L’Assemblée nationale est saisie d’un projet de loi autorisant la ratification de la Convention n° 190 de l’Organisation internationale du travail (OIT) relative à l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail.
Si « la violence et le harcèlement au travail sont un domaine de préoccupation récent à l’échelle internationale », ce phénomène, non encore bien délimité (manque de données), semble massif et affecter majoritairement les femmes (violences sexistes et sexuelles). Il semble que la pandémie de la Covid-19 a été « un facteur multiplicateur des violences ». Ces violences ont pris une autre forme avec la généralisation du télétravail : « le contrôle excessif des heures de connexion, l’envoi de courriels irrespectueux, les appels ou messages en dehors des horaires de travail ou l’exclusion des réunions en ligne ».
Ces violences représentent un coût pour les travailleurs et travailleuses victimes mais aussi « pour la société et pour les entreprises elles-mêmes ».
Pour le rapporteur, la convention n° 190 qui, a été rédigée à la suite du mouvement « # Me Too », apporte des réponses « à la fois ambitieuses et équilibrées ». Comme il a été relevé, il s’agit de la « première norme internationale qui vise à mettre un terme à la violence et au harcèlement dans le monde du travail, y compris la violence et le harcèlement fondés sur le genre ».
Elle définit au préalable les notions de violence et de harcèlement au travail. Les violences visent « toutes les formes d’atteintes, volontaires ou involontaires, à l’intégrité physique ou psychique d’une personne, sans que ne soit nécessairement exigé un critère de répétition de l’acte ». Dans son champ, on trouve les violences à caractère sexuel (agressions sexuelles, viols). Le harcèlement se distingue par sa répétition car c’est le caractère répétitif qui créé « un sentiment d’épuisement, une baisse de l’estime et des conséquences sur la santé mentale ». Il « se traduit le plus souvent par des attaques verbales, des menaces, des propos obscènes, ou d’autres formes d’agissements portant atteinte aux droits et à la dignité de l’individu visé ». La particularité du harcèlement au travail est qu’il peut prendre deux formes. Il y a :
- D’un côté, « le harcèlement moral qui se manifeste fréquemment par des surcharges ou des privations de travail, des instructions dans la vie privée, des propos calamiteux ou des critiques incessantes ayant pour but d’humilier la victime » ;
- D’un autre, « le harcèlement sexuel qui se distingue par une pression grave, répétée ou non, dans le but d’obtenir un acte de nature sexuel ou par des propos ou comportements à connotation sexuelle, non désirés et répétés ».
Cette convention a vocation à s’appliquer à tous les travailleurs quel que soit leur statut, leur secteur (public ou privé), les personnes en formation (dont les stagiaires et les apprentis), les bénévoles et les demandeurs d’emploi. Elle précise que les violences doivent être commises « à l’occasion, en lien avec ou du fait du travail » ; ce sont les violences exercées « sur le lieu du travail, les lieux de repos, les déplacements, les trajets entre le domicile et le travail, les formations, les communications liées au travail et le logement fourni par l’employeur ».
Ce texte « promeut une réponse globale pour lutter contre ce phénomène, de la formation des managers à l’accompagnement des victimes, en passant par la prévention, la protection et la garantie de moyens de recours et de réparation ». En effet, la convention ne se contente pas de protéger les travailleurs contre les violences au travail avec une spécificité pour les femmes, elle tend « à atténuer l’impact de la violence domestique dans le monde du travail ».
Ce texte « appelle par ailleurs à une vigilance renforcée à l’égard des travailleurs les plus exposés à la violence du fait de leur appartenance à certains groupes vulnérables, de leurs conditions de travail ou de leurs secteurs d’activité ».
Le rapporteur est ainsi favorable à la ratification de cette convention internationale. Cette ratification est souhaitée par l’ensemble des acteurs sociaux : les syndicats, les ONG, les associations féministes. Un débat s’est élevé à la suite de l’analyse du gouvernement selon laquelle la France serait déjà au niveau de la convention n° 190. Pour les acteurs cités, « plusieurs mesures nationales sont rendues nécessaires » pour être en conformité avec ladite convention, mais aussi la recommandation n° 206 sur la violence et le harcèlement (2019). La recommandation n° 206 complète la convention n° 190. Elle liste un certain nombre de mesures parmi lesquelles « un congé pour les victimes de violence domestique, une protection temporaire contre le licenciement et un système d’orientation vers les dispositifs publics visant à atténuer la violence domestique ». Le rapporteur ne souhaite pas trancher ce débat. Pour lui, il revient aux partenaires sociaux de se prononcer lors des négociations à venir. D’ailleurs, la convention n° 190 ne conçoit pas sa mise en œuvre sans la participation active des acteurs sociaux.