L’Assemblée nationale a adopté, en première lecture, le 10 mars, le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Les députés ont cherché, souvent avec l’accord du gouvernement, à atteindre un moyen terme entre le projet d’origine et le texte voté par le Sénat. Et ont parfois, de ce fait, mis en place des mécanismes d’une grande complexité.
C’est le cas, par exemple, sur le seuil minimal de population des intercommunalités. Le gouvernement voulait 20 000 habitants. Le Sénat avait supprimé tout seuil pour permettre une adaptation au terrain. Les députés l’ont rétabli en déterminant quatre cas dans lesquels il pourrait être adapté, sans pouvoir être inférieur à 5 000 habitants. « Quelle extraordinaire simplification ! », avait ironisé, juste après le vote de l’article en cause, André Laignel, premier vice-président de l’Association des maires de France. Ainsi, la première de ces dérogations concerne le cas où la densité démographique d’un projet de périmètre d’un EPCI « est inférieure à la moitié de la densité démographique moyenne des départements, au sein d’un département dont la densité démographique est inférieure à cette densité moyenne ; le seuil démographique applicable est alors déterminé en pondérant le nombre de 20 000 habitants par le rapport entre la densité démographique du département auquel appartiennent la majorité des communes du périmètre et la densité moyenne des départements ».
Toujours sur l’intercommunalité, les députés ont rétabli le calendrier de refonte de la carte intercommunale prévu par le projet du gouvernement (achèvement fin 2016). Mais ils ont apporté quelques limites aux pouvoirs du préfet qui, par exemple, ne pourra imposer sa volonté aux communes sur la création d’un EPCI que sur avis favorable de la commission départementale de la coopération intercommunale. Au grand dam de l’Association des maires de France, la notion d’intérêt communautaire est supprimée pour les compétences obligatoires des communautés. Mais elle est maintenue pour les compétences facultatives. La définition de cet intérêt ne devrait plus nécessiter qu’une majorité simple de l’organe délibérant, tandis qu’une majorité qualifiée (au lieu de l’unanimité) suffira pour l’unification des impôts sur les ménages. Autre sujet de mécontentement pour les maires, les organes délibérants des communautés et des métropoles devraient être élus au suffrage universel direct « suivant des modalités particulières fixées par la loi avant le 1er janvier 2017. »
La recherche du moyen terme se retrouve également sur la question des départements. Les députés leur ont laissé deux compétences que voulait, à l’origine, leur enlever le gouvernement au profit des régions : les collèges et les routes. Mais, pour les premiers, régions et départements sont invités à conclure des conventions fixant des modalités d’action communes et de mutualisation des services. Pour les secondes, les régions pourront financer les itinéraires d’intérêt régional. Les transports scolaires devraient, en revanche, bien revenir aux régions qui pourront en confier l’organisation non seulement aux départements, mais aussi à des communes, des EPCI, des syndicats mixtes, des établissements d’enseignement et même des associations de parents d’élèves ou associations familiales.
Le retour du Haut conseil des territoires
Le projet NOTRe version Assemblée voit également le grand retour du Haut conseil des territoires, cet organe de concertation entre l’État et les collectivités territoriales dont le Sénat avait obtenu qu’il soit supprimé du projet de loi MAPTAM. Et, comme l’avaient annoncé, il y a quelques semaines, les ministres Bernard Cazeneuve et Marylise Lebranchu, il prévoit la création, au 1er janvier 2018, d’une collectivité territoriale unique en Corse. Un autre amendement revoit les règles de fonctionnement du fonds de soutien aux collectivités victimes d’emprunts toxiques. Le plafond de l’aide est porté à 75 % de l’indemnité de remboursement anticipé, afin de secourir celles qui ont eu la mauvaise idée de souscrire un emprunt indexé sur le franc suisse.
Parmi les dispositions rétablies par les députés, on notera encore celles relatives à l’accessibilité des services au public. De même est réapparue la possibilité pour l’État de « refacturer » aux collectivités territoriales responsables les condamnations prononcées à l’encontre de la France par la Cour de justice de l’Union européenne. Elle a toutefois été entourée de garanties, avec notamment l’intervention d’une commission composée de membres du Conseil d’État et de la Cour des comptes ainsi que de représentants des collectivités. On notera, enfin, l’adoption d’une série d’amendements reprenant des propositions de simplification du fonctionnement des collectivités territoriales issues du rapport Doligé de 2011.
par Marie-Christine de Montecler le 13 mars 2015 pour Dalloz actualités