Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé et des sports. Elle concerne l'appréciation de la pandémie de grippe A/H1N1 et l'état de préparation de notre pays face à celle-ci.
Mme la ministre de la santé a annoncé hier l'achat par la France de 94 millions de doses de vaccin, le tout pour un montant de un milliard d'euros, auprès de trois laboratoires pharmaceutiques. Si de tels chiffres peuvent laisser penser que le problème est maîtrisé par le Gouvernement, ils démontrent surtout que la propagation du virus au dernier trimestre de l'année 2009 représente une menace bien réelle pour la population française, contrairement à toutes les déclarations rassurantes entendues jusqu'à présent.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mme Bachelot-Narquin va régler tout cela !
M. Jean Milhau. Bien que l'Organisation mondiale de la santé ait décidé de déclarer l'état de pandémie, la France maintient son niveau d'alerte actuel, compte tenu, nous dit le Gouvernement, du faible nombre de cas avérés de grippe A dans notre pays.
Or tout porte croire que la pandémie de grippe A est très largement sous-estimée. L'Institut de veille sanitaire indiquait hier, 15 juillet, que 628 cas avaient été identifiés sur le territoire français, dont 481 cas confirmés et 147 « probables ». Quel crédit accorder à ces données chiffrées ?
Selon une étude qui vient tout juste de paraître dans une revue médicale britannique, le nombre de cas de grippe A - de même que le taux de mortalité lié à cette maladie - serait bien plus élevé que ne l'indiquent les statistiques officielles. Nombre de malades infectés ne sont pas recensés comme tels. Dès lors, la propagation du virus serait bien supérieure aux annonces et les risques de voir s'étendre la pandémie sont multipliés d'autant, faute de précautions suffisantes et adaptées à la réalité.
Plus grave encore, l'absence de données fiables retarde la prise en compte de la mutation du virus.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean Milhau. Or nous sommes à quelques semaines de la fin de l'été et des premiers rhumes automnaux.
Dans ces conditions, comment notre pays entend-il emporter la course de vitesse qui s'engage entre propagation du virus et mise à disposition du vaccin ? Pour gagner du temps, Mme la ministre de la santé envisage-t-elle de mettre sur le marché un vaccin qui n'aurait pas été évalué selon les protocoles en vigueur ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Enfin, pourquoi ne pas admettre devant la représentation nationale que la grippe A est une pandémie très largement sous-estimée dans notre pays ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Vous avez raison, monsieur le sénateur : il s'agit d'un sujet majeur de santé publique. Le passage en phase 6, décidé par l'Organisation mondiale de la santé, signifie que le monde est bel et bien confronté à une pandémie grippale, ce que le Gouvernement ne conteste absolument pas.
Où en sommes-nous ?
Depuis le début de la pandémie, notre pays a recensé environ 600 cas, principalement importés, sans aucun décès lié à cette maladie. Il faut sans doute y voir le résultat des mesures qui ont été prises et dont nous avons pu mesurer l'efficacité voilà quelques jours, lors de l'apparition de cas à Megève. Nous avions donné des instructions aux préfets quelques jours auparavant et leur mise en œuvre s'est soldée par un succès.
Que faisons-nous face à l'évolution de cette pandémie ? Nous avons pris trois mesures.
Tout d'abord, le dispositif de protection et de vaccination est activé.
Grâce aux décisions prises par Roselyne Bachelot-Narquin et Michèle Alliot-Marie, la France dispose d'ores et déjà de un milliard de masques anti-projections et de 723 millions de masques de protection. Par ailleurs, 33 millions de traitements antiviraux sont disponibles et 94 millions de doses de vaccin ont été commandées afin de couvrir, dès que le vaccin sera disponible, les besoins de la population. Ce dernier chiffre s'explique par le fait qu'il faudra procéder dans certains cas à deux vaccinations.
Ensuite, nous adaptons notre dispositif sanitaire à l'évolution de la pandémie.
La cellule interministérielle de crise a décidé hier que, dès le 23 juillet, les malades seront pris en charge par la médecine libérale, afin que soit assuré un suivi médical de proximité. Des instructions précises ont été adressées dès aujourd'hui aux préfets concernant la mise en place de cette mesure.
Enfin, nous mobilisons l'ensemble des acteurs de proximité.
Sous l'autorité de M. le Premier ministre et à la demande du Président de la République, j'ai réuni hier tous les préfets des départements ainsi que les préfets de zone. Je leur ai donné des instructions afin qu'ils s'assurent que les plans de continuité d'activité sont dès à présent opérationnels, car c'est notre principal défi à l'heure actuelle. Le deuxième objectif que j'ai assigné aux préfets est de prendre contact avec les élus locaux, et tout d'abord avec les maires, qui sont les premiers acteurs concernés.
Nous ne devons pas inquiéter inutilement la population, mais nous lui devons la vérité. C'est en agissant ensemble, en mobilisant l'État, les collectivités locales, les entreprises et la société civile que nous apporterons la réponse la plus efficace, indispensable pour lutter contre cette pandémie bien réelle. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)