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DEGRADATION INVOLONTAIRE PAR EXPLOSION OU INCENDIE

Chapo
Source : Dalloz Actualités
Texte

Le délit de dégradation involontaire par explosion ou incendie, prévu et réprimé par l’article 322-5 du code pénal, ne peut être caractérisé qu’en cas de manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement. Par conséquent, l’infraction n’est pas consommée si l’incendie résulte de la méconnaissance des dispositions de l’article 1728 du code civil, lequel impose notamment au preneur d’user de la chose louée en bon père de famille, cet article n’édictant pas d’obligation de sécurité ou de prudence au sens de l’article 322-5 précité.

L’article 322-5 du code pénal réprime d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende la destruction, la dégradation ou la détérioration involontaire d’un bien appartenant à autrui par l’effet d’une explosion ou d’un incendie provoqués par manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Il s’agit d’une infraction non intentionnelle : la faute en constitue l’élément moral. Pour autant, toute faute n’est pas prise en compte. Alors que l’article 121-3 du code pénal prévoit de manière générale qu’il y a délit « en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement », l’article 322-5 du même code, quant à lui, restreint l’élément moral du délit de dégradation involontaire par explosion ou incendie au seul manquement à une obligation de prudence ou de sécurité légalement prévue. C’est ce que rappelle l’arrêt rendu par la chambre criminelle le 18 janvier 2012.

En l’espèce, un incendie s’est déclaré dans les combles d’un immeuble, après qu’une cigarette mal éteinte eut été jetée par la fenêtre par un locataire. Ce dernier est alors poursuivi devant le tribunal correctionnel pour dégradation involontaire par explosion ou incendie, et déclaré coupable des faits, ce que confirme la cour d’appel, au motif que le locataire a méconnu les dispositions de l’article 1728 du code civil, aux termes desquelles le preneur est notamment tenu d’user de la chose louée en bon père de famille. Toutefois, la Cour de cassation censure le raisonnement.

Elle énonce que « le délit de dégradation involontaire par explosion ou incendie ne peut être caractérisé qu’en cas de manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ». Ainsi, une simple faute d’imprudence ou de négligence ne suffit pas à consommer le délit. Il est nécessaire de vérifier la présence d’un manquement à une obligation légale de prudence ou de sécurité, c’est-à-dire à une « obligation préalablement prévue par un texte légal ou réglementaire et imposant le respect de normes de sécurité ou de prudence dans le cadre d’activités particulières » (V. Rep. pén., Destructions-Dégradations-Détériorations, par Viriot-Barrial). À défaut, l’infraction n’est pas caractérisée. Une telle solution est conforme à la lettre du texte, lequel mentionne expressément la nécessité d’un tel manquement, et se trouve rappelée par la jurisprudence. Ainsi, dans une affaire similaire ayant donné lieu à un arrêt de 2010, où un salarié avait fumé dans le local où il travaillait et avait abandonné son mégot de cigarette sans l’éteindre sur un parquet en bois et à proximité d’un amoncellement de cartons, l’infraction n’avait pas été caractérisée, nulle obligation préalablement prévue par un texte légal ou réglementaire n’ayant été violée (Crim. 12 janv. 2010, Bull. crim. n° 3 ; AJ pénal 2010. 239, obs. J. Lasserre Capdeville ; Dr. pénal 2010. Comm. 44, obs. Véron ; Procédures 2010. Comm. 131, obs. Chavent-Leclere).

Or, dans l’arrêt étudié, la Cour de cassation relève que l’article 1728 du code civil, dont les dispositions avaient été méconnues par le locataire défaillant, « n’édicte pas d’obligation de sécurité ou de prudence au sens de l’article 322-5 du code pénal ». En effet, cet article se contente d’imposer au preneur, notamment, « d’user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention ». Dès lors, l’élément moral de l’infraction n’étant pas caractérisé, l’infraction ne peut se voir réprimée.

par M. Bombled

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