M. Jean-Marc Zulesi interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la question des obligations légales de débroussaillage (OLD) et, plus particulièrement, sur leur application. On entend par débroussaillage les opérations de réduction des combustibles végétaux de toute nature dans le but de diminuer l'intensité et de limiter la propagation des incendies. Ce dispositif est un maillon essentiel de la lutte contre les feux de forêts, lesquels ravagent chaque été des milliers d'hectares de forêt dans différentes régions de France. Ainsi, on relève dans les Bouches-du-Rhône, sur les 20 dernières années, une moyenne annuelle de 200 départs de feu et de 1 500 hectares parcourus par les flammes. Cette situation est appelée à s'aggraver du fait du réchauffement climatique. L'obligation légale de débroussaillage est fixée par l'article L. 134-6 du code forestier, créé par l'ordonnance n° 2012-92 du 26 janvier 2012. Cette obligation est également complétée par des arrêtés préfectoraux selon les spécificités des départements concernés. L'article dispose que toutes les constructions situées à moins de 200 mètres doivent faire l'objet d'un débroussaillage sur une profondeur de 50 mètres, qui peut être, sur décision du maire, portée à 100 mètres. Or on constate aujourd'hui sur le terrain des sautes de feu à plus de 800 mètres, ce qui constitue une distance beaucoup plus grande que les 200 mètres de périmètre de débroussaillage prévu par la loi. De plus, il est nécessaire que les OLD soient réellement respectées, ce qui ne semble pas toujours être le cas selon certains acteurs locaux. Dans ces conditions, il souhaiterait connaître les dispositifs incitatifs ou contraignants auxquels il songe pour faire respecter les OLD mais aussi les éventuels dispositifs complémentaires envisagés dans la lutte contre les feux de forêt.
La forêt couvre le tiers de la surface du département des Bouches-du-Rhône (175 000 ha). Compte tenu du climat et de la végétation méditerranéenne, les massifs forestiers sont particulièrement vulnérables au risque d'incendie. Sur les 20 dernières années (1998-2017), une moyenne annuelle de plus de 200 départs de feu menaçant les massifs pour près de 1 300 hectares parcourus par les flammes, a été relevée dans ce département. Chaque été, c'est l'ensemble du sud de la France qui se trouve sous la menace des flammes. Face à ces risques, l'État conduit, avec les collectivités territoriales et les associations de propriétaires forestiers concernés, une politique de prévention des feux de forêts ambitieuse et déterminée avec notamment l'équipement, l'aménagement et l'entretien de l'espace forestier. Cette stratégie nationale globale concerne la réglementation de l'emploi du feu, la limitation de l'accès aux massifs, les dispositifs de surveillance et de guet, la création d'équipements de lutte contre les feux, l'attaque rapide des feux naissants, etc. L'efficacité de cette politique repose également sur la vigilance et l'implication des particuliers. En ce qui concerne l'État, la lutte contre les incendies de forêts exigeant un accès facile des massifs par les véhicules de prévention et de lutte incendie, il est nécessaire d'assurer un réseau de pistes spécialisées : les pistes DFCI (Défense de la Forêt contre les Incendies). Le code forestier prévoit l'établissement de servitudes de passages et d'aménagement sur ces pistes qui permettent, outre la pérennisation et la sécurisation des pistes, la gestion et l'entretien des équipements DFCI (barrières, citernes, poteaux incendie, etc.). Le code forestier prévoit en outre que les départements concernés établissent un plan départemental de protection des forêts contre l'incendie (PDPFCI) qui a pour objectifs la diminution du nombre de départs de feux de forêts, la réduction des surfaces brûlées, ainsi que la prévention des risques d'incendies et la limitation de leurs conséquences (L. 133-2 du code forestier). Le PDPFCI des Bouches-du-Rhône a été approuvé le 14 mai 2009 pour une durée de 7 ans (conformément au code forestier) et prorogé de 3 ans par l'arrêté préfectoral du 12 avril 2016. Le débroussaillement auprès des constructions fait partie intégrante de cette stratégie globale et repose sur l'action des particuliers. Il permet à la fois de lutter contre les feux de forêt et de protéger les habitations menacées et leurs occupants. Il consiste à éclaircir la végétation autour des constructions dans le but de diminuer l'intensité et la propagation des incendies. Il ne vise pas à faire disparaître l'état boisé et il n'est ni une coupe rase, ni un défrichement. C'est une obligation légale pour chaque citoyen, encadrée par l'article L. 134-6 du code forestier. A proximité des massifs forestiers cette mesure doit également être réalisée le long des voies de circulation ouvertes au public, sous les lignes de transport d'énergie, le long des voies ferrées et incombe alors aux propriétaires des installations. Le ministère en charge des forêts intervient en matière de prévention des incendies selon quatre axes :prévoir le risque (prévision météo, réseau hydrique, etc.) et traiter les causes (obligations légales de débroussaillement, etc.) ;surveiller les forêts pour détecter les départs de feux et intervenir rapidement (patrouilles, guets) ;équiper (pistes, hydrants, etc.), aménager et entretenir l'espace rural dont l'espace forestier (coupures de combustible, etc.) ;informer le public et former les professionnels (brûlage dirigé, retour d'expérience, recherche des causes et circonstances d'incendies, etc.). Les obligations légales de débroussaillement (OLD) constituent un maillon essentiel de la prévention et leur respect est inconditionnel. L'article L. 135-1 du code forestier prévoit des sanctions : « En cas de violation constatée de l'obligation de débroussailler [...] et indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, le maire ou [...] le représentant de l'État dans le département met en demeure la personne tenue à l'obligation de débroussailler d'exécuter les travaux de débroussaillement ou de maintien en état débroussaillé dans un délai qu'il fixe. Lorsque cette personne n'a pas procédé aux travaux prescrits […] le maire saisit l'autorité administrative compétente de l'État, qui peut prononcer une amende dont le montant ne peut excéder 30 euros par mètre carré soumis à l'obligation de débroussaillement. » Dans le département des Bouches-du-Rhône, plus de 250 000 constructions individuelles sont concernées par les OLD. La préfecture a réalisé un retour d'expérience du feu qui a touché Châteauneuf-les-Martigues, Carry Le Rouet et Sausset-les-Pins, le 24 juillet 2010. Il permet de mesurer l'importance pour les particuliers de respecter strictement les OLD et de suivre les recommandations des services préfectoraux. Le Gouvernement ne prévoit pas d'étendre le dispositif au-delà des 200 m : les sautes de feux exceptionnelles dues à une conjonction de vents violents et de sécheresse de végétation ne peuvent être évitées. Une application sans faille des OLD telle que préconisée par la mission d'inspection interministérielle de 2016 et une bonne complémentarité entre prévention et lutte sont à même de limiter le développement de feux de forêts. La politique d'extinction des feux naissants, par nature interministérielle et multipartenariale, doit s'accompagner d'une vigilance de tous les instants et d'une éducation aux risques de nos concitoyens : 9 feux de forêts sur 10 sont d'origine anthropique. La prévention constitue donc la clé de voûte qui, en empêchant les feux de se développer, permet aux biens d'être préservés, aux richesses et diversités naturelles d'être protégées et, surtout, à des vies – particuliers ou sapeurs-pompiers – d'être sauvées. Enfin, quelle que soit l'origine des feux, l'irresponsabilité des incendiaires se traduit par une responsabilité pénale de leurs actes. Ainsi, en 2017, 72 personnes ont été entendues, mises en cause et certaines condamnées, pour imprudence ou acte criminel. Il appartient donc à chacun de veiller au respect des OLD et des règlements locaux. Le principe énoncé dans la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, qui fait du citoyen le premier acteur de la sécurité civile par son action de vigilance et sa sensibilisation aux risques, trouve, dans la lutte contre les feux de forêt, toute sa portée et sa pertinence.