Mme Kristina Pluchet attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la lisibilité de la politique budgétaire de sécurité civile.
L'été 2022 a vu la France renouer avec des incendies estivaux de grande ampleur. Nos services de sécurité civile ont été en limite capacitaire avec pour la première fois depuis son instauration en 2001, le recours par la France au mécanisme de protection civile de l'Union européenne. Hélas, le dérèglement climatique laisse craindre pour les prochaines années une intensification de ces phénomènes intenses, et corrélativement un accroissement des situations de ruptures capacitaires. Plus que jamais, une stratégie lisible et de long terme de notre parc d'appareils de sécurité civile est donc nécessaire, stratégie dont la Cour des comptes a déploré l'absence à moyen et long terme dans son rapport du 3 octobre 2022.
Or, les crédits qui financent la sécurité civile font l'objet d'un émiettement dommageable à la visibilité de la stratégie budgétaire de la politique de sécurité civile. La suppression du document de politique transversale, actée en 2022 pour les lois de finances futures, a ainsi constitué une régression notable de la lisibilité des crédits du budget de l'État bénéficiant effectivement à la sécurité, et de fait, à une dégradation de l'information du Parlement.
La temporalité des annonces présidentielles du 28 octobre 2022, attendues, et au demeurant salutaires, suscite néanmoins de fortes réserves dans la mesure où elles sont intervenues au coeur de l'examen par le Parlement du projet de loi de finances pour 2023, et n'ont pour nombre d'entre elles, en outre pas été traduites dans le budget pour 2023 au cours de la discussion.
Si le renouvellement de la flotte d'hélicoptères est bien effective, le rapporteur a ainsi constaté l'absence, dans le projet de loi de finances pour 2023, d'autorisations d'engagement destinées à financer les 16 Canadair promis, y compris les 10 % restant à la charge de l'État dans le cadre de la commande, régulièrement annoncée, des deux Canadair du programme RescEU.
L'annonce du renouvellement intégral de la flotte de 12 Canadair entre en contradiction avec les informations transmises par le ministère de l'intérieur au rapporteur spécial, qui indiquait que, compte tenu des délais de production des appareils, la France ne pourrait espérer obtenir la livraison que de quatre appareils à l'horizon 2027. À ce sujet, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) estime que dans le meilleur des cas, seule la livraison des deux Canadairs commandés dans le cadre du programme RescEU pourra être honorée d'ici la fin du quinquennat. Pour le reste des Canadairs, il faudrait alors attendre la décennie 2030. Quant au rapporteur spécial au Sénat, il estime même que le lancement de la chaîne de fabrication, qui vient seulement d'être effectif, mettait en doute une possible livraison d'appareils d'ici à 2027. Il en résulte en tout état de cause un défaut de lisibilité des informations budgétaires, nuisant à la bonne information du Parlement.
En conséquence, elle souhaite connaitre la stratégie budgétaire précise de renouvellement des appareils de la flotte aérienne amphibie bombardiers d'eau de la sécurité civile.
Publiée dans le JO Sénat du 09/03/2023 - page 1674
Le plan de renouvellement de la flotte d'avions bombardiers d'eau de la sécurité civile est en cours de mise en oeuvre et monte en puissance depuis les annonces du Président de la République en octobre 2022. L'objectif est, d'une part, de renouveler l'intégralité de la flotte des 12 avions amphibies bombardiers d'eau de type Canadair et, d'autre part, de la renforcer par l'acquisition de 2 avions supplémentaires. L'acquisition, par la France, de 2 avions au titre du dispositif européen « RescUE », dont l'objet est de constituer une flotte européenne de 12 avions bombardiers d'eau, avait été lancée dès 2020. Ce sont donc, au total, 16 avions amphibies bombardiers d'eau que la France va acquérir, selon un rythme tenant compte des délais de productions de la société DHC. L'achat de deux premiers Canadair (CL415), dont le prix unitaire est de l'ordre de 62 Meuros, à ce stade des discussions engagées par la Commission et les États membres concernés, sera financé à 100 % au titre du programme RescEU. La livraison de ces deux premiers avions est programmée à compter de 2027. Même financés par l'Union européenne, ces avions resteront la pleine propriété de chaque Etat membre. Pour la France, ces 2 avions s'ajouteront donc aux 14 acquisitions à venir. Concernant le renouvellement/acquisition des 14 Canadairs CL415 constituant nos moyens nationaux, les négociations n'ont pas encore officiellement débuté, le constructeur s'attachant en priorité à la livraison des 12 appareils « RescUE » en cours de négociation avec la DG Echo. La loi de finances initiale pour 2023 prévoit le financement nécessaire à l'avance sur l'acquisition de 4 Canadairs, avec 240 Meuros d'AE et 24 Meuros de CP. Les 2 avions qui seront acquis au titre de rescUE seront, quant à eux, financés par l'Union européenne (UE) par l'intermédiaire d'un fonds de concours déjà créé à cet effet. S'agissant du renouvellement de la flotte, et conformément à l'engagement du Président de la République, les crédits seront ouverts, dans les années à venir, par les lois de finances présentées au Parlement, en fonction des montants et échéanciers qui auront été définis dans le cadre des négociations avec le constructeur. Quoi qu'il en soit, ces crédits seront présentés dans le cadre des projets annuels de performance soumis aux parlementaires dans le cadre de la préparation des lois de finances, conformément à la loi organique relative aux lois de finances. Enfin, une veille est assurée sur l'ensemble des avions bombardiers d'eau amphibie susceptibles d'être disponibles sur le marché. Trois programmes européens, au stade embryonnaire, avec des délais de livraison de minimum 10 ans, sont notamment suivis : - le Grampus WF-X (Italie) ; - le Seagle de Roadfout (Belgique) ; - Le FF72 porté par un ingénieur d'Airbus.
Publiée dans le JO Sénat du 03/08/2023 - page 4783