Portail National des Ressources et des Savoirs

L’actualité jurisprudentielle en lien avec la sécurité civile et la pandémie de Covid-19

Nom de l'expert
Touache
Prénom de l'expert
Alexia
Fonction de l'expert
Elève-avocate
Chapo du commentaire
-
Texte du commentaire

Présentation :

Sur les quelques avis et décisions présentés, on retiendra :

- la décision du Conseil constitutionnel qui a estimé que l’obligation de transparence financière incombant à tous les syndicats représentatifs ou non ne porte pas atteinte de manière disproportionnée à la liberté syndicale ;

- ou encore l’avis du Conseil d’État à propos du délai de caducité des plans d'occupation des sols.

----------

.

CONSTITUTIONNALITÉ

.

.

Le Conseil d’État a été saisi, le 30 avril 2020, pour avis, du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Le Conseil d’État a considéré que le projet répondait « globalement, dans les circonstances de la crise sanitaire et de l’urgence dans laquelle elle a été réalisée » et qu’il se justifiait au regard des données scientifiques et de l’incertitude quant à l’évolution de la situation actuelle.

La Haute juridiction a émis toutefois quelques observations à commencer par le titre même du projet. Elle a estimé préférable de renommer le projet avec un titre plus explicite : « sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 23 juillet 2020 inclus ».

Les deux mois supplémentaires de prorogation de l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire national paraît aux yeux de la juridiction administrative comme étant « adaptées et proportionnées à la situation présente » tout en permettant « la levée progressive et graduée de la mesure de confinement à domicile faite aux personnes depuis le 17 mars ».

Le Conseil d’État a invité le Gouvernement de s’interroger sur l’utilité de maintenir les nombreuses mesures dérogatoires prises par lui-même sur le fondement de l’article 38 de la Constitution lesquelles doivent prendre fin de l’état d’urgence.

Le Conseil d’État a jugé que ces dispositions conciliaient de manière équilibrée l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de la santé et le respect des droits et libertés fondamentaux tels que la liberté d’aller et venir ou le respect de la vie privée. Il a proposé des « améliorations de rédaction » afin de renforcer les garanties autour des mesures contraignantes.

(Avis CE 30 avril 2020, sur un projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions)

.

Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à l’article L.2121-1 du code du travail. Ce texte prévoit que, « pour pouvoir exercer des prérogatives dans l'entreprise, tout syndicat, qu'il soit ou non représentatif, doit satisfaire au critère de transparence financière ». A défaut, « un syndicat non représentatif ne peut donc pas valablement désigner un représentant de la section syndicale ». Le Conseil a admis de réétudier la question en raison d’un changement de circonstances.

Il considère que cette obligation de transparence financière est justifié car elle permet aux salariés « de s’assurer de l'indépendance, notamment financière, des organisations susceptibles de porter leurs intérêts ».

De plus, la Cour de cassation retient une interprétation souple du texte puisqu’elle admet comme mode de preuve du respect de cette obligation tantôt la production des documents comptables, tantôt la production de tout autre document équivalent.

Pour ces deux raisons, la Cour suprême a jugé que les dispositions du code du travail ne contreviennent pas aux blocs de constitutionnalité.

(CC 30 avril 2020, n° 2020-835 QPC, M. Ferhat H. et autres)

.

.

LÉGALITÉ ADMINISTRATIVE

.

.

Acte administratif

.

Le Tribunal administratif de Poitiers a sursis à statuer pour interroger le Conseil d’État sur une difficulté d’application. Cette dernière dispose de trois mois pour examiner la question soulevée. La juridiction de première instance a posé, en l’espèce, deux questions :

1° Le délai de caducité des plans d'occupation des sols remis en vigueur du fait d'une annulation, prévu par l'article L. 174-6 du code de l'urbanisme au terme de vingt-quatre mois, est-il applicable lorsque l'annulation d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale est intervenue avant le 25 novembre 2018, date d'entrée en vigueur de la loi ELAN ?

2° Dans l'affirmative, le délai de vingt-quatre mois doit-il commencer à courir à compter de l'annulation du plan local d'urbanisme, du document d'urbanisme en tenant lieu ou de la carte communale, ou du jour de l'entrée en vigueur de la loi ELAN ?

Le Conseil d’État a livré l’interprétation à donner de l’article L.174-6 du code de l’urbanisme. Ce texte dispose qu’en cas d’annulation ou de déclaration d’illégalité d’un plan local d’urbanisme (PLU), il peut être remis en vigueur le plan d'occupation des sols (POS) immédiatement antérieur. Ce POS « redevient applicable pour une durée de vingt-quatre mois à compter de la date de cette annulation ou de cette déclaration d'illégalité ».

La Haute juridiction a considéré que « eu égard à l'objet et aux termes mêmes de l'article L. 174-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018, qui ne prévoit aucune rétroactivité, le délai de vingt-quatre mois qu'il prévoit, qui est immédiatement applicable, y compris lorsque la décision prononçant l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale est intervenue avant son entrée en vigueur, ne commence à courir, pour les plans d'occupation des sols remis en vigueur par des annulations prononcées avant l'entrée en vigueur de la loi, qu'à la date de son entrée en vigueur ».

(Avis CE 3 avril 2020, n° 436549, M. C… B...)

.

Permis de construire

.

Une propriétaire voisine a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Saint-Antonin-sur-Bayon a délivré un permis de construire pour l'extension en rez-de-chaussée d'une maison existante.

La requérante a relevé appel du jugement de rejet.

Le permis de construire doit respecter les règles d'urbanisme notamment celles relatives « à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours ». Si le juge administratif doit pouvoir « s’assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne lui appartient pas de vérifier ni la validité de cette servitude ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique ».

Or, la propriétaire bénéficiaire du permis de construire a fait savoir à sa voisine qu’elle entendait supprimer tout passage par cette parcelle sans pour autant justifier d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à la voie publique.

La Cour administrative d’appel de Marseille a considéré que cet élément constitue un vice affectant l’ensemble du projet et non susceptible d’être régularisé.

Le jugement a donc été annulé.

(CAA Marseille 19 mars 2020, n° 18MA04922, Mme I… G...)

.

.

RESPONSABILITÉ

.

.

Préjudice

Aggravation du dommage

Police administrative

.

Lors d’un festival de musique, une participante a chuté d'un élément de la structure métallique sur laquelle elle dansait, lui occasionnant un traumatisme crânien avec un double hématome extra-dural.

La victime a relevé appel du jugement qui a refusé de considérer « l’État fautif à raison de l'usage insuffisant de ses pouvoirs de police par le préfet ».

La Cour administrative d’appel de Nancy a confirmé le jugement au motif que l’instruction n’a pas démontré que « la soixantaine de structures métalliques montées sur le site du Tecknival présentât une dangerosité manifeste imposant une intervention de l'administration, alors au demeurant qu'aucune disposition applicable en l'espèce n'imposait au préfet de procéder à un contrôle sur site de chacune de ces installations scéniques ».

Par ailleurs, la requérante ne peut invoquer le « Mémento Matériels et Ensembles démontables » qui n’a aucune valeur juridique.

Et de conclure : « eu égard à l'ampleur de l'événement, qui a accueilli environ 30 000 personnes, dont 654 ont été prises en charge par les secours, et à l'étendue des mesures mises en œuvre par l’État destinées à garantir la sécurité, la salubrité et l'hygiène du rassemblement, qui s'est déroulé sur un terrain militaire réquisitionné par l’État, aucune carence fautive du préfet dans l'exercice de ses pouvoirs de police n'est établie ».

(CAA Nancy 17 mars 2020, n° 18NC02466, Mme B… D…)

.

lien externe
-
Fichier
-