Mme Laurence Cohen interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'exonération de responsabilité sans faute pour risque de développement des fabricants de médicaments issue de la directive 85/374/CEE. Cette disposition optionnelle a été transposée dans le droit français.
Ainsi, une victime aura beau établir l'existence d'un dommage, ainsi que celle d'un lien de causalité entre ce dommage et le médicament, l'exploitant ne verra jamais sa responsabilité engagée. La victime ne sera donc pas indemnisée.
Les conséquences de cette transposition sont importantes pour les victimes, particulièrement quand les dommages sont survenus entre 1998 et 2001. En effet, l'arrêt rendu en 2007 par la Cour de cassation précise qu'un laboratoire ne peut faire valoir le risque de développement qu'à compter de 1998, année où la France a ratifié la directive. Or, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ne peut intervenir dans le processus d'indemnisation que pour les préjudices survenus à partir de 2001.
Elle l'interroge sur les actions qu'elle compte engager pour que soit inscrit dans la loi ce principe de responsabilité sans faute pour risque de développement des fabricants de médicaments.
Transmise au Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Même s'ils constituent une part essentielle de la thérapeutique et qu'il serait souvent difficile de ne pas y recourir, les médicaments présentent toujours des risques qui ont été comparés aux bénéfices lors de leur conception. Les dommages dont peut souffrir une personne ayant consommé un médicament ne sont pas nécessairement liés à son caractère défectueux ; les effets indésirables potentiels pour certains patients peuvent avoir été pris en compte lors de l'octroi de son autorisation de mise sur le marché et avoir fait l'objet d'une mention dans le résumé des caractéristiques du produit. Par ailleurs, l'article L.1142-1, introduit dans le code de la santé publique par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, prévoit, dans certaines conditions et au-delà d'un seuil de gravité, la réparation des préjudices du patient par la solidarité nationale, lorsqu'un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ont eu des conséquences anormales au regard de l'état de santé de la personne, de son évolution prévisible et que la responsabilité d'un professionnel de santé, d'un établissement de santé ou d'un producteur de produit de santé n'est pas engagée. C'est donc dans ce cadre que pourrait, le cas échéant, intervenir l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), même si le dommage est intervenu après le 5 septembre 2001, date d'effet de la transposition de la directive européenne. L'exonération du producteur de produit défectueux prévue à l'article 1386-11 du code civil avait pour objectif de ne pas pénaliser la recherche et ne peut se limiter aux seuls produits de santé : ce serait créer une rupture du principe d'égalité que de traiter différemment un tel produit et un médicament. Complémentairement, la Cour de cassation fait évoluer sa jurisprudence sur la défectuosité des produits pour y incorporer le défaut d'information des usagers sur les effets indésirables, cette évolution étant de nature à faciliter la mise en œuvre de la responsabilité du producteur. Par ailleurs, faute de dispositif pérenne, le caractère sériel des accidents liés à des produits de santé a, dans le passé, conduit à la mise en place de dispositifs ad hoc, sous différentes formes : dispositif purement amiable mis en place par l'État en vue de l'indemnisation des victimes de l'hormone de croissance ; dispositif conventionnel pour les sur-irradiés des centres hospitalier d'Épinal et de Toulouse ; dispositif d'indemnisation des victimes de contamination par le VHC ou le VIH du fait d'un produit sanguin ; dispositif d'indemnisation des victimes du benfluorex. Le projet de loi de modernisation de notre système de santé en cours d'examen au Parlement, propose l'institution d'une action de groupe pour la réparation des dommages causés par des produits de santé. C'est un prolongement nécessaire aux avancées accomplies, en matière d'indemnisation des usagers du système de santé, par la loi du 4 mars 2002. Une association d'usagers du système de santé agréée pourra désormais engager une procédure commune pour faire reconnaître la responsabilité d'un produit de santé dans la survenue de dommages corporels sériels et ainsi éviter la multiplication des procédures individuelles, particulièrement lourdes pour les victimes.