M. Denis Bouad attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les ressources dédiées aux politiques de sécurité civile dans un contexte d'aggravation des risques liés au dérèglement climatique.
Il rappelle que dans les prochaines semaines seront commémorés les trois ans de la mort de Franck Chesneau, pilote de tracker, décédé alors qu'il intervenait sur un incendie qui a ravagé plus de 900 hectares sur la commune de Générac.
À l'aube de ce triste anniversaire, le département du Gard est une nouvelle fois en proie à de terribles incendies.
En effet, le 7 juillet 2022, plus de 600 hectares de forêts sont partis en fumée sur les communes de Bessèges et Bordezac, dans les cévennes gardoises. Simultanément, les sapeurs-pompiers devaient traiter 27 autres départs de feux sur le territoire.
La solidarité interdépartementale qui a permis la mobilisation de sapeurs-pompiers venus de différents départements et l'engagement de l'ensemble des personnels mobilisés sur place a permis d'éviter une catastrophe humaine d'une autre ampleur.
Il est convenu que dans les prochaines années, nos territoires devront faire face à une expansion de la zone à risque ainsi qu'à un allongement de la période de risques intensifiés. Les prévisions font état d'une augmentation de 80 % des surfaces brûlées d'ici 2050 et d'un triplement d'ici la fin du siècle.
L'ensemble des territoires métropolitains ne sont pas exposés de la même manière. Les départements de l'arc méditerranéen se retrouvent particulièrement impactés. Ces derniers sont exposés au risque incendie en période estivale mais également au risque inondation en d'autres saisons.
Compte tenu de l'impact du dérèglement climatique et de l'inégale exposition des territoires, la question d'un recours accru à la solidarité nationale se pose.
Aussi, il peut être intéressant de constater que les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), principalement financés par les collectivités locales que sont les communes et les départements, sont contraints de s'acquitter du malus écologique lors de l'achat de véhicules ne portant pas d'eau mais tout de même nécessaires aux interventions d'urgence.
De la même manière, les SDIS doivent s'acquitter de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) alors que pour l'exercice d'autres missions régaliennes les véhicules de l'armée en sont exonérés.
Aussi, il lui demande si le Gouvernement compte renforcer le soutien de l'État au financement des SDIS pour permettre les investissements indispensables, notamment pour le déploiement massif de moyens aériens. Plus généralement, il l'interroge sur la volonté d'apporter une réponse nationale à l'ensemble de ces territoires qui se retrouvent impactés par des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes et de plus en plus intenses.
Les services d'incendie et de secours (SIS) sont des établissements publics administratifs dotés de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. Leur financement résulte d'un équilibre entre les contributions des départements, des établissements publics de coopération intercommunale et des communes. L'Etat apporte son concours au budget des services d'incendie et de secours à travers différentes dotations. La loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels prévoit dans son article 54 que le Gouvernement remette au Parlement un rapport portant sur le financement des services départementaux et territoriaux d'incendie et de secours avant le 1er janvier 2023. L'Inspection générale de l'administration (IGA) a été chargée de la rédaction de ce rapport, qui a fait l'objet d'une transmission au Parlement le 27 décembre 2022. Il est également disponible sur le site internet du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer. L'IGA a mené ses travaux en y associant toutes les parties prenantes. Elle relève notamment que le développement d'un volet maîtrise de la dépense est à encourager, en favorisant notamment les mutualisations. En matière de ressources, elle note que la contribution du bloc communal et son plafonnement à l'inflation pourraient être remis à plat pour tenir compte de l'évolution de la population et des risques. Ce rapport permet de nourrir les réflexions qui viennent de s'engager sur le modèle de financement des SIS. Par ailleurs, face à la hausse inédite des prix de l'électricité et afin d'en limiter les effets pour les établissements ne pouvant la compenser commercialement, l'article 181 de la loi de finances pour 2023 prévoit la mise en place d'une "compensation" électrique dont les modalités d'application sont détaillées dans le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022. Les SIS sont éligibles en leur qualité de personnes morales de droit public dont les recettes annuelles provenant de financements publics, taxes affectées, dons et cotisations sont supérieures à 50 % de leurs recettes totales. L'État prendra ainsi directement en charge auprès du fournisseur l'écart entre le prix de l'énergie du contrat et 180 €/MWh sur 50 % des volumes d'électricité consommés. Concernant le « malus écologique », seuls les véhicules de tourisme au sens de l'article L. 421-2 du Code des impositions sur les biens et services sont soumis à la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone (« malus écologique »). Ainsi, un certain nombre de véhicules en sont exclus : c'est le cas notamment des véhicules de catégorie M1 qui sont à usage spécial, des véhicules pick-up de moins de cinq places ou encore des véhicules de catégorie N2 ou N3 (véhicules de transport de marchandises de plus de 3,5 tonnes). C'est pourquoi les véhicules de lutte contre l'incendie, comme les ambulances sapeurs-pompiers ne sont pas soumis à cette taxe. Malgré cette exclusion déjà importante, il est apparu nécessaire d'aller plus loin, certains véhicules des services d'incendie et de secours, indispensables pour l'exercice de leurs missions opérationnelles, restant encore fortement taxés (ex : véhicules pick-up d'au moins cinq places et de véhicules de type 4X4). C'est la raison pour laquelle, depuis la publication de la loi de finances pour 2023, les véhicules hors route qui sont affectés aux besoins des missions opérationnelles des services d'incendie et de secours sont dorénavant exonérés de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone et de la taxe sur la masse en ordre de marche. A l'instar de l'abattement de malus prévu pour les familles nombreuses, cette exonération prendra la forme d'une demande de remboursement de la taxe auprès de l'administration fiscale. Ces mesures permettront d'offrir aux services d'incendie et de secours des marges de manœuvre supplémentaires pour acquérir des véhicules indispensables pour répondre à leurs besoins opérationnels croissants. Concernant la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), la France a choisi de limiter le bénéfice des taux réduits, permis par les articles 5 et 7 de la directive 2003/96/CE restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, aux exploitants de taxi et aux transporteurs routiers de marchandises ou de voyageurs. Les services d'incendie et de secours, exerçant une activité qui n'est pas soumise au droit commercial, ne peuvent pas prétendre à un remboursement partiel de la TICPE. Le droit appliqué est identique à celui décliné pour les forces armées et l'administration. Enfin, conformément aux annonces du Président de la République le 28 octobre dernier devant les acteurs de la sécurité civile mobilisés cet été, la loi de finances pour 2023 prévoit 150 millions d'euros en autorisation d'engagement et 37,5 millions d'euros de crédits de paiement pour renforcer les moyens opérationnels des services d'incendie et de secours dédiés à la détection et à la lutte contre les feux de forêt. Ces 150 millions d'euros s'ajoutent aux 30 millions d'euros prévus dans le cadre de la loi d'orientation de programmation du ministère de l'Intérieur (LOPMI) sur 5 ans au profit des « pactes capacitaires ». Cette ouverture de crédits concrétise l'engagement financier de l'Etat pour les collectivités territoriales, afin de faire cesser une rupture capacitaire ou favoriser une stratégie de mutualisation. Enfin, un renforcement des moyens aériens nationaux est également prévu. Ces investissements permettront d'augmenter significativement le nombre de vecteurs aériens pouvant être engagés dans la lutte contre les feux de forêts.