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Trois nouveaux décrets sont apparus dont un retiendra tout particulièrement votre attention, le décret d'application du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires.
Deux chroniques sont également présentées : un article rédigé par Maxime GHIGLINO dans lequel il apporte un éclairage sur les difficultés juridiques entourant la gratuité des péages d'autoroutes pour les véhicules de secours, et l'habituelle chronique jurisprudentielle dédiée cette fois-ci au thème des installations classées.
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Le décret vise à réduire la vulnérabilité des biens d'habitations ou mixte face aux inondations en augmentant la participation du fonds de prévention des risques naturels majeurs de 40 % à 80 %.
Le décret précise les conditions dans lesquelles, dans la fonction publique, l'autorité compétente peut édicter des lignes directrices de gestion définissant la stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines, les orientations générales en matière de promotion et de valorisation des parcours professionnels et, pour la fonction publique de l’État, les orientations générales en matière de mobilité. En outre pour la fonction publique de l’État, il définit les conditions dans lesquelles les administrations peuvent définir des durées minimales ou maximales d'occupation de certains emplois. Le décret supprime la référence à la consultation des commissions administratives paritaires en matière de mobilité, de promotion et d'avancement au sein des textes réglementaires applicables. Il précise les conditions dans lesquelles les agents peuvent faire appel à un représentant syndical dans le cadre d'un recours administratif formé contre les décisions individuelles en matière de mobilité, de promotion et d'avancement.
Depuis quelques semaines, les parlementaires sont montés au front. Les presses locales et nationales enchainent les articles. Les questions au gouvernement se succèdent. Qu’en est-il du décret d’application de la loi exemptant les véhicules de secours en intervention du paiement des péages ? Plus qu’une simple question rhétorique, cette situation est à l’origine tant d’une véritable situation d’incertitude juridique que d’une impatience grandissante des élus.
L’incertitude juridique tout d’abord résulte tant de l’incomplétude du texte que de la menace existante sur sa pérennité. Certes, l’absence de décret d’application bloque théoriquement l’entrée en vigueur du nouvel article L. 122-4-3 du Code de la voirie[1]. Toutefois, au-delà de cette période transitoire, c’est le texte lui-même qui est sur la sellette. Il est à craindre qu’il ne soit abrogé alors même qu’il n’a jamais été appliqué. Confrontés à cette éventualité, certains parlementaires ont exprimé leur mécontentement. Ils se sont révoltés contre le possible « abandon de cette excellente mesure »[2]. À l’heure de la prise de conscience de l’action des groupes de pression[3], il semble que l’issue de ce débat dépende une fois encore de l’influence du lobbying. Les concessionnaires d’autoroutes ne souhaitent pas perdre une manne financière si importante. Dès lors, l’abrogation de ce texte inappliqué et facteur d’incertitudes évoquera ce que Ripert qualifiait de figure symptomatique du déclin du droit[4].
L’impatience ensuite, des organes de la représentation nationale qui déplorent particulièrement le retard pris dans la publication du décret d’application[5] qui devait intervenir en avril 2018[6] et les conséquences économiques que ce retard engendre. Récemment, Madame la Députée de l’Aisne Aude Bono-Vandorme a par exemple regretté qu’il n’ait pas été publié avant la période estivale puisque celle-ci est malheureusement synonyme d’activités accrues des forces de secours[7]. Ce retard a été justifié par la nécessité d’adapter les contrats des sociétés concessionnaires afin de prévoir leur indemnisation à hauteur du manque à gagner[8]. En tout état de cause, il émerge une véritable confusion face à ce décret qui joue les arlésiennes. Beaucoup d’élus voient en lui un prédicateur de salut financier, d’où leur impatience. Pourtant, une étude approfondie de cette disposition met en évidence que ce texte ne sera pas à l’origine de la révolution attendue. Quelques précisions s’imposent.
Il convient d’emblée d’indiquer l’origine de cette disposition. Lors du vote de la loi de finances pour 2018, un groupe de députés conduit par Monsieur le Député Eric Ciotti a proposé un amendement visant à assurer la gratuité de circulation des véhicules d’intérêt général sur autoroute[9]. Cet amendement prévoyait la création de l’article L. 122‑4‑3 du Code de la voirie routière selon lequel : « les véhicules d’intérêt général prioritaires ne sont pas assujettis au péage mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 122‑4 ». Le second alinéa de ce texte précisait que « les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État ». Cet amendement a été adopté à l’unanimité. Toutefois, l’examen de l’article L. 222-4-3 du Code de la voirie routière tel que le texte a été codifié révèle une modification majeure. En effet, cet article prévoit désormais que : « les véhicules d’intérêt général prioritaires en opération (nous soulignons) ne sont pas assujettis au péage mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 122‑4 ». L’adjonction de la précision selon laquelle les véhicules doivent être « en opération » interpelle. Elle provient d’un sous-amendement[10] présenté par un groupe de députés conduit par M. le Député Fabien Matras en séance du 2 novembre 2017[11]. Or, ce sous-amendement n’est pas si anodin. A-t-il pour but de circonscrire le domaine de la gratuité ? Prive-t-il la nouvelle disposition de toute effectivité en présence de véhicules empruntant l’autoroute pour des raisons fonctionnelles et non opérationnelles ? Il est bien légitime de s’interroger sur les apports réels de ce texte d’autant que selon l’interprétation retenue, l’état du Droit antérieur ne sera pas substantiellement modifié. En somme, les députés ont-ils réellement ouvert la boîte de Pandore ? Rien n’est moins sûr.
Ces questionnements induisent des enjeux financiers considérables. Notre territoire national compte pas moins de dix-neuf contrats de concession d’autoroute exécutés par dix-huit sociétés. Autant d’espaces qui dérogent au principe de gratuité de l’utilisation du domaine public[12]. Dans ce contexte, la clarification des relations économiques entre les services de secours et les concessionnaires d’autoroutes est une nécessité. À cette fin, une distinction entre les rapports propres au contexte opérationnel et ceux intervenant dans un contexte fonctionnel s’impose. De cette dichotomie va se dégager toute l’ambivalence de la réforme. Son conservatisme désavoué (I) est le socle d’un progressisme incertain (II).
La règlementation financière des relations entre services de secours et sociétés concessionnaires d’autoroutes a fait l’objet de diverses interventions législatives. Le législateur s’est périodiquement penché sur cette question parfois même sous la pression de faits divers dramatiques[13]. Un point d’équilibre semblait donc atteint entre les divers intérêts en présence. Point d’équilibre sur lequel le nouveau texte n’aura pas d’incidence, du moins en partie. Le cadre juridique des interventions se déroulant sur l’autoroute demeure inchangé (A). L’obligation d’acquitter le péage lors des déplacements dans un cadre fonctionnel n’est pas modifiée non plus (B). En somme, les deux principaux aspects de la relation entre services de secours et concessionnaires d’autoroutes ont été conservés.
La problématique des relations entre services de secours et concession autoroutière est déjà ancienne. En 1999, le Premier ministre a chargé Monsieur le Député Jacques Fleury de rédiger un rapport sur les difficultés rencontrées par les SDIS pour mettre en œuvre la réforme des lois de 1996[14]. La rédaction de ce rapport a été l’occasion de se questionner sur les modalités de financement des SDIS. Son auteur a alors soulevé que les sociétés d’autoroute, entreprises privées, génèrent un risque important sans pour autant disposer de services de sécurité dédiés. Dès lors, « il est anormal qu’elles ne participent pas au financement des services d’incendie et de secours »[15]. Fort de ce constat, ce rapport a préconisé la modification de l’article L. 1424-42 du Code général des collectivités territoriales. Dans sa rédaction initiale, ce texte ne fixait que les grands principes relatifs aux missions dédiées aux services départementaux d’incendie et de secours. Selon ce texte, le service départemental d’incendie et de secours n’est tenu de procéder qu’aux seules interventions qui se rattachent directement à ses missions de service public définies à l’article L. 1424-2 de ce Code[16]. S’il procède à des interventions ne se rattachant pas directement à l’exercice de ses missions, il peut demander aux personnes bénéficiaires une participation aux frais, dans les conditions déterminées par délibération du conseil d’administration. Ce texte lacunaire a par la suite été précisé par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Cette loi a créé divers alinéas et plus particulièrement les alinéas 5 et 6 selon lesquels les interventions effectuées par les services d’incendie et de secours sur le réseau routier et autoroutier concédé doivent faire l’objet d’une prise en charge par les sociétés concessionnaires d’ouvrages routiers ou autoroutiers[17]. Il a également prévu que les conditions de cette prise en charge sont déterminées par une convention entre les services départementaux d’incendie et de secours et les sociétés concessionnaires d’ouvrages routiers et autoroutiers, selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l’Intérieur et du ministre chargé des finances. C’est l’arrêté du 16 juillet 2004 qui a fixé le modèle type de cette convention[18]. Ce texte a deux vertus. Il fixe d’une part les lignes directrices de ce type de convention, mais il laisse d’autre part une marge de négociation suffisante aux SDIS pour l’adapter. Il appartient donc à ces structures de préciser plus spécifiquement les termes des relations conventionnelles qu’ils entretiennent avec les concessionnaires d’autoroutes. De facto, l’application de ce nouveau dispositif ne s’est pas faite sans heurts. Elle est notamment à l’origine de la salve d’arrêts intervenus entre 2008 et 2010[19]. Dans ces affaires, les sociétés d’autoroute avaient recherché le remboursement auprès des compagnies d’assurance des automobilistes sinistrés des frais qu’elles avaient pu engager en faisant intervenir des secours sur leurs tronçons. Ces recours n’ont toutefois pas prospéré. La Cour de cassation a rappelé que les secours sont gratuits[20] et qu’en faisant supporter leur charge à l’assureur, on met indirectement ce coût financier sur l’assuré puisque l’assureur n’est que subrogé dans les droits de son client. En réaction, les sociétés d’autoroute ont soulevé une question prioritaire de constitutionnalité afin de voir déclarer inconstitutionnelle l’impossibilité de demander le remboursement des frais d’intervention payés au SDIS[21]. La Cour régulatrice a également rejeté cette demande. Opérant sa fonction de filtre, elle a refusé de renvoyer la question au Conseil constitutionnel[22].
Au bilan, le nouveau texte n’a pas véritablement d’incidence sur les relations entre les SDIS et les sociétés concessionnaires en matière d’intervention sur autoroute. Ces relations sont déjà encadrées par des conventions spécifiques et le nouveau dispositif n’a pas vocation à les modifier. Un second domaine n’est pas atteint par ce dispositif, celui des déplacements sur autoroute dans un cadre fonctionnel.
Si l’amendement initialement proposé lors de l’adoption de la loi de finances pour 2018 avait le mérite de l’ambition, celle-ci s’est évanouie dans le débat parlementaire qui a suivi. En effet, l’exposé sommaire des motifs[23] de l’amendement initial trahissait clairement une volonté de généraliser la gratuité des péages pour les secours. Selon les auteurs de ce texte, il est nécessaire « d’imposer à tous les concessionnaires autoroutiers la gratuité pour l’ensemble des déplacements des véhicules de secours sur l’intégralité des autoroutes du territoire français ». Il en ressort un principe général à la simplicité déconcertante, tous les véhicules de secours ne sont pas tenus de s’acquitter des frais de péage en tout lieu et en tout temps. L’adoption de ce principe aurait donc permis une exonération totale des frais de péage aux véhicules de secours qu’ils empruntent l’autoroute dans un cadre fonctionnel ou qu’ils le fassent dans un cadre opérationnel. Pourtant, cette solution n’est pas celle que laisse entendre la lecture du nouvel article L. 222-4-3 du Code de la voirie. Ce nouveau texte n’a pas permis d’obtenir le résultat escompté.
En effet, l’intervention d’un sous-amendement a ruiné les ambitions premières de ce dispositif. L’exposé des motifs de ce sous-amendement révèle l’objectif poursuivi par cette intervention postérieure des parlementaires. Or, cet exposé qui se compose de trois subdivisions est l’exemple topique d’un paralogisme[24]. Une analyse plus développée s’impose.
A titre liminaire, l’exposé précise que « conformément à l’article L. 1424-42 du Code général des collectivités territoriales, il existe un principe de gratuité pour les interventions effectuées par les services d’incendie et de secours sur le réseau routier et autoroutier concédé ». D’emblée, précisons que cette acception est au mieux confuse, au pire fausse. Confuse, car si on l’envisage du point de vue de la victime d’un accident, on ne comprend pas pourquoi il est question de la gratuité des secours uniquement sur le secteur concédé et non sur tout le réseau routier[25]. Fausse, car si on l’envisage du point de vue de la société d’autoroute, les interventions des services d’incendie et de secours sont précisément payantes en application de l’alinéa 6 de ce même texte[26]. Il semble par conséquent qu’il est question ici de la gratuité des frais de péage pour les services d’incendie et de secours lors des interventions sur autoroute. Cet exposé élève donc cette gratuité en principe, ce qui n’est absolument pas le cas[27]. La gratuité des péages lors d’intervention sur les voies concédées ne repose que sur un mécanisme conventionnel et non sur un quelconque principe qui innerverait cette matière.
Cette précision apportée, l’exposé des motifs poursuit en affirmant qu’« en revanche, cette prise en charge n’est pas systématiquement assurée lorsque les services départementaux d’incendie et de secours empruntent l’autoroute pour tous les autres déplacements : intervention pour un évènement ne s’étant pas produit sur le réseau autoroutier et déplacements fonctionnels ». Or, cette affirmation n’est que partiellement exacte. L’emploi de l’adverbe « systématiquement » laisse présumer que c’est parfois le cas. On perçoit pourtant mal comment les « autres déplacements » c’est-à-dire les transits opérationnels par l’autoroute et les déplacements fonctionnels ne seraient pas supportés par les services départementaux d’incendie et de secours. À moins que les concessionnaires ne se privent volontairement de cette manne, la logique des textes est celle de l’onérosité. D’ailleurs, c’est précisément ce que l’amendement initial se proposait de corriger.
L’exposé des motifs du sous-amendement poursuit en affirmant que le nouveau texte entend « imposer la gratuité pour l’ensemble des déplacements, qu’ils soient opérationnels ou fonctionnels ». Il conclut alors en soutenant qu’il se propose également « d’imposer à tous les concessionnaires la gratuité pour l’ensemble des déplacements opérationnels des véhicules de Sapeurs-pompiers, de Police, de Gendarmerie, de SAMU et sur l’intégralité des autoroutes du territoire français, que ces déplacements soient directement liés à une opération de secours (…) ou indirects (…) ». Pourtant, en apportant la précision selon laquelle les véhicules doivent être « en opération » pour être exonérés, le sous-amendement ne fait que ruiner l’objectif initialement poursuivi. En effet, cette précision inverse le champ du principe et celui de l’exception[28]. Il restreint le domaine de l’exception qu’est la gratuité en la limitant au cadre opérationnel. À l’inverse, il confirme que le principe demeure le paiement du péage dans toutes les autres situations. Ainsi, une situation non envisagée par l’exception relèvera du principe et par conséquent du domaine du paiement[29]. De plus, l’exception ne prévoyant pas les déplacements fonctionnels, ces derniers demeurent soumis à l’obligation de paiement. En conséquence, le sous-amendement a privé la réforme de sa portée première.
D’ailleurs, au-delà de cette question particulière, c’est l’adoption du sous-amendement qui pose de sérieuses questions. Certes, au sein du débat parlementaire, le droit d’amendement est essentiel[30]. Il doit pouvoir être exercé le plus largement possible dans les conditions prévues par la Constitution[31]. Il assure le bon déroulement du débat démocratique et le bon fonctionnement des pouvoirs publics[32]. En accord avec ces principes, les règlements des assemblées permettent un exercice réel de ce droit et du droit de sous-amendement qui en est indissociable. Cependant, les rapports existant entre amendements et sous-amendements ne sont pas neutres. Un sous-amendement peut considérablement modifier la portée de l’amendement initial. Les règlements des assemblées prévoient donc que les sous-amendements ne doivent pas avoir pour effet de contredire le sens des amendements auxquels ils s’appliquent[33]. Dans notre hypothèse, bien que l’adoption du sous-amendement a permis d’annihiler quasiment tous les effets de l’amendement initial, il ne le contredit pas. Sans doute, sommes-nous en présence d’un cas limite. Il n’en demeure pas moins que tant que la loi n’est pas définitivement adoptée, gare aux sous-amendements[34].
La création du nouvel article L. 222-4-3 du Code de la voirie n’est pas véritablement à l’origine d’une évolution majeure de notre état de droit. La première approche de ce texte a permis de le démontrer. Malgré ce constat, ce dispositif n’est pas dénué de tout effet. Il se propose d’exonérer les secours de péage lorsque l’opération nécessite un transit par l’autoroute, ce qui est incontestablement une avancée (A). Du reste, il ne faut pas se laisser aveugler par l’apparente pertinence de cette mesure. Comme toute réforme, son opportunité doit être discutée (B).
L’article L. 222-4-3 du Code de la voirie n’intéresse finalement qu’une situation particulière, celle des cas de transit par l’autoroute de véhicules en opération. L’enjeu de ce dispositif n’est donc plus celui qu’il se proposait d’accomplir d’emblée. Plus encore, il induit de nouvelles interrogations.
Tout d’abord, c’est l’incidence du retard dans l’adoption du décret qui questionne. Les mois passent et le texte issu de la loi de finances pour 2018 reste inapplicable. Dans des situations similaires, la doctrine a déjà eu l’occasion de dénoncer ce qu’elle qualifie de « véto suspensif à l’entrée en vigueur des lois »[35]. Il s’agit de cas dans lesquels l’administration tarde à adopter un décret d’application, paralysant ainsi l’entrée en vigueur de la loi[36]. Ces situations bien que dommageables à l’égard de tout justiciable comme à l’égard de l’ordre juridique in se ne peuvent guère aboutir qu’à la mise en cause de l’État dans le cadre d’une action en responsabilité. Cette action atypique implique que l’administration ait commis une faute[37]. En conséquence, elle ne peut prospérer qu’à la condition que l’administration n’ait pas de pouvoir discrétionnaire en la matière[38] et que le délai écoulé depuis la promulgation du texte soit déraisonnable[39]. De plus, si les circonstances le justifient, il est possible d’exiger l’adoption du décret[40], le cas échéant en utilisant une injonction assortie d’un délai et sous peine d’astreinte[41]. Certes, en l’espèce, cette alternative doit être écartée. En opportunité, il est difficilement envisageable que les secours, acteurs du service public, engagent une action contre d’administration sur ce fondement.
Ensuite, ce sont les raisons du retard dans l’adoption du décret qui doivent être appréhendées. Sur ce point, les débats ont mis en lumière que sa publication avait été retardée en raison de la nécessité de modifier les contrats des sociétés concessionnaires[42]. Il semble que ces contrats prévoient l’indemnisation de ces sociétés à hauteur du manque à gagner résultant de l’entrée en vigueur du nouveau texte. Pourtant, l’examen plus approfondi des différents contrats de concession a mis en évidence qu’aucun d’entre eux ne prévoit ce type de clause. À plus forte raison, les dix-neuf contrats de concession contiennent des clauses imposant aux sociétés de se conformer aux obligations nouvelles concernant les services publics[43]. Bien que ces clauses connaissent des formulations quelque peu divergentes selon le contrat considéré, elles prévoient toutes, en substance, que les sociétés concessionnaires sont tenues de se conformer aux lois et règlements existants, ou à intervenir, notamment en ce qui concerne le libre exercice des services de police, de lutte contre l’incendie, de sécurité, de la protection civile, de santé, de la défense nationale. Dès lors, on ne comprend pas pourquoi ces stipulations n’ont pas vocation à s’appliquer, d’autant que leur mise en œuvre exclut toute modification des contrats de concession autoroutière. Du reste, on ne peut que saluer la prévoyance des rédacteurs de ces contrats qui avaient fait œuvre de prévision en anticipant les potentielles interventions législatives à venir.
D’ailleurs, l’étude des différentes conventions de concession autoroutière a mis en lumière que quelques-unes d’entre elles contiennent des clauses d’imprévision[44]. En effet, au sein de certains de ces contrats apparaissent des stipulations selon lesquelles : « au cas où une modification de la concession, du fait du concédant ou en accord avec lui (…) serait de nature à significativement améliorer ou dégrader l’équilibre économique et financier de la concession, les parties arrêtent, dans les meilleurs délais, les mesures, notamment tarifaires, à prendre en vue de permettre la continuité du service public dans des conditions financières sensiblement équivalentes »[45]. Sans entrer dans le détail de cet argumentaire, il semble que ces clauses peuvent facilement être évincées dans la mesure où la part des péages acquittés par les secours ne représente qu’une infime fraction du revenu des sociétés concessionnaires. Ces dernières ne pourront donc arguer d’un déséquilibre significatif justifiant une renégociation tarifaire du contrat en raison de la privation de ce faible revenu. De ce fait, tout recours à la théorie de l’imprévision doit d’emblée être écarté.
Enfin se pose la question de l’intérêt de ce décret d’application ? S’il paraissait indispensable à la mise en œuvre du premier amendement, le sous-amendement a sérieusement limité son intérêt. Considérant que les notions de « véhicule d’intérêt général prioritaire »[46] et celle « d’opération »[47] sont déjà partiellement définies, que peut encore définir le pouvoir réglementaire ? Seule l’adoption du décret permettra de répondre à cette interrogation. D’ailleurs, cette nouvelle délimitation du champ d’application du texte permettra subséquemment d’en appréhender l’opportunité.
En définitive, doit-on percevoir dans l’adoption cette mesure, une véritable réforme ? Certes, l’idée que les secours paient le péage est a priori choquante. Au sein de l’opinion générale, la gratuité d’accès des secours aux voies concédées relève du bon sens. Ce constat est généralement associé à une autre problématique, celle de la perte de temps qu’implique le franchissement des barrières. La fluidité de l’action des secours étant essentielle, une réflexion a été proposée sur les moyens de garantir un passage rapide aux barrières de péage[48]. Toutefois, Passage rapide ne signifie pas passage gratuit.
Pour autant, est-il si déraisonnable que les secours et notamment les SDIS aient à s’acquitter de frais lorsqu’ils transitent par ces voies ? Les péages ne sont-ils pas simplement la contrepartie d’un service rendu[49] ? Toute réponse manichéenne est à exclure. En effet, lorsque les SDIS sont exonérés de péage, le coût que représente l’utilisation de l’infrastructure est mécaniquement reporté sur les usagers eux-mêmes. Envisageant cette réalité, d’aucuns y ont perçu l’existence d’un impôt indirect contraire aux principes gouvernant le financement des missions régaliennes de l’État[50]. Vu sous cet angle, il n’est pas déraisonnable de penser que cette mesure ne fait plus l’unanimité. Il semble même que son caractère démagogique se fait jour.
Partant, une voie médiane ne doit-elle pas être préférée ? Soutenir le contraire serait irrationnel. Entre gratuité et onérosité, une ligne peut être tracée. Cette ligne, tout à la fois équitable et éthique, tendrait à définir le coût réel de la dépréciation de la structure routière lors de son usage par les services de secours. Ce faisant, il serait opportun de fixer le montant réel de cette usure et d’en déduire un tarif minoré correspondant uniquement à cette dépréciation. La mission particulière des services de secours justifierait alors qu’on leur applique ce tarif. Il serait possible d’une part d’éviter de faire supporter le cout de la dépréciation de la structure aux usagers, mais cela permettrait également d’éviter que des investisseurs privés se rémunèrent indirectement sur des fonds publics. La neutralité serait alors la principale vertu de cette opération et le remède à bien des maux.
[1] Art. 1er C. civ. : « Les lois et, lorsqu’ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu’ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l’entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l’exécution nécessite des mesures d’application est reportée à la date d’entrée en vigueur de ces mesures ». V. déjà pour une consécration jurisprudentielle de cette règle : Soc. 22 mars 1989, Bull. civ. V, n° 242.
[2] Question n°11210 de M. le Député Stéphane Testé (La République en marche – Seine-Saint-Denis), JORF du 24 juillet 2018, p. 6605.
[3] V. not. J.-L. Nadal, Renouer avec la confiance publique, Rapport au Président de la République sur l’exemplarité des responsables publics, La documentation française, 2015.
[4] G. Ripert, Le déclin du droit, L.G.D.J., 1959.
[5] V. not. Question n°11209 de M. le Député François Cornut-Gentille (Les Républicains – Haute-Marne), JORF du 24 juill. 2018, p. 6561 ; Question n°12506 de M. le Député Jean-Louis Thiériot (Les Républicains – Seine-et-Marne), JORF du 25 sept. 2018, p. 8420 ; Question n°13188 de M. le Député Grégory Besson-Moreau (La République en Marche – Aude), JORF du 9 oct. 2018, p. 8978 ; Question n°12900 de M. le Député Marc Le Fur (Les Républicains – Côtes d’Armor), JORF du 2 oct. 2018, p. 8692 ; Question n°12893 de M. le Député Xavier Breton (Les Républicains – Ain), JORF du 2 oct. 2018, p. 8622.
[6] Cf. Echéancier de mise en application de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018
[7] Question n°11690 de Mme. la Député Aude Bono-Vandorme (La République en Marche – Aisne), JORF du 07 août 2018, p. 7065.
[8] V. spéc. la question n°12103 de M. le Député Fabien Matras (La République en marche – Var), JORF du 11 sept. 2018, p. 7949.
[9] Amendement n° II-284 du Projet de loi de finances pour 2018, adopté le 27 octobre 2017.
[10] Règlement du Sénat, art. 48 : « 1. Le Gouvernement et les sénateurs ont le droit de présenter des amendements et des sous-amendements aux textes soumis à discussion devant le Sénat ou faisant l’objet d’une procédure de vote sans débat » ; Règlement de l’Assemblée nationale, art. 98 : « 1. Le Gouvernement, les commissions saisies au fond, les commissions saisies pour avis et les députés ont le droit de présenter des amendements aux textes déposés sur le bureau de l’Assemblée ainsi qu’aux textes adoptés par les commissions ».
[11] Amendement n° II-584 du Projet de loi de finances pour 2018, adopté le 2 novembre 2017.
[12] Le principe de gratuité du domaine public n’a pas valeur constitutionnelle d’où l’existence de dérogations : Cons. constit. 79-107 DC, 12 juillet 1979, Loi sur les ponts à péage ; L. Favoreu, Recueil de jurisprudence constitutionnelle, 1959-1993, p. 73 ; 284 du Projet de loi de finances pour 2018, adopté le 27 octobre 2017.
[12] Amendement n° II-584 du RDP 1979. 1691.
[13] On songe par exemple à cette automobiliste accidentée sur l’autoroute le 29 avril 1988 et qui est décédée en raison du retard des secours. L’ambulance de l’hôpital de la Seyne-sur-Mer appelé à intervenir sur son intervention et portant le sigle SMUR est restée bloqué près de dix minutes à la barrière de péage de l’autoroute Estérel-Côté d’Azur parce que personne à bord du véhicule ne disposait d’une pièce de 5 francs pour acquitter le montant du péage : V. Question n° 01098 de M. le Député Etienne Dailly (G.D. – Seine-et-Marne), JORF du 28 juillet 1988, p. 859 ; Réponse du Ministre de l’Equipement au JORF du 06 octobre 1988, p. 1111.
[14] J. Fleury, « Rapport de M. le Député Jacques Fleury : Bilan de la mise en œuvre de la réforme engagée en 1996 », n° 2455, La documentation française, 2000.
[15] Ibid., p. 19 : « Les sociétés concessionnaires d’autoroute ».
[16] Ces missions sont celles définies à l’article L. 1424-2 du CGCT, à savoir la prévention et l’évaluation des risques de sécurité civile, la préparation des mesures de sauvegarde et l’organisation des moyens de secours, la protection des personnes, des biens et de l’environnement. L’article L. 1424-2 du CGCT prévoit également en son 4° : « Les secours d’urgence aux personnes victimes d’accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation ».
[17] Art. L. 1424-42 al. 5 et al. 6 du CGCT : « Les interventions effectuées par les services d’incendie et de secours sur le réseau routier et autoroutier concédé, y compris sur les parties annexes et les installations annexes, font l’objet d’une prise en charge par les sociétés concessionnaires d’ouvrages routiers ou autoroutiers.
Les conditions de cette prise en charge sont déterminées par une convention entre les services départementaux d’incendie et de secours et les sociétés concessionnaires d’ouvrages routiers et autoroutiers, selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé des finances ».
[18] Arrêté du 7 juillet 2004 pris en application des trois derniers alinéas de l’article L. 1424-42 du Code général des collectivités territoriales.
[19] Civ. 2ème, 13 nov. 2008, n° 07-17.056 ; D. 2008. 2936 ; D. 2009. 771, obs. C. Nicolétis ; RTD civ. 2009. 324, obs. P. Jourdain ; Civ. 2ème, 13 nov. 2008, n° 07-20.391 ; Civ. 2ème, 13 nov. 2008, n° 07-19.088 ; Civ. 2ème, 22 janv. 2009, n° 08-11.262 ; Civ. 2ème, 17 déc. 2009, n° 09-10.614.
[20] Les secours sont gratuits en ce qu’ils seraient une émanation de la police administrative : V. spéc. X. Prétot et C. Zacharie, La police administrative, Systèmes, L.G.D.J., 2018, p. 73 et s.
[21] Décision QPC, Civ. 2ème, 21 oct. 2010, n° 10-15.126 ; AJDA 2010. 2446.
[22] Selon la Cour de cassation : « l’exclusion par l’article L. 1424-42, alinéas 6 et 7 [ancien], du Code général des collectivités territoriales, de la possibilité, pour les sociétés concessionnaires d’ouvrages routiers autoroutiers, d’engager une action à l’encontre de l’assureur d’un véhicule impliqué dans un accident de la circulation, en remboursement des frais d’intervention effectués par les SDIS sur le réseau autoroutier, répond à un motif d’intérêt général en assurant l’égalité des usagers sur l’ensemble du réseau routier et autoroutier et ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits de ces sociétés », Ibidem.
[23] Rappelons que la motivation est une exigence de recevabilité : Règlement du Sénat, art. 48 : « 2. Les amendements ou sous-amendement doivent être sommairement motivés » ; Règlement de l’Assemblée nationale, art. 98 : « 3. Les amendements doivent être sommairement motivés ».
[24] Quelques exégètes avertis pourraient y voir un sophisme mais le débat n’est pas là.
[25] Initialement conceptualisé par le professeur Rolland, le principe de gratuité s’applique en présence d’un service public obligatoire et ayant un caractère administratif : Roland, réf. Ce principe s’applique pour les activités dévolues au services d’incendie et de secours selon l’article L. 1424-2 CGCT ; X. Pretot et J. Marion, La sécurité civile en temps de paix et de droit, à l’usage des sapeurs-pompiers, élus, fonctionnaires et techniciens de la sécurité, éd. Néret, 1986, V. spéc. p. 68 et s. et p. 92 et s. ; M. Genovese, Droit appliqué au service d’incendie et de secours, France Sélection, 8ème éd. 2018, p. 100 et s.
[26] Art. 1424-42 CGCT, al. 6 : « Les conditions de cette prise en charge sont déterminées par une convention entre les services départementaux d’incendie et de secours et les sociétés concessionnaires d’ouvrages routiers et autoroutiers, selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé des finances. »
[27] Sur la notion de principe V. not. P. Roubier, Droits subjectifs et situations juridiques, th. Paris, Dalloz, 1963 ; P. Morvan, Le principe de droit privé, th. Panthéon-Assas, 1999.
[28] J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, Méthodes du droit, 5ème ed. Dalloz, 2012, n° 185 et s., p. 242 et s.
[29] Il s’agit de l’application d’un principe de catégorisation : « Parmi les deux catégories antithétiques correspondant à une distinction, il faut qu’il y en ait une au moins qui soit assez ouverte pour pouvoir accueillir de nouvelles de nouvelles entités ou de nouvelles notions : il faut que, dans chaque classification, si l’une des catégories est limitative, l’autre soit résiduelle » : J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, op. cit, n° 186, p. 243.
[30] Ce droit est reconnu par la Constitution : Const. 4 oct. 1958, art. 45.
[31] Cons. const. 30 mars 2006, n° 2006-535 DC § 6 ; Égalité des chances, JORF 31 mars 2006, p. 4964 ; LPA 2006, n° 68, p. 3 et n° 69, p. 3, note Schoettl.
[32] Cons. const. 3 avr. 2003, n° 2003-468 DC § 4 ; JORF 12 avr. 2003, p. 6493; RFD const. 2003. 573, chron. Ghévontian.
[33] Règlement du Sénat, art. 48 : « 4. Sauf dispositions spécifiques les concernant, les sous-amendements sont soumis aux mêmes règles de recevabilité et de discussion que les amendements. En outre, ils ne sont recevables que s’ils n’ont pas pour effet de contredire le sens des amendements auxquels ils s’appliquent. » ; Règlement de l’Assemblée nationale, art. 98 : « 4. Les amendements ne peuvent porter que sur un seul article. Les contre-projets sont présentés sous forme d’amendements, article par article, au texte en discussion. Les sous-amendement ne peuvent contredire le sens de l’amendement; ils ne peuvent être amendés. La recevabilité des amendements, contre-projets et sous-amendement, au sens du présent alinéa, est appréciée par le Président de l’Assemblée ».
[34] Afin d’éviter une surenchère dans modification des textes, les sous-amendements « ne peuvent être amendés » : Règlement de l’Assemblée nationale, art. 98, 4. ; Règlement du Sénat, art. 48, 4.
[35] R. Libchaber, « Le décret d’application, norme paradoxale », RTD civ. 1998. 788.
[36] J.-M. Olivier, Les sources administratives du droit privé, th. Paris II, 1981, n° 501 et s. ; M. Guidal, « Le retard des textes d’application des lois », RD publ. 1974. 1039 ; R. Hanicotte
[37] CE, 10 mars 1967, n° 69378, Société « Les Ardoisières d’Angers », Lebon 116.
[38] J.-M. Auby, « L’obligation gouvernementale d’assurer l’exécution des lois », JCP 1953. I. 1080 ; J.-M. Breton, « L’obligation pour l’administration d’exercer son pouvoir réglementaire d’exécution des lois », RD publ. 1993. 1749.
[39] CE, 3 oct. 1997, n° 158921, Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), Lebon ; AJDA 1997. 909, obs. F. J.-L. ; D. 1997. 230 ; RTD civ. 1998. 788, obs. R. Libchaber ; JCP 1998. IV. 1170, obs. M.-C. Rouault ; V. déjà CE, 27 nov. 1964, Dame veuve Renard, R.D.P. 1965, p. 724.
[40] Ibidem.
[41] CE, 26 juillet 1996, n° 160515, Association lyonnaise de protection des locataires (ALPL), Lebon 293 ; RFDA 1996. 768, concl. C. Maugüe.
[42] V. spéc. la question n°12103 de M. le Député Fabien Matras (La République en marche – Var), JORF du 11 sept. 2018, p. 7949 et la question n°12900 de M. le Député Marc Le Fur (Les Républicains – Côtes d’Armor), JORF du 2 oct. 2018, p. 8692.
[43] Selon les contrats, cette clause s’intitule « obligations relatives aux services publics » : V. entre autres : Convention de concession passée entre l’Etat et la société ADELAC pour la conception, la construction, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de la section Saint-Julien-en-Genevois-Villy-le-Pelloux de l’autoroute A 41, le 27 octobre 2005, art. 17 ; Convention passée entre l’État et la société ALBEA pour le financement, la conception, la construction, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de la section de l’autoroute A 150 entre Ecalles-Alix et Barentin, le 28 décembre 2011, art. 17 ; Convention passée entre l’État et la société ALICORNE pour le financement, la conception, la construction, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de la section Falaise-Ouest―Sées de l’autoroute A 88 , le 9 octobre 2015, art. 17. Elle peut également s’intituler « Obligations relatives à divers services publics » : V. entre autres : Convention passée entre l’État et la société APRR pour la concession de la construction, de l’entretien et de l’exploitation d’autoroutes, le 29 janvier 2016, art. 16 ; Convention passée entre l’État et la Compagnie Eiffage du viaduc de Millau (CEVM) pour la concession du financement, de la conception, de la construction, de l’exploitation et de l’entretien du viaduc de Millau, le 29 janvier 2016, art. 17.
[44] Ce qui n’est pas le cas de toutes, V. not. Convention passée entre l’État et la société COFIROUTE pour le financement, la construction, l’entretien et l’exploitation de l’autoroute A 86 Ouest entre RueilMalmaison (RN 13) et Versailles – Jouy en Josas (Pont – Colbert), réservée aux véhicules légers, et entre Rueil-Malmaison et Bailly (A12), accessible à tous les véhicules ; Convention passée entre l’État et la société APRR pour la concession de la construction, de l’entretien et de l’exploitation d’autoroutes, le 29 janvier 2016.
[45] Convention de concession passée entre l’Etat et la société ADELAC pour la conception, la construction, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de la section Saint-Julien-en-Genevois-Villy-le-Pelloux de l’autoroute A 41, le 27 octobre 2005, art. 35.1. Pour des clauses similaires, V. not. : Convention de concession passée entre l’Etat et la société ATLANDES pour le financement, la conception, l’aménagement, l’élargissement, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de la section de l’autoroute A 63 entre Salles et Saint-Geours-DeMaremne, le 31 janvier 2016, ; Convention passée entre l’État et la société ALBEA pour le financement, la conception, la construction, l’entretien, l’exploitation et la maintenance de la section de l’autoroute A 150 entre Ecalles-Alix et Barentin, le 28 décembre 2011, art. 35.1.
[46] V. spéc. les art. R. 311-1 et R. 432-5 du Code de la route.
[47] La notion d’opération peut ici se rapprocher de celle « d’opération de secours » au sens de celle adoptée par le Code de la sécurité intérieure : V. spéc. L. 112-2 ainsi que L. 742-1 de ce même Code : « Chapitre II : Opérations de secours »
[48] V. not. la réponse du Ministre des Transport au JORF du 09 mai 2017, p. 3374 à la question n° 100413 de M. le Député André Schneider (Les Républicains – Bas-Rhin), JORF du 01 nov. 2016, p. 8994.
[49] C’est pourtant ce que laisse entendre le Conseil d’Etat : CE 14 févr. 1975, Merlin ; Lebon p. 109 ; AJDA 1975. 235, chron. p. 229 ; D. 1976. 144, note J.P. Boivin ; RDP 1975. 1705.
[50] Réponse du Ministre des Transport au JORF du 09 mai 2017, op. cit. : « En vertu d’un principe constitutionnel réaffirmé par le Conseil d’Etat, les missions régaliennes de l’Etat ne peuvent en principe être financées que par l’impôt, et en aucun cas par des redevances d’infrastructures. Ainsi, le coût que représente l’infrastructure par les véhicules des services d’incendie et de secours (SDIS) en mission de service public, sans lien direct avec l’exploitation de l’autoroute, ne peut être mis à la charge du concessionnaire et donc in fine des usagers. »
[article publié au Bulletin juridique des collectivités locales au numéro 1/2019 de janvier 2019]
Présentation :
Une ICPE peut se définir comme « toute installation exploitée ou détenue par une personne physique ou morale, publique ou privée, qui peut présenter des dangers ou des inconvénients pour notamment la santé, la sécurité, la salubrité publique ou encore la protection de l’environnement ».
Peuvent constituer des installations classées, un dépôt, un chantier, une exploitation agricole, une usine, un atelier, une station-service, une installation de stockage des déchets, une carrière, un site industriel Seveso, une éolienne de plus de 12 mètres.
Les ICPE sont soumises à un régime qui varie en fonction du risque, voire du danger qu’elles peuvent générer (régimes d’autorisation, d’enregistrement ou de déclaration).
Le non-respect de la réglementation par l’exploitant entraîne des sanctions administratives et/ou pénales.
Une police spéciale des ICPE a été instaurée par le législateur et relève de la compétence du préfet (articles L.511-1 et suivants du code de l’environnement).
Il est de jurisprudence constante qu’en présence d’une police spéciale, les pouvoirs de police administrative générale du maire s’efface en l’absence de péril imminent.
Pour autant, le maire n’est pas totalement inactif. Il peut tout d’abord interpeller le préfet afin que celui-ci puisse user de ses pouvoirs. Il dispose ensuite d’un pouvoir de police en matière de déchets (article L.541-3 du Code de l’environnement), ce qui lui permet de lutter contre le dépôt de déchets sauvages. Enfin, le maire dispose de la faculté d’engager la responsabilité pénale des exploitants en cas de dysfonctionnements graves sur l’environnement.
Les quelques arrêts présentés ci-dessous ne représentent qu’un petit échantillon du contentieux de masse qu’engendre cette matière. Ce premier volet aborde uniquement la responsabilité administrative.
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Un riverain de la commune de Saint-Cyprien a fait installer sans autorisation sur sa propriété un plan d’eau. Après une mise en demeure restée lettre morte, le Préfet de la Corrèze lui a, par arrêté du 12 novembre 2015, ordonné le paiement d’une astreinte journalière de 10 euros jusqu’à satisfaction de cette mesure.
Le requérant a interjeté appel du jugement du Tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté.
Les juges d’appel ont pris le soin, à titre liminaire, de rappeler les dispositions relatives aux pouvoirs de police spéciale du préfet.
Ainsi, aux termes de l’article L.214-3 du code de l’environnement, « sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles ».
Les juges ont ensuite donné raison au préfet lequel a estimé que « le plan d’eau appartenant [au requérant] était soumis à autorisation, en application de l’article L.214-1 du code de l’environnement, dès lors qu’il relevait des rubriques 3.1.1.0 et 3.1.2.0 de la nomenclature prévue à l’article R.214-1 du code de l’environnement ».
De plus, l’instruction a révélé à travers plusieurs éléments le caractère dangereux pour la sécurité de l’étang.
C’est la raison pour laquelle les juges ont confirmé le jugement de première instance. Pour eux, le préfet a correctement user de ses pouvoirs de police spéciale.
(CAA Bordeaux 26 novembre 2019, n° 18BX00560, M. B… A… c/ Préfet de la Corrèze)
Après l’arrêt de son activité de fabrique de matériel destiné principalement à l’électrolyse, la société Progalva a été mise en demeure par arrêté préfectoral du 20 septembre 1990 de remettre en état le site situé à La Chapelle-La-Reine.
Par plusieurs arrêtés successifs, le Préfet de la Seine-et-Marne a ordonné à l’encontre de la société Progalva le versement de trois sommes : une première liée au montant des travaux à réaliser pour remettre en état le site, une deuxième pour la réalisation d’une étude hydrogéologique et une troisième pour la dépollution du site en vue de l’élimination des déchets restant sur le site.
En 2012, la préfecture a ordonné le versement d’un complément au montant des travaux à réaliser pour la mise en sécurité du site suivi un mois plus tard d’un titre de perception du même montant.
La société a contesté la légalité de l’arrêté du 17 septembre 2012 ainsi que le titre de perception.
Le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ces deux actes.
La Cour administrative d’appel de Paris a jugé l’arrêté régulier et a donc récusé l’ensemble des arguments de la société requérante.
Tout d’abord, les juges d’appel ont écarté d’office le défaut de motivation en fait et en droit supposé de l’arrêté.
Ensuite, les juges ont rappelé les obligations qui pèsent sur l’exploitant : « Les articles L. 512-6-1 et L. 512-12-1 du code de l'environnement prévoient que lorsque l'installation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site au moins comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation mise à l'arrêt ». Cette obligation demeure même lorsque l’exploitant a cédé le site à un tiers.
S’il n’est pas contesté qu’entre 1984 à 1990, d’autres sociétés aient pu exploiter le site, cet état de fait n’a pas fait perdre la qualité d’exploitant à la société demanderesse.
De plus, celle-ci ne peut invoquer la vente d’une partie du site pour se dédouaner de ses responsabilités.
Enfin, la somme exigée au titre de la consignation est justifiée car elle est fondée sur le dossier établi par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME).
Concernant le titre de perception, celui-ci doit comporter un certain nombre d’éléments obligatoires. Les juges ont constaté en l’espèce que le titre en question n’avait pas été signé par l’ordonnateur désigné dans l’acte. Par conséquent, les juges ont accueilli la demande en annulation.
Le jugement a donc été annulé.
(CAA Paris 21 novembre 2019, n° 18PA03011, Société Progalva c/ Préfet de Saint-et-Marne)
Deux associations environnementales et des riverains ont sollicité le juge administratif en vue de l’annulation de l’arrêté préfectoral du 17 mars 2015 qui a autorisé une société à exploiter onze éoliennes et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Champlay, Guerchy et Neuilly.
Par un jugement du 25 avril 2017, le tribunal administratif a rejeté leur demande.
La Cour administrative d’appel de Lyon a estimé que l’arrêté attaqué présentait un vice susceptible d’être régularisé. En application de l’article L.181-18 du code de l’environnement, elle a, par un arrêt avant-dire droit, sursis à statuer « dans l’attente de la production par le préfet de la région Bourgogne Franche-Comté d'une autorisation modificative en vue de régulariser l'arrêté du 17 mars 2015 ».
Le ministre chargé de l’énergie s’est pourvu en cassation.
L’article 6 de la directive européenne du 13 décembre 2011 oblige les Etats à désigner une autorité compétente pour « rendre un avis sur l'évaluation environnementale des plans et programmes susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ».
En France, « l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1 est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé » (article R.122-6 du code de l’environnement).
Dans son arrêt rendu le 20 octobre 2011, la Cour de justice de l’Union européenne a considéré que si les dispositions de l’article 6 de la directive de 2011 « ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu'une entité administrative dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné ».
Au titre de ses pouvoirs de contrôle de conventionalité, le Conseil d’Etat avait annulé l’article R.122-6 par un arrêt du 6 décembre 2017.
Face au non-respect de la France de cette directive, le Conseil d’Etat a rappelé qu’il revient aux juges du fond d’en assurer la garantie. La Haute juridiction a précisé que « lorsque le préfet de région est l'autorité compétente pour autoriser le projet en cause, si la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable définie par le décret du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable et les articles R. 122-21 et R. 122-25 du code de l'environnement peut être regardée comme une entité disposant, à son égard, d'une autonomie réelle lui permettant d'exercer la mission de consultation en matière environnementale, il n'en va en principe pas de même des services placés sous son autorité hiérarchique, telles les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement ».
En l’espèce, l’avis a été rendu par les services de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Bourgogne, placée directement sous l’autorité du préfet de région et ne disposant pas de l’autonomie nécessaire.
Pour la juridiction suprême, il y a bien méconnaissance du droit européen justifiant le rejet du pourvoi.
Une association environnementale a demandé devant le Conseil d’Etat l’annulation partielle du décret du 6 juin 2018 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) en ce qui concerne diverses activités en relation avec la valorisation des déchets.
Pour l’association requérante, « le décret attaqué méconnaît les objectifs de la directive 2011/92/UE en ce qu'il soumet des activités relevant de son annexe II au régime de l'enregistrement prévu aux articles L. 512-7 et suivants, alors que l'examen au cas par cas de la nécessité d'une évaluation environnementale que comporte ce régime ne satisfait pas aux objectifs de cette directive, d'une part, parce que cet examen est effectué par le préfet par ailleurs compétent pour statuer sur la demande d'autorisation, d'autre part, parce ce qu'il ne prend pas en compte l'ensemble des critères définis dans l'annexe III de la directive, visant à déterminer si le projet d'exploitation doit faire l'objet d'une évaluation de ses incidences sur l'environnement ».
Pour les conseillers d’Etat, les dispositions issues du code de l’environnement ne contreviennent pas au droit européen cité plus haut.
Si la directive européenne du 13 décembre 2011 impose que l’avis soit rendu « par une autorité compétente et objective en matière d'environnement », elle ne fait pas obstacle à ce que le préfet soit compétent à la fois pour statuer sur la demande d’enregistrement effectuée au titre de la législation des ICPE et d’examiner au cas par cas les projets qui doivent être soumis à une évaluation de leurs incidences sur l’environnement.
De même, ce texte européen n’empêche pas le préfet de région de se prononcer « sur l'autorisation administrative requise pour le projet sous réserve qu'elle ne soit pas chargée de l'élaboration du projet ou en assure la maîtrise d'ouvrage ».
Par ailleurs, les juges du Palais-Royal ont estimé que ce principe de non-régression était respecté. Là encore, ce principe général du droit n’impose pas que les activités soient soumises à une évaluation environnementale de façon systématique.
Pour toutes ces raisons, il a été jugé que l’association demanderesse n’était pas fondée à contester la légalité du décret.
Les requérants ont saisi le juge administratif en vue de l’annulation des arrêtés préfectoraux des 24 juillets 2013 et 11 août 2015 qui autorisent « par renouvellement et extension, [une société] à exploiter une carrière de sables siliceux, de quartzite et d'argile sur le territoire des communes de Vallabrix […] et de Saint-Victor-des-Oules […] ».
Par un jugement du 22 novembre 2016, le Tribunal administratif de Nîmes a pris acte des désistements des conclusions des demandes dirigées contre l’arrêté de 2015, a annulé l’arrêté de 2013 et a autorisé, à titre provisoire, la société « à poursuivre pendant une durée de douze mois l'exploitation de la carrière afin de permettre la réalisation d'une nouvelle étude d'impact et la prescription par le préfet du Gard de nouvelles mesures compensatoires ».
Les juges d’appel ont énoncé le principe de référence : « Si, lorsque l'autorité administrative prend, pour l'exécution d'une décision juridictionnelle d'annulation, une nouvelle décision d'autorisation d'exploiter ayant un caractère provisoire, le recours dirigé contre cette décision juridictionnelle conserve son objet, il en va autrement en cas d'intervention d'une nouvelle autorisation définissant entièrement les conditions d'exploitation de l'installation et dépourvue de caractère provisoire, se substituant à l'autorisation initialement contestée ».
Et de conclure que « l'intervention de cette nouvelle autorisation, qu'elle ait ou non acquis un caractère définitif, prive d'objet la contestation de la première autorisation, sur laquelle il n'y a, dès lors, plus lieu de statuer ».
Ainsi, pour les juges administratifs, il n’y a pas lieu de répondre aux conclusions des parties.
La ville de Paris a obtenu un permis de construire en date du 17 décembre 2015 en vue de la réalisation de son programme qui comprend notamment une installation de collecte de déchets dangereux, soumise à déclaration.
Le 9 avril 2015, la mairie a reçu de la préfecture un récépissé « accompagné des prescriptions générales applicables à cette activité ».
L’association « Sauvons notre stade » a contesté cette décision préfectorale devant le Tribunal administratif de Paris lequel a rejeté ses conclusions.
Après la recevabilité d’intervention en appel de l’association France nature environnement, celle-ci a soutenu que les premiers juges du fond aient commis des erreurs de droit, « d'une part, en estimant que la voie d'accès à l'installation devait s'entendre de la seule rampe d'accès à celle-ci et, d'autre part, en jugeant qu'était inopérant le moyen tiré de l'incompatibilité de la configuration des voies d'accès à l'installation classée avec l'article UG 3.1 du plan local d'urbanisme ».
Or, pour les juges administratifs d’appel, « de telles erreurs n'affectent pas la régularité du jugement mais seulement son bien-fondé ».
Les juges d’appel ont apporté quelques précisions. Selon eux, « il résulte de ces dispositions qu'il appartient au préfet de délivrer le récépissé de la déclaration d'ouverture d'une autorisation classée faite auprès de lui, dès lors que l'installation relève bien du régime de la déclaration et que le dossier est régulier et complet ». Par conséquent, « il ne lui appartient pas en principe de s'assurer à ce stade que l'installation sera en mesure de fonctionner conformément aux prescriptions applicables dont il joint une copie au récépissé ».
Les juges ont ainsi rejeté un par un les arguments de la société requérante.
Un rapport a été rédigé par la commission mixte paritaire (CMP) visant à proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour l'année 2019.
Ce rapport a été enregistré le 19 novembre 2019 à la Présidence de l’Assemblée nationale sous le numéro 2427 et à la Présidence du Sénat sous le numéro 134.
Les deux chambres se sont mises d'accord notamment sur les autorisations d'engagement et crédits de paiement supplémentaires ouvert concernant le programme de la " sécurité civile " (cf. pièce jointe).
Mme Gisèle Biémouret attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le mouvement persistant de grève au sein des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS). Depuis le mois de mars 2019, les syndicats de sapeurs-pompiers ont porté plusieurs revendications, lesquelles visent, au-delà de mesures concrètes comme la revalorisation de leur prime de feu ou le recrutement massif d'emplois statutaires, plus substantiellement, à défendre un service public en pleine crise. En effet, elles s'inscrivent dans un contexte de plein essor de leurs interventions, résultant principalement du manque de médecins et de policiers que les sapeurs-pompiers sont appelés à suppléer. Entre 2003 et 2018, c'est plus d'un million d'interventions supplémentaires annuelles pour les sapeurs-pompiers pour atteindre le chiffre de 4,6 millions d'interventions. Dans le même temps, il est constaté une diminution de la disponibilité des sapeurs-pompiers volontaires ainsi qu'une stabilisation des effectifs de professionnels. Suite à deux mois de grève, entre le 26 juin et le 31 août 2019, et en l'absence de réponse, les syndicats ont annoncé prolonger le mouvement jusqu'à la fin du mois d'octobre 2019. Dans ces conditions, elle l'interroge sur les intentions du Gouvernement pour répondre aux attentes légitimes exprimées par les sapeurs-pompiers et sauvegarder le modèle français de sécurité civile.
La sécurité civile française repose sur un modèle qui démontre chaque jour sa pertinence et sa robustesse. Par son organisation et son implantation territoriale cohérente, notamment dans les zones rurales, notre modèle permet aussi bien de faire face aux accidents du quotidien, que d'affronter les crises exceptionnelles. Ce modèle, garant de la pérennité de la mission des 240 000 sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, doit être conforté. Les organisations syndicales représentant les sapeurs-pompiers professionnels ont exprimé le souhait que la profession de sapeurs-pompiers soit davantage valorisée. Le Gouvernement a parfaitement conscience de l'importance de notre modèle de sécurité civile et du rôle déterminant qu'y jouent les sapeurs-pompiers, parfois au péril de leur vie. Les événements récents suffisent à prendre la pleine mesure des risques qu'ils encourent pour sauver la vie des autres. Concernant la pression opérationnelle, les sapeurs-pompiers sont au cœur de la société et en vivent, directement, tous les changements et bouleversements : le vieillissement de la population, le manque de médecins, la disparition des solidarités de proximité. Ils prennent donc une part croissante de la gestion des conséquences de ces phénomènes sociétaux. Dans ce contexte, le ministère de l'intérieur et le ministère des solidarités et de la santé ont engagé, il y a un an, un cycle de travail, qui s'est traduit par l'adoption de 6 mesures, initiées à l'automne 2018 et complétées par une nouvelle vague décidée en juillet dernier, à savoir : - tendre vers la généralisation des coordonnateurs ambulanciers au sein des services d'aide médicale d'urgence (SAMU) ; - réduire l'attente des sapeurs-pompiers aux services d'urgence ; - étudier la possibilité d'effectuer certaines missions à deux sapeurs-pompiers ; - dynamiser la concertation entre les services d'incendie et de secours (SIS), les SAMU et les agences régionales de santé ; - se tenir mutuellement informés des évolutions de moyens en place sur le territoire, notamment en ce qui concerne l'évolution de la cartographie hospitalière ; - étendre le champ des gestes techniques de secourisme autorisés aux sapeurs-pompiers. Parmi ces mesures, la généralisation des coordonnateurs ambulanciers devrait permettre dès 2020 une meilleure gestion des transports sanitaires urgents et diminuer le recours aux sapeurs-pompiers pour ce type de mission. En parallèle, des travaux de révision du référentiel secours d'urgence aux personnes - aide médicale urgente du 25 juin 2008 sont engagés, en débutant par l'évaluation de la mise en œuvre des départs réflexes et des protocoles infirmiers de soins d'urgence ainsi que la gestion des carences ambulancières. La réunion qui s'est tenue le 12 novembre dernier au ministère de l'intérieur en présence du cabinet de la ministre des solidarités et de la santé, des représentants des employeurs et des organisations syndicales de sapeurs-pompiers professionnels a permis de faire le point sur l'état d'avancement de ces dossiers. Le caractère dangereux du métier et des missions qu'exercent les sapeurs-pompiers est notamment reconnu par le classement en catégorie active des emplois de sapeurs-pompiers professionnels et par un régime indemnitaire spécifique qui leur est alloué. Ainsi, le fait d'occuper un emploi de catégorie active ouvre droit, pour les sapeurs-pompiers professionnels, à un départ anticipé à la retraite par rapport à l'âge normal et à une bonification, pour la liquidation de leur pension, égale à un cinquième du temps passé en catégorie active. De même, les sapeurs-pompiers professionnels perçoivent une indemnité de feu de 19 % du traitement soumis à retenue pour pension, dont le montant est entièrement pris en compte dans le calcul de la pension de retraite, à la différence des éléments de régime indemnitaire des autres fonctionnaires. La demande de revalorisation de cette indemnité de feu, portée par les organisations syndicales relève de la compétence des collectivités territoriales. C'est pourquoi un dialogue entre les employeurs des sapeurs-pompiers et les organisations syndicales a été engagé, notamment sur ce point. Le Gouvernement prendra acte des propositions que porteront les représentants des présidents des conseils d'administration des SIS et des principaux financeurs de ces établissements publics (conseils départementaux, communes et établissements publics de coopération intercommunale) et déclinera dans les textes réglementaires nécessaires les éléments issus des négociations en cours. L'engagement des sapeurs-pompiers volontaires contribue à garantir, chaque jour, la continuité opérationnelle du service public de protection et de secours à la population. La pérennité et l'attractivité du volontariat dépendent de sa capacité à s'adapter aux nouvelles formes d'engagement, attendues par les plus jeunes qui aspirent davantage aujourd'hui à pouvoir concilier vie privée, vie professionnelle et engagement. Le plan d'action 2019-2021 en faveur du volontariat, que le Gouvernement a présenté le 29 septembre 2018, vise trois objectifs principaux : - attirer et susciter des vocations, en représentant mieux notre société, en donnant toute leur place aux femmes et en intégrant les jeunes venant de tous les horizons ; - fidéliser et mettre le sapeur-pompier volontaire au cœur du dispositif, en prenant en compte ses compétences individuelles ainsi que les contraintes et les obligations des employeurs ; - diffuser les bonnes pratiques et s'assurer de l'utilisation de tous les outils mis à disposition. Le suivi et l'évaluation de la mise en œuvre du plan d'action 2019-2021 pour le volontariat sont assurés par trois dispositifs d'ores et déjà mis en œuvre. Tout d'abord, un comité de pilotage chargé du suivi de la mise en œuvre des mesures du plan a été mis en place et s'est réuni six fois depuis le 27 novembre 2018. Ce comité de pilotage est composé de parlementaires, de représentants des présidents de conseils d'administration de services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), de représentants des maires, de représentants de la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France et de représentants de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. En outre, un rapport annuel sur l'état d'avancement du plan sera présenté fin 2019 au conseil national des sapeurs-pompiers volontaires et à la conférence nationale des services d'incendie et de secours. Enfin, l'Inspection générale de la sécurité civile contrôlera la déclinaison effective du plan sur le terrain à l'occasion des évaluations périodiques des SDIS.
M. Henri Leroy. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la ministre, rappelez-vous, le 3 octobre 2015, le département des Alpes-Maritimes a été frappé par de dramatiques intempéries faisant 20 morts, plus de 30 000 sinistrés et plusieurs centaines de millions de dégâts.
À la suite de ce drame, le conseil départemental, les intercommunalités et les communes des Alpes-Maritimes ont créé le Syndicat mixte inondations, aménagement et gestion de l'eau maralpin, dit Smiage, chargé de gérer le facteur inondation et de déterminer l'ensemble des travaux indispensables.
En collaboration avec les services de l'État et les agences publiques, les aménagements urgents étaient donc parfaitement identifiés pour assurer la protection maximale des personnes et des biens.
Entre le 22 novembre et le 25 novembre 2019, des pluies diluviennes inondaient de nouveau le Var et les Alpes-Maritimes, avec plus de 20 000 foyers sinistrés et d'innombrables effondrements et éboulements nécessitant des centaines de relogements. Pour beaucoup, il s'agit des mêmes victimes qu'en 2015. Le bilan humain est de 5 morts, une personne n'ayant toujours pas été retrouvée à ce jour.
Au cours de ce drame, l'ensemble des forces de sécurité et des services municipaux, avec leur maire, ont été remarquables par leur engagement sur le terrain.
Depuis 2015, la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) freine, retarde et va jusqu'à bloquer la réalisation des travaux urgents et indispensables identifiés, sous prétexte de préserver des espèces dites protégées, batraciens ou plantes en tous genres. Et lorsqu'une étude se termine, elle en ordonne une nouvelle…
Si les travaux parfaitement identifiés par le Smiage avaient été réalisés, des vies auraient sans doute pu être sauvées, et des dégâts humains et matériels évités.
Madame la ministre, ne pensez-vous pas, aujourd'hui, qu'il est indispensable de créer une procédure d'urgence pour anticiper et faire face à ce genre de situations, qui se multiplient ? Par ailleurs, allez-vous donner des instructions à la Dreal pour faciliter les dossiers en cours et faire passer les vies humaines avant les espèces protégées, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur, vous l'avez rappelé, notre pays a été de nouveau durement touché par des intempéries le week-end dernier, avec onze départements en vigilance orange pour des risques divers de vents violents, d'inondations, de submersions marines. Effectivement, deux départements, dont les Alpes-Maritimes, ont été classés en vigilance rouge par Météo France.
Je voudrais de nouveau exprimer toute ma solidarité aux familles et aux proches des victimes, et saluer la mobilisation exceptionnelle des forces de secours, des services de l'État, des collectivités et des opérateurs. M. le ministre de l'intérieur s'est rendu sur place et il a pu constater cette mobilisation exceptionnelle.
Face à ces événements, dont on sait qu'ils seront de plus en plus fréquents et de plus en plus violents, il nous faut agir pour prévenir les conséquences des inondations. C'est ce que nous faisons avec les plans de prévention des risques d'inondation (PPRI). C'est ce que nous faisons au travers des programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI), avec des financements importants sur le fonds Barnier. C'est ce que font les communes avec leurs plans communaux de sauvegarde. Je pense que l'on a pu en mesurer toute l'efficacité ce week-end. (M. Pierre-Yves Collombat s'exclame.)
Toutefois, c'est vrai, il faut que l'on arrive à mettre en place toutes les mesures prévues dans les PAPI, sans doute de façon plus rapide. C'est bien le sens d'une inspection que j'ai demandée à mon ministère pour regarder ce qui peut aujourd'hui freiner la réalisation de ces programmes d'actions. Je disposerai très prochainement des propositions et je pense que nous aurons l'occasion d'en débattre. Il nous faut effectivement agir plus efficacement pour prévenir ces risques d'inondation, et c'est ce que nous allons faire.
ENSOSP
Audrey MOREL SENATORE - Responsable du CERISC de l'ENSOSPou Alexia TOUACHE, élève-avocate, alexia.touache@ensosp.fr, +33 (0)4 42 39 05 78
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