particulièrement les sites classés SEVESO vieillissent, nécessitant une surveillance spécifique et des contrôles réguliers pour assurer à nos concitoyens sécurité, confiance et sérénité. C’est dans cet esprit que cette proposition de loi propose la création d’une autorité de sûreté des sites SEVESO qui permettra au législateur de répondre à la demande très forte de transparence de nos compatriotes. "
" Après chaque catastrophe, est faite la promesse à nos concitoyens de mieux les protéger en renforçant la sécurité et la sûreté des sites industriels. Plusieurs évolutions de notre cadre législatif sont allées dans ce sens et ont permis d’apporter certaines réponses ; ce fut notamment le cas avec la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages qui faisait suite au terrible accident d’AZF. Plus récemment, la partie réglementaire de la directive SEVESO 3 a été transposée en droit français au travers de deux décrets et de l’arrêté ministériel du 26 mai 2014. Certes, ces avancées législatives sont bien évidemment notables et contribuent à renforcer la surveillance des industries manipulant des substances chimiques dangereuses, mais les moyens institutionnels manquent pour assurer la surveillance de ces sites et leur sûreté. "
" À chaque catastrophe, nous nous focalisons sur la gestion de crise de tels événements. Au-delà des moyens de communication qu’il s’agit de moderniser à l’heure du numérique et des réseaux sociaux, c’est le contrôle des sites SEVESO qui pose question. Le Bureau d’analyse des risques et des pollutions industrielles (BARPI) qui dépend du ministère de la transition écologique et solidaire publiait le 10 septembre dernier un inventaire indiquant qu’entre 2016 et 2018 le nombre d’accidents industriels a augmenté de 34 %. Dans le même temps, les contrôles des sites classés sont passés de 29 000 contrôles à 19 000 entre 2009 et 2018. Cela démontre que lorsque l’État baisse la garde en matière de surveillance des industries les plus dangereuses, les conséquences peuvent être particulièrement graves pour la population et l’environnement. "
Aujourd’hui, le est assuré par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), qui doivent en parallèle assurer un grand nombre d’autres missions chronophages et mobilisant des moyens humains conséquents. Ainsi, en plus d’assurer la surveillance et l’inspection des installations classées, elles doivent aussi élaborer et mettre en œuvre les politiques de l’État concernant l’offre de logements, la rénovation urbaine et la lutte contre l’habitat indigne, tout en assurant la promotion de la participation citoyenne dans l’élaboration des projets relatifs à l’environnement et à l’aménagement du territoire. Au sein des DREAL, la sécurité des sites présentant un risque important pour l’environnement est noyée au milieu des autres missions et considérée au même titre que les installations classées à faible risque. Par exemple, les agents doivent contrôler les parcs éoliens pour lesquels il y a beaucoup de contentieux alors que ce ne sont pas les installations qui présentent le plus de risques. Cela engendre des rapports et des inspections supplémentaires, qui alourdissent le travail des inspecteurs. En plus de la procédure du « cas par cas » pour les études d’impact afférant aux dossiers de demande d’autorisation, les mêmes services sont chargés de surveiller et d’inspecter quelque 500 000 sites classés ICPE dont font partie les 1 362 sites classés SEVESO. La conséquence est simple : il y a de moins en moins d’inspections sur le terrain.
Il est proposé que les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), chargées du contrôle des sites SEVESO soient dotées " d’un budget propre et d’un pouvoir de sanction. Cela permettra de concentrer des moyens spécifiquement sur la question des sites SEVESO et de dégager, par la même occasion, du temps et des ressources au sein des DREAL. Son président serait nommé pour un mandat non reconductible et soumis à l’approbation des deux assemblées. Indépendante du gouvernement, avec des inspecteurs dédiés, elle rendrait public ses rapports et injonctions. Ses effectifs ne seraient pas soumis au plafond d’emplois. "
" À l’image de l’autorité de sûreté nucléaire, l’autorité de sûreté des sites SEVESO aura donc pour objectif de sanctuariser les moyens dédiés au contrôle et à la surveillance des sites industriels les plus sensibles, en toute indépendance, délestée des logiques économiques et d’emplois qui pèsent parfois sur les services préfectoraux et notamment sur les DREAL. Face à des industries exceptionnelles, de par leurs poids économiques et la dangerosité de leurs activités ".
La proposition de loi est organisée de la manière suivante :
" L’article premier définit la notion de sécurité des sites SEVESO en se basant sur trois notions.
D’abord, la sûreté industrielle touche l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations classées pour la protection de l’environnement.
La sécurité des sites SEVESO vise également les actions de sécurité civile en cas d’accident, la prévention et la lutte contre les actes de malveillance mais aussi la prévention des pollutions pouvant résulter de l’activité de ces installations.
Enfin, un site SEVESO est une installation classée pour la protection de l’environnement susceptibles de créer des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses telles que définies par l’article L. 515-32 du code de l’environnement
Les articles 2 à 4 permettent d’intégrer l’Autorité de sûreté des sites SEVESO dans la section 1 relative aux installations soumises à autorisation du chapitre II « installations soumises à autorisation, à enregistrement ou à déclaration » du livre V « Prévention des pollutions, des risques et des nuisances » du code de l’environnement.
L’article 5 précise l’articulation du pouvoir réglementaire entre les différentes autorités compétentes en matière de sûreté des sites SEVESO et la répartition des compétences avec le ministre en charge de la sûreté des sites SEVESO.
L’article 6 définit l’objet de l’Autorité de sûreté des sites SEVESO, son champ de compétences, ses prérogatives ainsi que l’étendue de ses missions.
Les articles 7 et 8 précisent les règles relatives aux avis rendus par l’Autorité de sûreté des sites SEVESO ainsi que leur régime de publicité.
L’article 9 prévoit la publication annuelle d’un rapport d’activité de l’Autorité de sûreté des sites SEVESO et la possibilité pour le Parlement de demander au président de cette autorité indépendante de lui rendre compte de ses activités.
L’article 11 donne la possibilité aux commissions compétentes du parlement et à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques de demander à l’autorité de sûreté des sites SEVESO des avis ou des études sur les questions relevant de sa compétence.
Les articles 12 à 15 sont relatifs au mode de gouvernance de l’Autorité de sûreté des sites SEVESO et à la séparation entre le collège et la commission des sanctions. Sont précisés la durée, les conditions d’exercice et de rupture des mandats ainsi que le mode de délibération et les délégations de pouvoir au sein de l’organe collégial.
Les articles 16 à 19 prévoient les moyens juridiques, financiers et matériels dont dispose l’Autorité de sûreté des sites SEVESO pour accomplir ses missions. "
M. Joël Guerriau. Monsieur le ministre, que devons-nous faire lorsqu'une sirène d'urgence se déclenche dans nos rues ? En 2013, cette question a été posée aux Français : 78 % d'entre eux ne le savaient pas.
Or, le 26 septembre dernier, une alarme se déclenchait à Rouen et dans onze communes limitrophes à la suite de l'incendie de l'usine Lubrizol, que nous connaissons bien. Deux mois plus tard, c'est à Nice et à Cannes qu'une alarme s'est déclenchée, sans que nul sache quoi faire.
Une directive européenne définit la modernisation de nos systèmes d'alarme comme un objectif pour juin 2022.
Les technologies sont nombreuses en la matière. Le SMS géolocalisé permet notamment de toucher des personnes concernées dans des zones à risques, sur un périmètre prédéfini, en les alertant individuellement, non seulement sur le phénomène qui vient de se produire et dont elles doivent se préserver, mais également sur les mesures à prendre. C'est une excellente chose.
Nos voisins belges ont pris l'initiative de mettre en place un système intelligent, qui permet de répondre à cette exigence et qui fonctionne réellement. Ce système permet de savoir très exactement combien de personnes ont été informées, combien doivent l'être encore et de les relancer si besoin.
Demain, que ferions-nous en cas d'attaques terroristes, monsieur le ministre ? Quelles sont vos intentions pour moderniser notre réseau d'alerte nationale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants et sur des travées des groupes RDSE et LaREM.)
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Joël Guerriau, vous posez une question extrêmement importante, qui est celle des systèmes d'alerte dans notre pays.
Comme vous le savez, il existe actuellement plusieurs modes d'alerte.
Près de 2 000 sirènes sont déployées sur l'ensemble du territoire – il y en aura 2 500 à compter de 2021. D'autres modes d'alerte utilisent les réseaux sociaux et les voies médiatiques, radio et télévision. Nous utilisons plusieurs canaux, de manière à pouvoir toucher le plus grand nombre de populations, ce qui nous permet de rester réactifs en cas de défaillance.
Effectivement, la directive européenne sur les communications électroniques que vous évoquez prévoit, à l'article 110, la possibilité de développer des alertes par SMS. Pour faire simple, il s'agit de SMS ciblés en fonction des zones de danger, afin de pouvoir contacter les bonnes populations.
Nous travaillons bien évidemment à la transposition de cette directive. Au début de l'année 2020, nous pourrons donner de premières orientations sur le déploiement de ce nouveau mode d'alerte par message électronique. Les pouvoirs publics pourront s'adresser aux opérateurs de téléphonie mobile pour diffuser ces messages.
Mais le plus important, comme vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, est la conduite à tenir en cas d'alerte. Il est désormais démontré que le système d'alerte n'est pas suffisant pour déterminer cette conduite en amont : il faut en passer par des actions de sensibilisation et d'information en direction de nos citoyens, qui doivent connaître la conduite à tenir en fonction de l'endroit où ils se trouvent et de la nature du danger, qui peut être naturel ou technologique. Nous y travaillons. Les récentes catastrophes naturelles ont montré que nous devions faire plus et mieux.
Bien évidemment, dans le cadre des travaux que nous avons engagés sur le déploiement du nouveau système d'alerte, nous travaillerons sur ces actions de sensibilisation et d'information et, surtout, j'y insiste, sur les exercices à conduire, qui sont absolument fondamentaux et auxquels s'attachent l'ensemble des préfets de ce pays. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur des travées du groupe RDSE.)
M. Stéphane Testé attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'augmentation inquiétante des attaques visant les sapeurs-pompiers en intervention. Selon les chiffres du ministère de l'intérieur il y a eu, pour l'année 2017, 2 813 agressions de sapeurs-pompiers déclarées, soit 23 % de plus qu'en 2016. Il lui rappelle que, depuis le 1er janvier 2019, les statistiques de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) indiquent une nouvelle hausse de ces agressions. Pour répondre à cette situation d'urgence, le ministère de l'intérieur a annoncé au mois de juillet 2019 un plan issu de concertations avec les préfectures et les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), qui comprend notamment l'expérimentation de caméras piétons pour les sapeurs-pompiers, lors de leurs interventions. Il lui demande si ce plan d'actions sera suivi d'autres mesures gouvernementales afin d'endiguer la hausse inquiétante des violences à l'égard des sapeurs-pompiers.
Les sapeurs-pompiers, professionnels et volontaires, sont victimes d'agressions en intervention, en majorité des coups et blessures volontaires, de menaces et d'outrages lors des missions de secours à personne, à la suite de différends familiaux, de conflits de voisinage ou d'accidents de la circulation, souvent en raison d'un état alcoolique, de souffrance ou de détresse psychologiques. En ciblant les sapeurs-pompiers, qui font vivre au quotidien les valeurs et les principes républicains fondés sur la solidarité et l'entraide, c'est la République que l'on atteint. C'est donc à la République de répondre fermement et de défendre ceux qui exposent chaque jour leur vie pour sauver celle des autres. Cette situation est insupportable. Dans ce contexte, le ministère de l'intérieur poursuit une lutte déterminée contre ces agressions qui visent les femmes et les hommes qui garantissent, chaque jour et sur l'ensemble du territoire, la continuité opérationnelle du service public de protection et de secours à la population. Trois principales mesures sont d'ores et déjà déployées. L'expérimentation du port des caméras mobiles étendue aux sapeurs-pompiers, par l'adoption de la loi n° 2018-697 du 3 août 2018 relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique et le décret n° 2019-743 du 17 juillet 2019 relatif aux conditions de l'expérimentation de l'usage de caméras individuelles par les sapeurs-pompiers dans le cadre de leurs interventions. Dix services d'incendie et de secours ainsi que la brigade de sapeurs-pompiers de Paris sont engagés dans cette expérimentation qui est entrée dans sa phase concrète. Elément autant dissuasif que de preuves, ce dispositif contribuera à améliorer la sécurité des sapeurs-pompiers. La loi précise enfin que « l'enregistrement n'est pas permanent et ne peut être déclenché dans les cas où il est susceptible de porter atteinte au secret médical ». C'est un point sur lequel le Gouvernement a particulièrement été attentif lors des débats sur la proposition de loi. Le respect de la vie privée et du secret médical des personnes chez lesquelles les sapeurs-pompiers sont amenés à intervenir est en effet un point majeur. Le renforcement des protocoles opérationnels permet, dans chaque département : - une meilleure coordination entre policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers, par l'élaboration de procédures spécifiques pour l'intervention dans les secteurs urbains sensibles (points de regroupement, itinéraires sécurisés et règles d'engagement adaptées, avec notamment l'appui de la police ou de la gendarmerie lorsque la situation l'exige) ; - un système d'évaluation régulière et partagée pour les secteurs où la fréquence des agressions ou de faits de violence urbaine est élevée ; - les mesures relatives au dépôt de plainte sont facilitées ; - une formation des sapeurs-pompiers à la négociation et aux techniques de défense simple (évitement, esquive, dégagement) face à une personne agressive. Désormais, tous les départements disposent d'un protocole opérationnel renouvelé et renforcé. Une réponse pénale ferme et une coopération continue entre les ministères de la justice et de l'intérieur. Face à ces actes d'agressions, la réponse pénale doit également être exemplaire et les sanctions à la hauteur de la gravité des actes. Tous les moyens d'enquête nécessaires sont donc déployés pour poursuivre les auteurs de telles agressions. La France a renforcé son cadre juridique en adoptant, notamment, la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique qui aggrave les sanctions pénales à l'encontre des auteurs de violences contre les sapeurs-pompiers. L'article 433-3 du code pénal prévoit ainsi qu'est « punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférée à l'encontre […] d'un sapeur-pompier professionnel ou volontaire », chargé d'une mission de service public. Les articles 322-6 et 322-8 du même code exposent enfin l'auteur d'une « destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant aux sapeurs-pompiers par l'effet d'une substance explosive ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes », à une peine de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende.
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Audrey MOREL SENATORE - Responsable du CERISC de l'ENSOSPou Alexia TOUACHE, élève-avocate, alexia.touache@ensosp.fr, +33 (0)4 42 39 05 78
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