M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Stéphane Artano. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, depuis le début de la crise du covid-19, on relève à Saint-Pierre-et-Miquelon 31 cas détectés et guéris sans hospitalisation, zéro décès. Le taux d'incidence est aujourd'hui également de zéro. Le taux de vaccination atteint 90 % en première dose et 88 % en seconde dose ; on atteindra 90 % dans peu de temps.
Depuis le début de la crise, grâce à l'écoute du Gouvernement, même s'il a parfois fallu un peu batailler, nous avons pu adapter les principales mesures sanitaires au territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon, en prenant parfois des décisions courageuses, restrictives de liberté. Je tiens à le dire ici aujourd'hui : la population a joué le jeu.
Je suis vacciné mais j'ai voté contre le passe sanitaire, au côté de Loïc Hervé, et contre l'obligation vaccinale pour certaines professions. Depuis le 5 août dernier, cette loi s'applique à Saint-Pierre-et-Miquelon sans différenciation. À ce jour, 95 % du personnel soignant a reçu une seconde dose de vaccin.
Toutefois, depuis plusieurs jours, les membres non vaccinés de ce personnel ont tenté d'engagé un dialogue avec le préfet de manière à adapter cette règle à Saint-Pierre-et-Miquelon au regard de la situation sanitaire du territoire. On leur a opposé une fin de non-recevoir.
Aujourd'hui, des tensions sociales sont en train de naître dans un territoire où le virus ne circule pas, un territoire qui a traversé sans heurts la crise sanitaire.
À compter du 15 octobre, soit vendredi prochain, des sanctions financières sont prévues pour les soignants non vaccinés. Pour ma part, monsieur le ministre, je vous demande de donner des instructions pour que l'on puisse assouplir intelligemment cette règle, dans notre territoire comme dans d'autres où les soignants ne sont pas tous vaccinés.
Des familles vont être mises en difficulté ; des contrats de travail vont être rompus. Avec un seul centre hospitalier sur ce territoire, comment imaginer qu'ils retrouveront un emploi ?
Alors, monsieur le ministre, si vous voulez bien y être favorable, je demande qu'un dialogue s'instaure à nouveau avec les services de l'État : aujourd'hui, il est complètement rompu. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mmes Laurence Cohen et Sylviane Noël applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Avant tout, monsieur le sénateur Artano, merci d'avoir souligné l'engagement extraordinaire de la population de Saint-Pierre-et-Miquelon, territoire qui ne compte que deux lits de réanimation ! On a pu voir, au cours des vagues qui se sont succédé dans d'autres territoires ultramarins, combien l'éloignement géographique rendait compliqué de faire face à une épidémie de cette ampleur.
La population de Saint-Pierre-et-Miquelon a demandé au Gouvernement à bénéficier en une fois de la totalité des doses nécessaires pour se vacciner ; nous avons dit oui. Désormais, la population de ce territoire affiche bien un taux de vaccination proche de 90 % : tant mieux, car elle se protège ainsi.
Aujourd'hui, seuls treize salariés des établissements sanitaires et médico-sociaux de ce territoire, ainsi que cinq ou six pompiers, ne sont pas vaccinés.
J'ai défendu devant vous les dispositions de la loi du 5 août dernier instaurant l'obligation vaccinale du personnel soignant et de celui des établissements médico-sociaux, qui a d'ailleurs recueilli l'adhésion d'une forte majorité parlementaire, dans les deux chambres. Cette obligation a pour objet de protéger non seulement les soignants eux-mêmes, par définition plus exposés, raison pour laquelle ils sont d'ailleurs appelés à recevoir une troisième dose de vaccin, mais surtout les personnes fragiles et malades avec lesquelles ils sont en contact ; nous avons eu suffisamment de cas groupés, de clusters, dans les hôpitaux et les Ehpad, pour savoir que nous devons en faire des sanctuaires.
Cette loi, que vous nous avez permis de mettre en œuvre, mesdames, messieurs les sénateurs, s'applique dans de bonnes conditions sur tout le territoire national. Parmi les agents qui ont été suspendus temporairement parce qu'ils avaient refusé la vaccination, un grand nombre a finalement fait le choix de se vacciner, également parce qu'ils ont été rassurés par l'expérience de leurs collègues, force de discussion et de dialogue.
Le dialogue avec les soignants et le personnel médico-social qui font encore aujourd'hui le choix de ne pas se vacciner n'est pas rompu, il ne le sera jamais, mais les lois de la République s'appliquent partout. Des mesures d'exception concernent les zones où s'applique l'état d'urgence sanitaire, qui impose déjà une forte mobilisation à l'hôpital.
Dès lors, monsieur le sénateur, je ne peux pas être d'accord avec votre demande. L'obligation vaccinale doit s'appliquer à Saint-Pierre-et-Miquelon. S'il y a des suspensions de salaire, elles seront immédiatement levées dès lors que ces treize salariés et ces cinq ou six pompiers auront fait le choix de se protéger et de protéger celles et ceux qu'ils soignent au quotidien. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour la réplique.
M. Stéphane Artano. Selon votre logique, monsieur le ministre, le passe sanitaire devrait s'appliquer à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais il n'y est pas mis en œuvre, parce que cela n'aurait aucun sens aujourd'hui. Le même raisonnement vaut pour l'obligation vaccinale de ce personnel soignant et des pompiers volontaires : si une intervention devait être requise, la moitié des effectifs serait suspendue ! Cela n'a aucun sens ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)