"M. David Habib attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la pénurie de médicaments à laquelle sont confrontés les patients, les hôpitaux et les pharmaciens. Depuis 2019, le Gouvernement a présenté vingt-huit mesures pour « lutter contre les pénuries et améliorer la disponibilité des médicaments en France », s'inspirant des conclusions du rapport n° 737 (Sénat, 2017-2018) présenté le 27 septembre 2018 par la mission d'information du Sénat sur « les pénuries de médicaments et de vaccins », aujourd'hui, la situation ne s'est pas améliorée. En effet, elle s'est même encore aggravée depuis la fin de l'été 2019 et le début de la pandémie. Les patients, en France, ne peuvent plus suivre leur traitement. Les professionnels de santé n'ont pas plus de précisions. Devant une telle situation d'urgence, il lui demande quelles actions efficaces entend prendre le Gouvernement afin de permettre la continuité de légitimes soins à ces patients et de remédier à ce grave enjeu de santé publique."
"D'une façon générale, les ruptures de stock de médicaments ainsi que les tensions d'approvisionnement ont des origines multifactorielles susceptibles d'intervenir tout au long de la chaîne de production et de distribution. Dans ce cadre, les laboratoires pharmaceutiques sont tenus de prévenir et de gérer les ruptures de stock des médicaments et des vaccins qu'ils commercialisent. Ils doivent assurer un approvisionnement approprié et continu du marché national et prendre toute mesure utile pour prévenir et pallier toute difficulté d'approvisionnement. L'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est également mobilisée afin d'assurer la continuité de l'accès aux médicaments pour les patients et les professionnels de santé. Pour autant, compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, différents textes sont venus encadrer la gestion de ces ruptures. Dans un premier temps, la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé et son décret d'application du 20 juillet 2016 relatif à la lutte contre les ruptures d'approvisionnement de médicaments a introduit des mesures de prévention et de gestion des ruptures de stock au niveau national afin de redéfinir les instruments à la disposition des pouvoirs publics et de renforcer les obligations qui pèsent sur les acteurs du circuit de fabrication et de distribution. En ce sens, les laboratoires pharmaceutiques sont tenus d'informer sans délai l'ANSM de toute rupture ou risque de rupture de stock sur ces médicaments en précisant les délais de survenue, les stocks disponibles, les modalités de disponibilité et les délais prévisionnels de remise à disposition et l'identification de spécialités pouvant se substituer à la spécialité pharmaceutique en défaut. En outre, les entreprises exploitant ces médicaments sont contraintes d'élaborer et de mettre en œuvre des plans de gestion des pénuries (PGP) dont l'objet est de prévenir et de pallier toute rupture de stock de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM) mentionnés à l'article L. 5111-4 du code de la santé publique (CSP). Par ailleurs, l'ANSM est tenue de publier, sur son site internet (www.ansm.sante.fr), la liste des MITM ne disposant pas d'alternatives thérapeutiques appropriées ou disponibles en quantité suffisante pour lesquels une rupture ou un risque de rupture de stock est mis en évidence. Cette liste est accompagnée d'un certain nombre de documents d'information à l'attention des professionnels de santé et des patients, sur la situation relative à l'approvisionnement de la spécialité concernée ainsi que sur les mesures mises en œuvre pour assurer le traitement des patients. Enfin, le fait pour un laboratoire pharmaceutique de ne pas respecter ses obligations l'expose à des sanctions financières prononcées par l'ANSM. Dans le même sens, la méconnaissance pour un grossiste-répartiteur de ses obligations de service public vis-à-vis des patients français est également passible de sanction financière. Dans un deuxième temps, la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé a rendu possible le remplacement de médicaments par les pharmaciens d'officine en cas de rupture d'un MITM, facilitant ainsi la continuité du traitement des patients. Dans le prolongement de cette loi, le ministère des solidarités et de la santé a élaboré une feuille de route 2019-2022 pour lutter contre les pénuries et améliorer la disponibilité des médicaments en France. Cette feuille de route prévoit tout d'abord la diffusion d'une information adaptée sur la disponibilité des médicaments, des fournisseurs jusqu'aux pharmaciens et vers les patients. Elle prévoit également la mise en œuvre de mesures visant à relocaliser les fabricants de matières premières et de médicaments en Europe et en France. A cette fin, des actions seront menées pour améliorer l'attractivité financière de la France et du territoire européen. Le phénomène n'étant pas limité au seul territoire français, une meilleure coopération européenne doit être mise en place. Il est ainsi prévu d'expérimenter l'achat groupé de vaccins au niveau européen et de mettre en place un partage d'informations sur les causes et les conséquences des pénuries en Europe. Parmi les autres actions prévues figurent également des mesures visant à sécuriser les approvisionnements des établissements de santé, à renforcer les obligations des industriels en matière de PGP et à faciliter les échanges d'informations entre les acteurs de la chaîne de distribution du médicament. A cet égard, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a considérablement renforcé la lutte contre les ruptures de stock de médicaments par la mise en place d'un plan de gestion des pénuries pour chaque MITM, la constitution d'un stock de couverture des besoins en médicaments et l'importation des alternatives thérapeutiques dans certains cas de pénuries. Les sanctions financières entourant ces obligations ont été renforcées. Les modalités de ces obligations ont été précisées par le décret n° 2021-349 du 30 mars 2021 relatif au stock de sécurité destiné au marché national. A ce titre, le stock de sécurité doit être de deux mois de couverture des besoins pour les MITM et d'une semaine pour les autres médicaments. Ce stock de sécurité est porté à un mois pour les médicaments contribuant à une politique de santé publique définie par le ministre chargé de la santé. Toutefois, pour les MITM, le directeur général de l'ANSM peut décider, à la demande du titulaire de l'autorisation de mise sur le marché ou de l'entreprise pharmaceutique exploitant le médicament, de diminuer ce seuil si la durée de conservation de la spécialité est incompatible avec le seuil, la production de la spécialité est mise en œuvre de façon adaptée à chaque patient ou fabriquée à partir de produits d'origine humaine, la saisonnalité des besoins de la spécialité le demande ou si la spécialité est un gaz à usage médical. En outre, le directeur général de l'ANSM peut également décider pour les MITM d'augmenter le seuil du stock de sécurité lorsque la spécialité fait l'objet de risques de ruptures ou de ruptures de stock réguliers dans les deux années civiles précédentes nécessitant ainsi qu'un stock supérieur à deux mois soit constitué, sans excéder quatre mois de couverture des besoins. Ces stocks de sécurité doivent être mentionnés dans les PGP élaborés par les industriels tout comme les risques relatifs au cycle de fabrication et de distribution de la spécialité concernée et la liste des spécialités pouvant constituer une alternative à la spécialité en défaut, le cas échéant. En outre, les PGP peuvent prévoir d'autres sites de fabrication de matières premières à usage pharmaceutique et d'autres sites de fabrication des spécialités pharmaceutiques. Enfin, le Gouvernement a présenté, le 18 juin 2020, un plan d'action pour la relocalisation en France de projets de recherche et de sites de production de produits de santé. A ce titre, des initiatives destinées à favoriser la recherche française ont vu le jour notamment dans le cadre de la lutte contre la COVID-19. Par ailleurs, près de 200 millions d'euros ont été mobilisés pour développer les industries de santé et soutenir la localisation des activités de recherche et de production en France dans le cadre de la lutte contre la COVID-19. Cette enveloppe sera réévaluée en 2021 pour financer de nouveaux projets. En outre, un travail d'accompagnement vers l'industrialisation, la production et le stockage des produits de santé en France est en cours de réalisation. A cet égard, sur la base du rapport commandé à Jacques Biot par le Gouvernement en 2019, le Comité stratégique de filière (CSF) des « Industries et Technologies de Santé » va élaborer un plan d'actions reposant sur le recensement de projets industriels pouvant faire l'objet de relocalisations. Enfin, la Commission européenne a élaboré une proposition de règlement relatif à un rôle renforcé de l'Agence européenne des médicaments (EMA) dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux afin permettre une gestion centralisée des ruptures de stock, en cas de crise sanitaire. A ce titre, la Commission propose de surveiller et atténuer les effets des pénuries potentielles et réelles de médicaments et de dispositifs médicaux considérés comme critiques pour répondre à une urgence de santé publique ou à d'autres événements majeurs susceptibles d'avoir une incidence grave sur la santé publique. A cet égard, il est proposé de créer, au sein de l'EMA, les structures appropriées afin de faciliter la surveillance et la notification des pénuries. En outre, il est prévu que l'EMA puisse demander et obtenir des informations auprès des titulaires d'autorisations de mise sur le marché (AMM), des fabricants et des Etats membres concernés afin de prévenir ou d'atténuer les effets de pénuries au sein de l'Union européenne."