.
.
STATUT
.
.
Aptitude médicale
.
En l’espèce, le requérant travaille, depuis novembre 2013, comme agent d’entretien à de la piscine intercommunale de la communauté de communes des pays de l'Aigle. Le 30 mars 2017, suite à la demande du requérant d’être placé en congé de maladie ordinaire du 7 novembre 2016 au 3 septembre 2017, le président de la Communauté de communes a sollicité l'avis du comité médical départemental sur son aptitude à l'exercice de ses fonctions. Le 26 juin 2017, une expertise a été diligentée par ce comité et le médecin a remis un rapport sur l'inaptitude définitive de l'intéressé à son poste d'agent d'entretien. Puis, le comité médical, réuni le 6 juillet 2017, a suivi cet avis. Le 27 novembre 2017, le Président de la communauté de communes des pays de l’Aigle a convoqué le requérant et pris une décision de son licenciement pour inaptitude physique.
C’est ainsi que le requérant a demandé au Tribunal administratif de Caen d’annuler la décision du 27 novembre 2017 ainsi que la décision du 18 juillet 2018 rejetant son recours gracieux. Il a également demandé au tribunal d'enjoindre au Président de la communauté de communes de le réintégrer et de lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de ses préjudices résultant de l'illégalité de cette décision et du défaut d'adaptation de son poste de travail. Or, par un jugement en date du 18 août 2020, le Tribunal administratif de Caen a rejeté la demande du requérant.
En appel, le requérant a demandé l’annulation de la décision des premiers juges et les décisions des 27 novembre 2017 et 18 juillet 2018 prises par la Communauté de communes des pays de l’Aigle ainsi que de condamner celle-ci à lui verser la somme de 41 569,21 euros à parfaire en réparation de ses préjudices. Il a soutenu notamment que l’administration n’a pas respecté son obligation de recherche de reclassement préalablement à son licenciement et qu’elle a méconnu son obligation de sécurité en commettant ainsi une faute de nature à engager sa responsabilité. En revanche, l’intimée a demandé le rejet de la requête du fait que les moyens soulevés par l’appelant ne sont pas fondés.
Après avoir rappelé les dispositions de l’article 13 et l’article 40 du décret du 15 février 1988 en ce qui concerne la procédure de licenciement et de reclassement ainsi que le principe général énoncé par le Code du travail, les juges de la Cour administrative d’appel de Nantes ont estimé que ces dispositions ouvrent à l’agent reconnu inapte à son poste un délai correspondant à la moitié de la durée de son préavis pour solliciter son reclassement et que ces dispositions fixent « un délai impératif, au-delà duquel l'employeur ne peut être tenu à une obligation de reclassement » (Pt. 6 de l’arrêt).
Or, le requérant « n'a sollicité son reclassement au sein de la collectivité qui l'employait que le 23 mai 2018, soit après l'expiration du délai de deux mois prévu au 2° du III de l'article 13 du décret du 15 février 1988, qui lui avait été rappelé dans la décision du 27 novembre 2017 » (Pt. 7 de l’arrêt) ; la décision litigieuse n’étant entachée d’aucune illégalité. Pour ces motifs, la Cour administrative d’appel de Nantes a décidé de rejeter les demandes du requérant.
(CAA de NANTES, 6e chambre, 07/12/2021, 20NT02993).
.
.
STATUT
.
.
Accident en service
.
En l’espèce, la requérante est une fonctionnaire travaillant, comme directrice adjointe du pôle santé au travail, au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Morbihan (CGFPT). Elle a été placée en arrêt de travail du 8 novembre 2016 au 2 juin 2017, puis du 9 juin 2017 au 15 mars 2018. L’imputabilité au service de ces arrêts de travail a été reconnue par un arrêté du 3 avril 2018 pris par le Directeur du CGPTF. La requérante, par un courrier du 24 septembre 2018, a sollicité l'indemnisation à hauteur de 15 000 euros du préjudice moral qu’elle estime avoir subi du fait de sa maladie professionnelle. Cette demande a été rejetée par décision du 12 novembre 2018.
C’est ainsi que la requérante a demandé au Tribunal administratif de Rennes de condamner le CGFPT à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de ses conditions d'exercice dans cet établissement. Or, par le Tribunal administratif de Rennes, par sa décision en date du 1er octobre 2020, a condamné le CGFPT à verser à la requérante la somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral.
En appel, le CGFPT a demandé l’annulation du jugement rendu par le tribunal de la première instance, notamment en raison de l’insuffisance des motifs et du fait que la requérante se trouve incapable de s’adapter à ses missions, son comportement et ses défaillances en tant qu’agent. En revanche, la requérante a demandé le rejet de la requête et demande également la réformation du jugement attaqué pour porter le montant de la condamnation prononcée à la somme de 15 000 euros. Il avance que les moyens de l’appelant ne sont pas fondés et que les premiers juges ont commis une erreur d’appréciation lorsqu’ils se sont limités son préjudice à la somme de 4000 euros, alors que l’intimée a été victime d’un effondrement psychique ainsi que de pressions et de tensions dont seule sa hiérarchie est à l’origine.
Après avoir vérifié la recevabilité de la demande de la requérante et écarté le moyen de l’appelant sur ce point, les juges de la Cour administrative d’appel de Nantes ont estimé, dans le point 7 de leur arrêt, que « le fonctionnaire qui a enduré, du fait d'une maladie professionnelle, des souffrances physiques ou morales, peut obtenir de la collectivité qui l'emploie, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ce chef de préjudice ».
Par ailleurs, les juges n’ont pas hésité à rappeler, d’une parte, que la responsabilité sans faute du CGFPT était engagée en raison des risques encourus à l’occasion de l’exercice des fonctions et, d’autre part, que le président du CGFPT a reconnu imputable au service la pathologie dont la requérante a souffert à compter du 8 novembre 2016. En effet, la reconnaissance du caractère imputable au service de la maladie implique que la requérante puisse obtenir une indemnité réparant les souffrances qu’elle a endurées du fait de cette maladie (Pt. 8 de l’arrêt).
C’est ainsi que les juges ont décidé de réformer le jugement du Tribunal administratif de Rennes en réduisant l’indemnité, accordée à la requérante au titre du préjudice moral, à la somme de 2 000 euros.
(CAA de NANTES, 6e chambre, 21/09/2021, 20NT03520, Inédit au recueil Lebon).
.
.
STATUT
.
.
Temps de travail
.
En l’espèce, un SDIS a adopté, le 28 mars 2017, un addendum au règlement intérieur tendant à préciser les règles du décompte du temps de travail pour arrêts maladie et accident de service. Le 1er août 2017, le Président du Conseil d’administration du SDIS a rejeté la demande du requérant tendant à l’abrogation de la délibération de 2017. Suite au rejet de sa demande par le jugement du Tribunal administratif de Pau en date du 1er août 2017, le requérant demande à la CAA de Bordeaux d’annuler la décision du tribunal de la 1re instance ainsi qu’abroger la délibération du 28 mars 2017. Il soutient, pour cela, que la délibération était illégale du fait que celle-ci méconnaît les dispositions de l’article 57-2° de la loi du 26 janvier 1984 (portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) ainsi que le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 (relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux), qui prévoit qu’ « un agent placé en congé maladie étant en position d’activité, il est réputé avoir accompli très exactement le temps de travail qui aurait été le sein s’il n’avait pas été placé en congé maladie ». En revanche, le SDIS soutient que les moyens du requérant ne sont pas fondés et que la délibération en litige n’est entachée d’aucune illégalité.
Les juges de la Cour administrative d’appel de Bordeaux ont, d’abord, rappelé les dispositions de l’article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 et les dispositions de l’article 1er du décret du 12 juillet 2001 pris pour l’application de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale, ainsi que les dispositions de l’article 1er, 2 et 4 du décret du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature.
Puis, les juges ont pu juger que dans les établissements publics l’employeur peut « définir un cycle annuel de travail pour les agents qui y travaillent. À ce titre, il est également compétent pour déterminer les conséquences des congés de maladie des agents qui y sont soumis pour le calcul de leur temps de travail annuel effectif ».
En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que le cycle de travail repose sur l’alternance de gardes de 24 heures décomptées en équivalence de temps de travail, de gardes de 12 heures, 11 heures, 10 heures et 8 heures, ainsi que de périodes de service hors rang, d’une durée de 8 heures ou d’une durée inférieure, décomptées sans équivalence entre temps de travail effectif et temps de présence. Dès lors qu’un tel cycle de travail correspond, sur l’année, à un nombre total d’heures de travail effectif de 1 607 heures, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d’être effectuées, l’employeur peut légalement retenir que l’agent en congé de maladie doit être regardé comme ayant effectué sept heures de travail effectives, quand bien même, selon la période du cycle de travail en cause, la durée de travail pour laquelle l’agent est en congé de maladie devait normalement comporter un nombre d’heures de travail effectives supérieur à sept heures ». Ainsi, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté la demande du requérant.
(CAA de Bordeaux, 16 novembre 2021, n° 19BX01547 : arrêt non publié).
.
.
STATUT
.
.
Temps de travail
.
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) vient d’interpréter la disposition de l’article 2 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail. Il s’agit d’une demande de décision préjudicielle introduite par un tribunal irlandais dans le cadre d’un litige opposant un sapeur-pompier réserviste (SPV) au conseil municipal de Dublin (CMD) au sujet du calcul des heures de travail accomplies par ce dernier pendant des périodes de garde sous régime d’astreinte. Ces périodes de garde sont, en principe, de 7 jours sur 7 et de 24 heures sur 24. Elles ne sont interrompues que par les périodes de congé, ainsi que par les périodes pour lesquelles le SPV a notifié à l’avance son indisponibilité, pour autant que le CMD consente à ces dernières périodes.
Devant la juridiction nationale (la juridiction de renvoi), le SPV soutient que le CMD méconnaît les règles en matière de repos journalier, de repos hebdomadaire et de durée maximale hebdomadaire de travail du fait que le CMD lui impose une garde de 7 jours sur 7 et de 24 heures sur 24 et lui refuse de reconnaître que les heures de garde constituent du temps de travail. En revanche, le CMD soutient que les sapeurs-pompiers réservistes ne sont pas tenus de rester dans un lieu déterminé lorsqu’ils sont de garde sous régime d’astreinte, ce qui ne serait pas justifié de qualifier les heures de garde de « temps de travail ».
La juridiction de renvoi constate alors que l’interprétation de la notion de « temps de travail » est déterminante pour trancher le litige principal et décide de surseoir à statuer et de poser à la CJUE la question préjudicielle de savoir « si l’article 2, point 1, de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens qu’une période de garde sous régime d’astreinte assurée par un sapeur-pompier réserviste, durant laquelle ce travailleur exerce, avec l’autorisation de son employeur, une activité professionnelle pour son propre compte mais doit, en cas d’appel d’urgence, rejoindre sa caserne d’affectation dans un délai maximal de dix minutes, constitue du « temps de travail », au sens de cette disposition ».
Après avoir rappelé les dispositions de l’article 2 de la directive 2003/88/ CE du 4 novembre 2003 et la jurisprudence constante s’y rapportant, la CJUE juge que la juridiction nationale doit réaliser une appréciation globale de l’ensemble des circonstances de l’espèce afin de déterminer si une période de garde sous régime d’astreinte d’un SPV constitue du temps du travail au sens de la directive en question (Pt. 42 de l’arrêt).
La Cour tient à préciser, dans le Pt. 44 de son arrêt, que d’après les circonstances, le SPV « ne doit, à aucun moment, se trouver dans un lieu précis pendant ses périodes de garde sous régime d’astreinte, qu’il n’est pas tenu de participer à l’ensemble des interventions assurées à partir de sa caserne d’affectation, un quart de ces interventions pouvant en l’occurrence avoir lieu en son absence, et qu’il lui est permis d’exercer une autre activité professionnelle n’excédant pas 48 heures hebdomadaires en moyenne, pourraient constituer des éléments objectifs permettant de considérer qu’il est en mesure de développer, selon ses propres intérêts, cette autre activité professionnelle pendant ces périodes et d’y consacrer une partie considérable du temps de celles-ci, à moins que la fréquence moyenne des appels d’urgence et la durée moyenne des interventions n’empêchent l’exercice effectif d’une activité professionnelle susceptible d’être combinée avec l’emploi de sapeur-pompier réserviste, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier ».
C’est ainsi que la Cour juge, dans le Pt. 48 de l’arrêt, que « l’article 2, point 1, de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens qu’une période de garde sous régime d’astreinte assurée par un sapeur-pompier réserviste, durant laquelle ce travailleur exerce, avec l’autorisation de son employeur, une activité professionnelle pour son propre compte mais doit, en cas d’appel d’urgence, rejoindre sa caserne d’affectation dans un délai maximal de dix minutes, ne constitue pas du « temps de travail », au sens de cette disposition, s’il découle d’une appréciation globale de l’ensemble des circonstances de l’espèce, notamment de l’ampleur et des modalités de cette faculté d’exercer une autre activité professionnelle ainsi que de l’absence d’obligation de participer à l’ensemble des interventions assurées à partir de cette caserne, que les contraintes imposées audit travailleur pendant cette période ne sont pas d’une nature telle qu’elles affectent objectivement et très significativement la faculté pour ce dernier de gérer librement, au cours de ladite période, le temps pendant lequel ses services professionnels en tant que sapeur-pompier ne sont pas sollicités ».
(CJUE, Affaire C-214/20, 11 novembre 2021, MG c/ Dublin City Council)