M. Michel Vergoz. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Il n'est jamais là !
M. Michel Vergoz. Qu'à cela ne tienne, l'un de ses ministres fera l'estafette ! (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)
La Réunion glisse vers le chaos depuis deux nuits. Celle d'hier a vu les violences urbaines commises dans trois villes monter d'un cran encore.
La Réunion s'enflamme, s'embrase, brûle, une fois de plus, hélas !
La nuit dernière, la contestation contre la vie chère et le racket des monopoles a atteint un niveau grave et alarmant.
M. Alain Gournac. Quel ton dramatisant ! C'est vraiment affreux !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C'est un expert qui parle ! (Sourires.)
M. Michel Vergoz. Cette situation est le résultat de la politique d'abandon et de mépris conduite par le Gouvernement depuis 2007. (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Gaudin. Évidemment ! (Sourires.)
M. Michel Vergoz. Les injustices sont devenues de plus en plus inacceptables, car définitivement insupportables pour les ultramarins frappés par des taux de chômage sans commune mesure avec ceux des régions de l'Hexagone. (Brouhaha persistant sur les travées de l'UMP.)
Je vous demande quelques secondes d'attention, mes chers collègues ; j'ai aussi besoin de vous.
M. Alain Gournac. Quand vous serez correct !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il ne fallait pas commencer votre intervention de cette manière !
M. Michel Vergoz. Depuis 2007, le chômage a explosé comme jamais, avec une augmentation de 37 % dans l'ensemble des outre-mer et de 49 % chez les jeunes de moins de 25 ans.
M. Alain Gournac. Oh là là !
M. Michel Vergoz. Il n'y a vraiment pas de quoi rire, monsieur Gournac !
M. Alain Gournac. Vous ne me faites pas rire !
M. Michel Vergoz. À La Réunion, plus de 10 % de la population est au RSA, plus de 30 % au chômage…
M. Alain Gournac. Et alors ? (Huées sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Éliane Assassi. « Et alors ? » ! Ces chiffres vous laissent indifférent ? (Brouhaha sur toutes les travées.)
M. le président. Mes chers collègues, veuillez écouter M. Vergoz.
M. Michel Vergoz. Le compte rendu intégral de nos débats reproduira ces propos, qui constituent une insulte à l'égard de l'outre-mer et qui sont vraiment significatifs de l'état d'esprit des membres de l'opposition sénatoriale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Je vous le dis les yeux dans les yeux, mes chers collègues : près de 60 % des jeunes Réunionnais n'ont aucun rendez-vous utile le matin lorsqu'ils se réveillent. Vous les avez exclus du travail, monsieur le Premier ministre, en leur imposant le « développement endogène », c'est-à-dire le « débrouillez-vous vous-mêmes »,...
M. Alain Gournac. Arrêtez-le !
M. Michel Vergoz. ... mais aussi en les culpabilisant, en assimilant les « contrats aidés » à de l'assistanat !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Et vous, qu'est-ce que vous faites au juste ?
M. François Grosdidier. C'est du cinéma !
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.
M. Michel Vergoz. La révolte gronde !
M. Alain Gournac. La question !
M. Michel Vergoz. Monsieur le président, mes chers collègues, à aucun moment, ces dernières semaines, je n'ai cru que La Réunion connaissait une récréation dont il fallait siffler la fin, pour reprendre une expression employée par le préfet. J'ai bien vu que le mal-être allait crescendo. (Oh ! sur les travées de l'UMP.)
M. Roland du Luart. Et le temps de parole ?
M. Michel Vergoz. Monsieur le Premier ministre, au-delà des forces de l'ordre déjà envoyées en renfort, que préconisez-vous pour répondre aux angoisses et à la désespérance de tout un peuple d'une région qui fait partie intégrante de la nation française ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'outre-mer n'intéresse pas le Gouvernement. C'est bon pour aller se promener !
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de l'outre-mer.
M. Didier Boulaud. Chargée de quoi ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur Vergoz, votre question me permet effectivement de faire le point sur la situation de La Réunion devant la représentation nationale.
Au départ, il s'agissait d'un mouvement des transporteurs routiers revendiquant une baisse des prix du carburant.
Nous avons toujours privilégié la concertation, et c'est précisément dans ce cadre que le conseil régional a proposé de diminuer le prix du gazole pour les professionnels, de même que celui de la bouteille de gaz. (M. Michel Vergoz s'exclame.) Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que les collectivités ultramarines disposent d'une fiscalité locale spécifique et que, si les prix des carburants y sont administrés par l'État, ce dernier ne perçoit aucune taxe sur les produits pétroliers.
En outre, dans le prolongement de cette discussion, le préfet organise demain une table ronde avec l'ensemble des acteurs.
M. Didier Boulaud. Une de plus ! Vous êtes vraiment les chevaliers de la table ronde !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Cette discussion s'appuiera sur le travail réalisé par l'Observatoire des prix et des marges, dans le cadre du dispositif de fixation des prix mis en place en 2010 pour garantir plus de transparence et de réactivité.
Mais, comme vous le savez, monsieur le sénateur, et comme vient de l'indiquer Mme Pécresse, porte-parole du Gouvernement, en raison de la conjoncture économique, les prix des carburants sont structurellement hauts, aussi bien en métropole qu'outre-mer.
M. Michel Vergoz. Et vous n'avez rien fait pour lutter contre cette hausse !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. D'ailleurs, à la Réunion, ces prix sont voisins de ceux de la métropole, et même inférieurs pour le gazole.
Outre les revendications sur le prix des carburants,...
M. Michel Vergoz. Et plus généralement sur la « vie chère » !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. ... on assiste aussi, depuis deux jours, en marge de ce mouvement, au développement de phénomènes de violences urbaines.
Il est certain que les appels répétés de certains responsables professionnels ou associatifs, largement relayés par les médias, créent malheureusement un climat propice à ces débordements. (Protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste. - M. Jean-Pierre Michel lève les bras au ciel.)
Ces violences ne sont pas acceptables.
M. Didier Boulaud. Envoyez donc l'armée, comme en Nouvelle-Calédonie !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Elles pénalisent d'abord ceux qui vivent dans les quartiers.
Le premier devoir de l'État est de maintenir l'ordre public, et je tiens à rendre hommage aux forces de l'ordre, qui assurent, sous l'autorité du préfet, leur délicate mission de protection des biens et des personnes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) Près de cinquante personnes ont été interpellées dans ce cadre.
Je tiens également à saluer l'attitude de certains responsables et élus, qui, actuellement, sont sur le terrain, au côté du préfet, pour ramener le calme.
Il est vrai que, derrière cette violence, il y a une revendication contre la vie chère.
M. Michel Vergoz. Contre les monopoles et le racket !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Mais, en réalité, les vrais problèmes sont la précarité et le chômage, qu'il faudra régler par l'emploi.
M. Didier Boulaud. Il faut surtout changer de gouvernement !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. C'est la raison pour laquelle l'État soutient la commande publique : j'en veux pour preuve le financement de 30 % de logements sociaux supplémentaires ou l'augmentation du nombre de contrats aidés.
M. Michel Vergoz. C'est de la provocation ! C'est un mensonge !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Monsieur le sénateur, même si la tentation est grande en cette période préélectorale, je vous mets en garde contre toute tentative de récupération politique. Au bout du compte, ce sont les Réunionnais qui paieront. Alors, de grâce, cessez d'allumer le feu ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UCR. - Vives protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. Michel Vergoz. Vous provoquez la population réunionnaise ! C'est honteux !
M. Didier Boulaud. La grotte d'Ouvéa, cela vous rappelle quelque chose ? Vous devriez recommencer ! Vous êtes vraiment des champions...