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STATUT
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Temps de travail
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A la lecture du communiqué de presse du 9 mars 2020, la Cour européenne a précisé, dans la continuité de sa jurisprudence, qu’ une « période de garde sous régime d’astreinte ne constitue, dans son intégralité, du temps de travail que lorsque les contraintes imposées au travailleur affectent très significativement sa faculté de gérer, au cours de cette période, son temps libre ».
ð Décision CJUE 9 mars 2021, n° C-344/19, D.J./Radiotelevizija Slovenija
ð Décision CJUE 9 mars 2021, n° C-580/19 RJ/Stadt Offenbach am Main
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LEGALITE ADMINISTRATIVE
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Acte administratif
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Permis de construire
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Un couple de propriétaires a édifié une maison d’habitation en vertu d’un permis de construire et d’un permis modificatif.
Après avoir obtenu l’annulation du permis de construire, la société tierce a demandé au juge judiciaire la démolition de ladite maison assortie de dommages-intérêts.
Devant la Cour de cassation, les propriétaires ont contesté l’arrêt de la Cour d’appel qui a ordonné la démolition de leur maison.
La chambre civile de la Cour de cassation précise que si l’article L.480-13 du code d’urbanisme tend à limiter l’action des tiers en démolition du fait de la méconnaissance des règles d’urbanisme ou des servitudes d’utilité publique (le but est de prévenir contre tout recours abusifs de tiers), « le législateur n’a donc pas conféré une impunité aux propriétaires de constructions situées en dehors des zones spécifiquement mentionnées, lesquels demeurent exposés à l’action du représentant de l’Etat ».
Ainsi, « en maintenant la possibilité pour les tiers d’agir en démolition dans certaines zones présentant une importance particulière, le législateur a entendu assurer une conciliation équilibrée entre, d’une part, l’objectif de sécurisation des projets de construction et, d’autre part, la protection de la nature, des paysages et du patrimoine architectural et urbain, ainsi que la prévention des risques naturels ou technologiques ».
Il a été constaté par la Cour d’appel que la construction des requérants « était située dans un périmètre classé en zone rouge du plan de prévention du risque d’inondation ». Par conséquent, la Haute juridiction a considéré que la Cour d’appel a fait une exacte application de l’article L.480-13 du code de l’urbanisme.
(3ème Civ., 11 février 2021, n° 20-13.627)
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Plan local d’urbanisme
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Des habitants « ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 9 février 2017 par laquelle le conseil municipal du Puy-Sainte-Réparade a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle approuve l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) n° 5 portant sur l'ouverture à l'urbanisation des terres agricoles et naturelles ».
La Cour administrative d’appel a rappelé qu’il « appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ». Seule une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts peut entraîner l’annulation de la délibération.
Il est, d’une part, constaté que « le carrefour existant sur la RD 15 est suffisamment dimensionné pour accueillir le projet d'extension de l'urbanisation prévu par l'OAPH5 quartier Rousset ». D’autre part, « si le secteur objet de l'OAPH5, classé en zone 1AUd et 1AUdj, est situé en lisière d'un secteur boisé exposé à un risque très fort d'incendie de forêts, ce secteur est limitrophe d'un lotissement desservi par la RD15 ». A ce titre, « l'OAPH5 préconise l'implantation d'un à deux poteaux ou bouches d'incendie en limite du secteur Sud, en liaison avec le SDIS ».
La requête des propriétaires a été une nouvelle fois rejetée.
(CAA MARSEILLE, 1ère chambre, 4 février 2021, n° 19MA03974)
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Police administrative
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L'Union des professionnels de la location touristique (UPLT) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice de suspendre l'exécution de l'arrêté du maire de Nice du 25 janvier 2021 portant interdiction pour les logements de particuliers proposant des hébergements payants temporaires de courtes à moyennes durées, d'accueillir, de recevoir, d'héberger des vacanciers, des touristes ou toute autre personne se déplaçant aux motifs de vacances, villégiatures, tourisme, visites dans la famille ou tout autre motif similaire durant la période du 6 au 20 février 2021.
La commune de Nice a formé un appel contre l’ordonnance de la juridiction administrative qui a fait droit à la demande.
La répartition des compétences est aujourd’hui bien établie dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. Les autorités de l’Etat, dotées d’un pouvoir de police spéciale, sont compétentes pour édicter « les mesures générales ou individuelles visant à mettre fin à une catastrophe sanitaire telle que l'épidémie de covid-19, en vue, notamment, d'assurer, compte tenu des données scientifiques disponibles, leur cohérence et leur efficacité sur l'ensemble du territoire concerné et de les adapter en fonction de l'évolution de la situation ».
Il n’empêche que le maire dispose toujours de la possibilité d’agir, y compris en cette période de crise sanitaire, au titre de ses pouvoirs de police générale. A ce titre, l’élu local peut « prendre des dispositions destinées à contribuer à la bonne application, sur le territoire de la commune, des mesures décidées par les autorités compétentes de l'Etat ». Pour autant, ses pouvoirs de police générale ne lui permettent pas d’instaurer « des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire, à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l'édiction indispensable et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l'efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l'Etat ».
La commune a invoqué des circonstances locales rendant nécessaires son intervention : le taux de positivité supérieur à la moyenne nationale, la présence du virus dans les eaux usées, de clusters et des variants, la saturation des hôpitaux.
Cette argumentation n’a pas convaincu les juges administratifs lesquels font observé que l’instruction n’a pas démontré « un risque d'afflux significatif de touristes à Nice dans la période couverte par l'arrêté en litige, compte tenu notamment de la saison hivernale et du report des festivités liées aux carnavals ». De plus, « il n'en résulte pas non plus que l'interdiction des locations touristiques serait susceptible d'avoir un impact notable sur la propagation du virus ». Enfin, « la commune ne justifie pas la différence de traitement entre les locations et les hôtels, dont l'ouverture demeure autorisée ».
La suspension de l’arrêté municipal a été maintenue.
(CE, Juge des référés, 16 février 2021, n° 449605, commune de Nice)
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Le maire de Langouët a pris un arrêté anti-pesticides visant à restreindre « l'utilisation de produits phytopharmaceutiques sur le territoire de la commune, en les interdisant notamment " à une distance inférieure à 150 mètres de toute parcelle cadastrale comprenant un bâtiment à usage d'habitation ou professionnel ", et en réduisant cette distance à 100 mètres dans certains autres cas ». La préfète d'Ille-et-Vilaine a alors déféré cet arrêté municipal.
En application du droit européen, « le législateur a organisé une police spéciale de la mise sur le marché, de la détention et de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, confiée à l'Etat ». En raison de la présence d’une police administrative spéciale, l’élu local ne peut édicter des mesures réglementaires à caractère général dans ce domaine.
L’annulation de l’arrêté municipal a été confirmé en raison de l’incompétence matérielle du maire.
(CAA NANTES, 4ème chambre, 5 février 2021, n° 19NT04981, commune Langouët)
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Par un arrêté, le maire de la commune de Parfondrupt a interdit la circulation des véhicules à moteur sur la voie communale dénommée " la Ruelle ", à compter du 1er avril 2016. La commune a relevé appel du jugement qui a ordonné l’abrogation de cet arrêté.
Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, les pouvoirs de police générale incluent « tout ce qui intéresse la sûreté, et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques ». L'article L. 2213-1 du même code prévoit que « Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation (...) ».
Néanmoins, le maire « doit veiller à ce que les restrictions apportées à la liberté de circulation soient justifiées par l'existence de troubles à l'ordre public, adaptées à l'objectif poursuivi et proportionnées ».
En l’espèce, l’arrêté attaqué « interdit la circulation de tous les véhicules à moteur sur cette voie à l'exception des seuls véhicules utilisés pour remplir une mission de service public ou pour des besoins d'assistance et de secours à la personne ». L’instruction n’a pas permis d’établir que la circulation des « véhicules à moteur des riverains présenterait un danger pour les piétons, pour lesquels au demeurant aucune information n'est donnée sur la fréquence d'utilisation de cette voie communale qui relie essentiellement des champs ».
Les juges du fond ont annulé cet acte administratif au motif qu’il ne serait « ni nécessaire, ni proportionnée au but poursuivi ».
(CAA NANCY, 4ème chambre, 26 janvier 2021, n° 19NC02499, commune Parfondrupt)
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Par un premier arrêté, « le maire de la commune de Bourg-Saint-Maurice a réglementé au titre du secours primaire les modalités d'évacuation des pistes des blessés ». Ainsi, « les opérations matérielles de secours aux personnes accidentées, blessées ou en détresse sur le domaine skiable sont assurées aux Arcs par la société exploitant ce domaine, la société ADS, chargée d'évacuer les personnes concernées et de les confier aux structures hospitalières ou médicales habilitées ou à un transporteur sanitaire public ou privé agréé ».
Par un deuxième arrêté, le maire « a retiré un précédent arrêté (…) qui règlementait la circulation et le stationnement sur la voie donnant accès à la place basse des Villards à Arc 1800 ».
Le centre médical des montagnes de l'Arc (CEMMA) et un de leur membre ont demandé la condamnation de la commune ainsi que de la société ADS en raison de la nouvelle réglementation qui aurait pour effet d’acheminer en priorité les blessés vers d’autres cabinets médicaux.
La société ADS est une personne morale de droit privé, chargée d’une mission de service public à caractère administratif ; elle ne peut voir sa responsabilité civile engagée uniquement devant le juge judiciaire. Le juge administratif n’est compétent que pour vérifier de la responsabilité de la commune.
Pour autant, la responsabilité de cette dernière n’a pas été retenue car, pour les juges d’appel, le préjudice soutenu par les requérants (manque à gagner résultant de l’acheminement privilégié des blessés auprès des autres cabinets médicaux) est lié à la position géographique du cabinet médical lequel est « situé en façade de la place basse des Villards » ; seule « une voie « pompiers » appartenant à l’association syndicale libre de l’Aiguille des Glaciers permet d’y accéder » et encore de manière très restreinte. En effet, « l'usage libre de cette voie est restreint par une barrière commandée qui est gérée par le service " parkings " de la commune et est ouverte par l'agent de permanence par visualisation du véhicule entrant ». En outre, « cette voie est bordée de commerces et de terrasses et est essentiellement à vocation d'accès piétons menant aux caisses des remontées mécaniques, aux commerces adjacents et aux places, basse et haute, des Villards ». Ainsi, il a été « considéré que le cabinet médical précité, en raison de sa situation géographique et des essais faits la saison précédente ne pouvait en l'état accueillir des blessés évacués des pistes, sans respecter les règles fixées par la commission de sécurité du domaine skiable ».
Les juges ont estimé, par ailleurs, que les restrictions instaurées par le maire « à la suite des recommandations de la commission de sécurité du domaine skiable prises dans l'intérêt des blessés » ne privent pas les malades de leur droit au libre choix de son praticien.