M. le président. La parole est à M. Jean Bacci, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Duffourg applaudit également.)
M. Jean Bacci. Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement a lancé, le 19 octobre dernier, les Assises de la forêt et du bois, sous l'égide de quatre ministères. La biodiversité devient un enjeu primordial et la décarbonation, un principe directeur des orientations budgétaires.
Nous craignons néanmoins que la lutte contre les incendies n'ait été oubliée. Pourtant, les conséquences des méga-feux sont considérables. L'incendie du Var a ravagé 7 000 hectares en quatre jours, produisant 325 000 tonnes de CO2, l'équivalent de six mois d'émissions dans les transports de l'agglomération marseillaise. Ce sont 650 000 tonnes de CO2 que la forêt ne stockera pas pendant les vingt premières années de sa régénération.
Il est important de pouvoir démultiplier les actions de prévention des collectivités territoriales, qu'il s'agisse du Pidaf (plan intercommunal de débroussaillement et d'aménagement forestier) ou du PPFCI (plan de protection des forêts contre les incendies), par une nouvelle réglementation et un financement complémentaire de l'État.
Le projet de loi de finances pour 2022 ne semble pas à la hauteur de l'enjeu. Au contraire, le contrat d'objectifs et de performance État-ONF (Office national des forêts) entraîne la disparition de 500 agents. En outre, au-delà de la confiscation de la DGF (dotation globale de fonctionnement), 30 millions d'euros supplémentaires seront demandés aux communes forestières entre 2023 et 2025.
Alors que la guerre du feu requiert des moyens aériens en adéquation avec la recrudescence des incendies sur le pourtour méditerranéen, notre flotte de Canadair est vieillissante. Son renouvellement est possible dans le cadre d'une commande collective permettant la réouverture des chaînes de production. L'Europe pourrait se doter alors d'une flotte d'appui aux pays méditerranéens, avant que l'inéluctable changement climatique n'affecte aussi des territoires plus septentrionaux.
Dans le cadre de la troisième convention des maires de la région Sud, j'ai fait part au président de la commission du développement régional du Parlement européen de cette nécessité de constituer une force d'intervention européenne.
Monsieur le Premier ministre, fort de ces constats, je souhaite vous poser deux questions. Le Gouvernement est-il prêt à intégrer la problématique du feu dans le cadre des Assises de la forêt et du bois, et à soutenir les collectivités dans la mise en œuvre des actions de prévention ? La présidence française de l'Union européenne peut-elle permettre d'engager la mise en place d'une flotte aérienne européenne de bombardiers d'eau, qui complétera et renforcera la nôtre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Vous nous interpellez, monsieur le sénateur Jean Bacci, sur la stratégie de lutte contre les incendies, notamment dans le cadre des Assises de la forêt et du bois, que nous venons effectivement d'ouvrir, avec Julien Denormandie et Agnès Pannier-Runacher, et qui nous occuperont pendant plusieurs mois. Je vous le confirme dès maintenant, nous aborderons bien évidemment la question des feux de forêt dans ce cadre.
Différents sujets seront effectivement examinés, du changement climatique aux réserves biologiques des espaces forestiers, à la dimension économique de la filière bois ou encore à la question, que vous avez mentionnée, des territoires dramatiquement touchés par ces incendies.
Mais nous n'avons évidemment pas attendu ces Assises pour agir. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous avons mené cet été une campagne de communication autour de la prévention, étant rappelé, comme vous le savez, que les comportements individuels sont à l'origine de 90 % des départs de feux et que la moitié d'entre eux sont dus à des imprudences. Il faut sans cesse le dire et alerter sur ce point.
Avec le ministre de l'intérieur, nous renforçons également les moyens de détection, en développant des systèmes plus efficaces pour faire remonter sans délai les premiers signaux de départs de feu et limiter la propagation.
Avec le ministre de l'agriculture, nous travaillons à rendre plus effectives les obligations légales de débroussaillement. Son ministère travaille aussi à la réalisation d'une cartographie nationale pour évaluer la sensibilité de la végétation forestière.
Nous attendons des Assises qu'elles nous permettent d'examiner la question de la résilience des forêts face au changement climatique. Celui-ci nous laisse effectivement craindre des événements de plus en plus nombreux et de plus en plus violents, dont il faudra protéger les biens et le milieu naturel. Un guide sera d'ailleurs prochainement publié sur la façon de rendre les bâtiments, notamment agricoles, plus résistants au feu.
Enfin, monsieur le sénateur, et je vous rejoins sur ce point, il faut une coopération internationale. Le nombre d'incendies que nous avons connus cet été à l'échelle européenne nous y invite. Malheureusement, le déplacement, de plus en plus fréquent, des incendies du sud au nord nous impose de nous organiser et de coopérer au niveau international. (M. François Patriat applaudit.)