M. François Brottes souhaiterait attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les difficultés d'application des dispositions de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques pour ce qui touche aux syndicats intercommunaux à vocation multiple assurant une mission de production ou de stockage de l'eau. En effet, suite à l'entrée en vigueur de la loi sur l'eau susvisée, la mise à jour des statuts des établissements publics de coopération intercommunale ayant compétence en matière d'eau donne lieu à des divergences d'interprétation quant à la portée des dispositions des articles L. 2224-7 et L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales relatifs au service public d'eau potable et d'assainissement, qui prévoient que ce service public recouvre, à titre obligatoire, la distribution d'eau potable et l'établissement d'un schéma de distribution d'eau potable déterminant les zones desservies par le réseau de distribution et, à titre facultatif, la production d'eau potable, son transport et son stockage, ainsi que la protection du point de prélèvement. D'après la jurisprudence, la circonstance qu'un syndicat intercommunal d'adduction d'eau ait pour mission la construction et l'exploitation d'un réseau de distribution d'eau potable n'a pas pour objet ou pour effet "de conférer au syndicat intercommunal une compétence exclusive qui aurait fait obstacle, notamment, à la possibilité pour celles des communes membres qui disposaient d'installations affectées à l'alimentation de leurs habitants en eau potable d'en poursuivre l'exploitation" (CE, 31 juillet 1996, commune de Sète). De plus, aucune disposition législative ou réglementaire ne détermine les compétences minimales dont un syndicat intercommunal devrait être doté, ce qui laisse en droit la libre faculté aux communes associées de choisir librement l'étendue des compétences qu'elles confient, en tout ou partie, à un tel syndicat. Ceci posé, plusieurs interrogations demeurent, notamment en zone de montagne, quant au transfert de compétences à opérer et au régime de responsabilité engagé dès lors que plusieurs fournisseurs d'eau potable alimentent une même commune, parfois elle-même détentrice d'une source d'eau locale. Dans ce cas, les services de l'État tendraient à inciter les communes à transférer l'ensemble de la compétence de production d'eau à un seul syndicat, à l'exclusion des autres, ce qui parfois ne peut être envisageable au regard des contraintes géographiques et territoriales. Par ailleurs, en cas de recours communal à une eau de source locale, des interrogations subsistent, nonobstant la jurisprudence susvisée, quant au caractère optionnel ou obligatoire du transfert de l'eau de source au syndicat auquel la commune a délégué sa compétence de production d'eau. En cas de transfert de la compétence de stockage se pose également le problème de la définition du régime de responsabilité pour ce qui touche à la sécurité, à l'entretien, et à la surveillance des réservoirs communaux et, surtout, en cas de pollution d'un réservoir alimenté par des eaux provenant de fournisseurs différents. En outre, aucune disposition ne semble prévoir les modalités de construction d'un nouveau réservoir en cas de hausse de la population de la commune ayant transféré sa compétence, en cas de désaccord entre la commune et le syndicat. Enfin, au sujet de la fourniture d'eau de secours, fixée par convention, la définition du terme « secours » peut poser problème en période de sécheresse, et appelle a priori une clarification de nature réglementaire distinguant l'appoint du secours. Aussi lui demande-t-il ses lumières sur le problème général du transfert des compétences de production et de stockage de l'eau en cas de multiplicité des fournisseurs d'eau, y compris en cas de présence d'une source d'eau locale, et en particulier lorsque ce transfert s'opère en faveur de syndicats intercommunaux à vocation multiple, ainsi que sur ce qui peut être envisagé pour améliorer le régime du service public de l'eau en termes de clarification des régimes de responsabilité entre les communes et leurs fournisseurs d'eau.
L'article L. 2224-7-I du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que : « Tout service assurant tout ou partie de la production par captage ou pompage, de la protection du point de prélèvement, du traitement, du transport, du stockage et de la distribution d'eau destinée à la consommation humaine est un service d'eau potable ». L'article L. 2224-7-1 du CGCT dispose par ailleurs que : « Les communes sont compétentes en matière de distribution d'eau potable. Dans ce cadre, elles arrêtent un schéma de distribution d'eau potable déterminant les zones desservies par le réseau de distribution. Elles peuvent également assurer la production d'eau potable, ainsi que son transport et son stockage. Toutefois, les compétences en matière d'eau potable assurées à la date de publication de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques par des départements, des associations syndicales autorisées ou constituées d'office ne peuvent être exercées par les communes sans l'accord des personnes publiques concernées. » La mention, « tout ou partie », à laquelle se réfère l'article L. 2224-7-I du CGCT, vise à admettre que la compétence « eau » n'est pas systématiquement exercée sous forme de bloc par une seule personne et que chaque composante du service peut isolément constituer elle-même un service d'eau potable. Ainsi, elle ne désigne pas nécessairement solidairement toutes les composantes citées par ce même article (production, protection, traitement...) mais permet la constitution de plusieurs services sur chacune d'entre elles. Concernant la question du recours communal à une source d'eau locale, le caractère optionnel ou obligatoire du transfert de l'eau de source au syndicat auquel la commune a délégué sa compétence de production d'eau dépend de la clé de répartition établie entre la commune et le syndicat, figurant dans les statuts de ce dernier. Si le transfert de la compétence « production d'eau » est définie de manière globale, la commune est dessaisie de cette compétence. En revanche, les statuts peuvent prévoir que le syndicat n'est compétent que sur une partie du territoire de la collectivité, auquel cas la commune resterait compétente pour le reste de son territoire. Celle-ci pourrait alors soit transférer cette compétence à un autre syndicat, soit l'exercer elle-même. En ce qui concerne la sécurité, l'entretien et la surveillance des réservoirs communaux, il s'agit là encore d'une compétence optionnelle des syndicats d'eau. Néanmoins il convient de rappeler que le CGCT n'autorise pas de distinction entre l'investissement et le fonctionnement, ces deux aspects de l'exercice d'une compétence devant être exercés par la même personne morale (art. L. 1321-1 et suivants du CGCT). Au cas particulier, il s'agit de déterminer dans quel cadre le syndicat intervient dans ce domaine. Si la compétence de gestion des réservoirs communaux lui a bien été transférée, le syndicat sera alors responsable du réservoir communal, en revanche, si celui-ci intervient par voie de délégation de service public et ce dans le respect des règles de la concurrence, c'est la commune qui sera responsable des dommages pouvant être occasionnés. Enfin, concernant la création d'un nouveau réservoir, si une commune a transféré sa compétence « stockage » à un syndicat, celle-ci ne peut plus disposer du réservoir, car elle l'a automatiquement mis à disposition et n'est plus non plus compétente pour la construction d'un nouveau réservoir. Néanmoins, cette commune qui est représentée au sein du syndicat peut faire la demande à celui-ci de construire un nouveau réservoir, les décisions obéissant aux règles de majorité correspondant à la nature du syndicat en question. Plus généralement, si des contraintes historiques ont conduit à mettre en place une gestion segmentée de l'eau à travers plusieurs syndicats, dans le but d'offrir aux usagers le meilleur niveau de service, il convient aujourd'hui de s'interroger sur la pertinence d'une telle organisation. En effet dans un souci de rationalisation des structures administratives et ce afin d'assurer une plus grande lisibilité de l'action publique, il conviendrait de réunir au sein d'une même structure l'ensemble de ces missions, afin notamment d'anticiper la survenue des difficultés évoquées ci-dessus.