Une VLI, par l’intermédiaire du CODIS, a été réquisitionnée à plusieurs reprises par le commissariat de proximité pour effectuer un test antigénique à une personne en garde à vue.
Quel est le cadre de cette intervention ? quelle réponse apporter ?
De nombreuses questions se posent :
Si la réalisation d’un test antigénique ne relève pas de l’urgence médicale, une réquisition à personne peut-être une urgence judiciaire et demander la réalisation de l’acte « sans délai ».
Dans ce cas le VLI devra déférer à la réquisition selon les indications précisées par l’OPJ (officier de police judiciaire) en charge du dossier, à la condition que la réquisition n’excède pas les limites de compétence de l’infirmier requis.
Sauf autorisation de l’OPJ, le VLI est indisponible durant sa mission judiciaire.
2. Un infirmier peut-il être réquisitionné ?
Selon l’article 60 du CPP (code de procédure pénal) (ou le 77-1 en cas d’enquête préliminaire) : « S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de ce dernier, l'agent de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées ».
Un infirmier, comme tout citoyen peut être requis par l’autorité judiciaire.
Mais pour quelle mission ?
Les actes professionnels infirmiers, détaillés dans le CSP (code de la santé publique) (articles 4311-1 à 4311-15) sont soumis, en grande partie, à une prescription médicale préalable. Seuls les soins qui relèvent du rôle propre de l’infirmier pourront donc être demandés lors de cette réquisition : ceux liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie et visant à compenser partiellement ou totalement un manque ou une diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personne (article R4311-3 du CSP).
Ainsi, tout acte nécessitant des « prélèvements non sanglants effectués au niveau des téguments ou des muqueuses directement accessibles » ou des « prélèvements de sang par ponction veineuse ou capillaire ou par cathéter veineux » est soumis à prescription médicale (article 4311-5 CSP). L’ensemble de ces actes ne peut donc pas être réalisé lors d’une réquisition judiciaire même si un protocole autorise l’infirmier à effectuer ces actes lors de ses activités de SP.
En effet, l’exercice en tant qu’infirmier requis, qui joue alors le rôle d’expert judicaire, sort l’infirmier de sa tutelle hiérarchique et ne lui permet plus d’appliquer ses protocoles.
Un arrêt de la Cour de Cassation du 24 juin 1992 précisait déjà cette position :
« La loi punit le refus de concours de toute personne requise à laquelle l’autorité, dans l’exercice de ses fonctions et dans les limites de sa compétence, s’adresse dans un intérêt urgent d’ordre public et qui, sans motif légitime établissant son impossibilité d’agir, refuse ou néglige de prêter secours ou de faire les travaux ou le service que l’autorité requérante estime nécessaire »
Une exception existe néanmoins dans le code de la route en l’article R234-4 qui stipule que pour le dépistage d’un état alcoolique, l'officier ou l'agent de police judiciaire peut requérir un médecin, un interne en médecine, un étudiant en médecine autorisé à exercer la médecine à titre de remplaçant ou un infirmier pour effectuer une prise de sang.
Une deuxième exception est apparue plus récemment avec l’arrêté du 1er juin 2021 qui autorise plusieurs professions, dont les infirmiers, à réaliser un test rapide d’orientation diagnostique antigénique pour la détection du Sars-Cov-2 sans prescription médicale préalable et sans recours à un biologiste.
Ces tests doivent néanmoins être réalisés dans des conditions précisées aux articles 22 et 28 :
Le prélèvement ne pourra donc se faire que dans des locaux du SDIS et non sur le lieu de la garde à vue ... requérir un pharmacien dans son officine semble bien plus simple.
En conclusion : hormis le cas d’un prélèvement sanguin pour recherche d’alcoolémie, la réquisition d’un infirmier dans le cadre d’une procédure judiciaire dépassera surement les limites règlementaires de sa compétence.
I) Définition de la réquisition judiciaire :
La réquisition, au sens large, est une injonction faite à un individu par une autorité judiciaire ou administrative en vue de réaliser un acte quelconque.
- Nous détaillerons uniquement la réquisition judiciaire -
La réquisition doit-être perçue comme une nécessité d’utiliser des compétences spécifiques dans le cadre d’une affaire judiciaire (meurtre, AVP avec mort violente, coups et blessures, …) ; autant de terrains où les sapeurs-pompiers sont intervenants.
Cependant, la réquisition ne peut être utilisée que dans trois cas bien définis par le Code de Procédure Pénale (CPP) :
Dans cet article nous n’envisagerons pas la commission rogatoire, spécificité pénale, intervenant dans le cadre d’enquêtes en cours d’instruction.
II) Les cadres judiciaires :
En la matière, il est important de savoir que seuls les Officiers de Police Judiciaire sont autorisés par le Code de Procédure Pénale (CPP) à recourir à la réquisition.
Le Procureur de la République et le Juge d’instruction disposent, quant à eux des mêmes prérogatives.
a) L’enquête Préliminaire (Articles 75 à 78 du CPP)
Il s’agit d’une enquête réalisée à distance des faits, dont les instructions de procédures sont données aux officiers de police judiciaire en charge de l’affaire, par le Procureur de la République (Art. 75-1 du CPP). Dans ce cas, l’autorisation de réquisition n’est accordée aux enquêteurs que par le Procureur de la République (Art. 77-1 du CPP).
Article 77.1 du CPP : S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, le procureur de la République ou, sur autorisation de celui-ci, l'officier de police judiciaire, a recours à toutes personnes qualifiées. Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 60 sont applicables.
La réquisition est alors écrite et doit comporter obligatoirement les mentions suivantes :
La réquisition est toujours nominative et doit être accomplie personnellement.
Dans ce cadre particulier, les personnes requises le sont souvent pour leurs qualités expertales en rapport avec les faits. Il n’est pas rare que celles-ci soient réquisitionnées par téléphone afin de répondre au plus vite à la requête, les documents officiels leurs sont alors remis ultérieurement.
b) L’enquête de flagrance (Articles 53 à 67 du CPP)
L’enquête de flagrance (ou flagrant délit) est diligentée directement par les Officiers de Police Judiciaire pour ce qui concerne les infractions qui se voient, s’entendent et se perçoivent. Elle est contemporaine de l’action et à une durée limitée (8 jours à compter du 1er acte de l’enquête avec une prolongation possible de 8 jours).
Il existe 5 cas de flagrance :
Cet article explique la présence régulière d’une autorité de judiciaire (police ou gendarmerie) sur les lieux d’accidents de toutes natures (accidents domestiques, de travail, de la route…).
En matière de flagrant délit, les Officiers de Police Judiciaire disposent de pouvoirs plus élargis qu’en matière d’enquête préliminaire.
La réquisition n’a pas besoin d’être écrite mais doit figurer sur le procès-verbal dressé par l’Officier de Police Judiciaire requérant (article 60 CPP).
Les OPJ sont autorisés à utiliser la réquisition sur les lieux des faits.
Article 60 du CPP : S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, l'officier de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées. Sauf si elles sont inscrites sur une des listes prévues à l'article 157 (Listes d’experts judiciaires établies par les cours d’appel ou la cours de cassation), les personnes ainsi appelées prêtent, par écrit, serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience. Les personnes désignées pour procéder aux examens techniques ou scientifiques peuvent procéder à l'ouverture des scellés. Elles en dressent inventaire et en font mention dans un rapport établi conformément aux dispositions des articles 163 et 166. Elles peuvent communiquer oralement leurs conclusions aux enquêteurs en cas d'urgence. [...]
III) L’application médico-légale :
Sans préambule, en matière médico-légale, la réquisition judiciaire est presque toujours adressée à un médecin.
Y déroger, pour un médecin, constitue un délit en application de l’article L.4163-7 du Code de la Santé Publique.
Le médecin peut récuser une réquisition judiciaire dans la seule hypothèse où il s’agit du médecin traitant de la victime.
Hormis ce cas, il a obligation de déférer à la réquisition.
Y déroger pour un infirmier ne le soumet qu’à une simple amende de 2e catégorie.
Comme indiqué précédemment, l’arrêté du 1er juin 2021 autorise plusieurs professions, dont les infirmiers, à réaliser un test rapide d’orientation diagnostique antigénique pour la détection du Sars-Cov-2 sans prescription médicale préalable et sans recours à un biologiste.
Ces tests doivent néanmoins être réalisés dans des conditions précisées aux articles 22 et 28 :
- Sur le lieu d’exercice du professionnel de santé (sauf déclaration préalable auprès de la préfecture) ;
- Dans des conditions d’asepsie répondant à un cahier des charges précisé en annexe de cet arrêté.
Le prélèvement ne pourra donc se faire que dans des locaux du SDIS respectant les conditions d’asepsie.
L’infirmier est alors habilité à faire le test et à lire le résultat qui devra obligatoirement être renseigné sur le portail SI-DEP.
2. Peut-il faire cet examen en l’absence de réquisition ?
Cf. question précédente
3. Quelle réponse s’il lui est demandé de préciser l’existence ou l’absence de symptôme de maladie Covid ?
Dans son rôle propre, l’infirmier est à même de recueillir des observations de toute nature susceptibles de concourir à la connaissance de l'état de santé de la personne et appréciation des principaux paramètres servant à sa surveillance.
Il n’est pas autorisé à formuler un diagnostic médical à partir de ces observations.
Il ne pourra donc pas préciser l’existence ou l’absence de symptôme de maladie Covid.
4. Quelle doit être sa réponse si le patient refuse l’acte ?
Aucun acte médical ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne conformément à l’article L1111-4 du CSP et aux articles 16 et 16-3 du code civil.
En cas de refus, le professionnel de santé doit informer le patient des conséquences médicales de son acte. Le patient doit réitérer son refus après un délai de réflexion.
Ce refus doit faire l’objet d’un rapport remis à l’autorité requérante.
Le refus et l’information donnée au patient doivent en sus être notés dans le dossier médical qui ne doit pas être communiqué à l’autorité requérante.
Infirmier Capitaine Pierre LEMAIRE – pierre.lemaire@sdis78.fr
Médecin de classe normale Eddie NICOLAS – eddie.nicolas@sdis78.fr
Pour le service médico-juridique des Yvelines