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Les pouvoirs de police administrative du préfet de zone de défense et de sécurité

Soutenance de thèse de doctorat de droit public du Capitaine Rémy CAPART

23/01/15

Le commandant Rémi Capart a obtenu son doctorat en soutenant sa thèse sur "Les pouvoirs de police administrative du préfet de zone de défense et de sécurité" le 9 janvier 2015 avec mention honorable et félicitation du jury.

Ce jury était composé de Marion Ubaud-Bergeron, professeur à l'université Montpellier I, de Dominique Maillard Desgrées du Loû, professeur à l'Université Paris Descartes, de François-Xavier Fort, MCF-HDR à l'Université de Montpellier 1 (directeur), de Nicola Kada, ​Professeur de droit public à l'Université de Grenoble-Alpes et du Colonel Luc Corack, chef d’État-major de la zone de Défense Sud Ouest qui nous fait part de cette information en nous rappellant l'histoire et le contexte de l'émergence des fonctions du préfet de zone de défense et de sécurité.

Un volume de sa thèse sera bientôt disponible au Centre de ressources documentaires de l'ENSOSP.

Le XXI siècle a débuté par l’attentat le 11 septembre 2001 qui a ébranlé toutes certitudes.

Suite à ces évènements, les États-Unis ont reformulé le droit de la sécurité nationale.

Une structure chargée de créer de toute pièce une défense et une protection civile de niveau fédéral apparaît fin 2002 avec le Northern Command et le Department of Homeland Security[1]. Ces nouvelles orientations américaines sont reprises dans le rapport sur la stratégie de sécurité nationale publié en septembre 2002.

L’Union Européenne a également réagi, et elle adhère aux positions américaines.

En France, le Président de la République française a énoncé clairement la nouvelle ligne de conduite le 17 juin 2008 en signant le livre blanc sur la défense et la sécurité, traduisant l’adaptation française à ce nouveau cadre.

Dans ce contexte, le droit de la gestion de crise doit évoluer en conséquence.

« Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires les fléaux calamiteux » est une obligation confiée aux corps municipaux par une loi du 16- 24 août 1790 relative à l’organisation judiciaire de la France [2].

Cette gestion des « fléaux calamiteux » confiée aux maires depuis deux siècles, ou au préfet [3] en cas de carence du maire ou d’importance supra-communale de la crise, ne correspond plus à cette nouvelle stratégie. C’est pourquoi, la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004 [4] permet au préfet d’assurer la direction des opérations de secours à la place du maire non seulement lorsqu’il s’agit d’un accident, sinistre ou catastrophe dont les conséquences peuvent dépasser les limites de la communes, mais également lorsque le préfet juge que la commune n’a pas les capacités pour y faire face.

Cette évolution récente de la législation constitue une étape importante devant la volonté de faire face à des risques ou menaces planétaires.

L’idée simple de confier aux militaires la défense de la Nation contre un envahisseur identifié est dépassée. Le juge Bruguière, spécialiste de la lutte contre le terrorisme, constate qu’il n’y a plus d’ennemis à nos frontières mais que cependant le terrorisme n’a plus de frontières…

Le processus de mise en place de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense (PESD) s’est accéléré et confirme la nécessité de forces de sécurité civile et de police au plan européen pour la gestion de crise : « La présence militaire, pour indispensable qu’elle soit, est bien souvent incomplète, parfois inadaptée, voire contre-productive. Une approche civile de la gestion de crise s’impose alors… »[5].

Monsieur Hubert Seillan, maître de conférence à l’université de Bordeaux, a coutume de dire : « Face à des situations dangereuses, susceptibles de provoquer l’atteinte à l’intégrité de l’Homme, une seule réponse s’impose : l’obligation de gestion » [6].

Pour faire face à ces mutations, le livre blanc relatif à la sécurité et à la défense définit le nouveau concept de sécurité nationale.

Plusieurs lois et décrets développent ce concept qui englobe désormais la sécurité intérieure, la sécurité civile et la sécurité économique.

La notion de sécurité nationale désigne l'objectif de parer aux risques ou menaces susceptibles de porter atteinte à la vie d'une nation.

En France, elle est définie (depuis la loi du 29 juillet 2009) par le nouvel article L.1111-1 du code de la Défense qui dispose que « la stratégie de sécurité nationale a pour objet d’identifier l’ensemble des menaces et des risques susceptibles d’affecter la vie de la Nation, notamment en ce qui concerne la protection de la population, l’intégrité du territoire et la permanence des institutions de la République, et de déterminer les réponses que les pouvoirs publics doivent y apporter. L’ensemble des politiques publiques concourt à la sécurité nationale. La politique de défense a pour objet d’assurer l’intégrité du territoire et la protection de la population contre les agressions armées. Elle contribue à la lutte contre les autres menaces susceptibles de mettre en cause la sécurité nationale. Elle pourvoit au respect des alliances, des traités et des accords internationaux et participe, dans le cadre des traités européens en vigueur, à la politique européenne de sécurité et de défense commune ». Dans cette nouvelle définition, la sécurité nationale remplace l'ancienne notion de défense nationale qui était définie par l'ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense. Désormais, la défense n'est plus le cadre général de l'action de l'État en matière de protection des intérêts nationaux, mais seulement l'une des fonctions régaliennes qui participe, avec d'autres politiques publiques, à la sécurité nationale. Défense et sécurité sont nationales car elles ne concernent pas seulement la défense militaire mais toutes les administrations responsables de grandes catégories de fonctions ou de ressources essentielles à la vie du pays.

Un homme symbolise le cadre de cette nouvelle gestion de la "sécurité nationale" : il s'agit du préfet de zone. Le commandant Rémi Capart a disséqué l'évolution historique et normative de ce haut-fonctionnaire de l’État. Nul doute que sa thèse de doctorat, soutenue le vendredi 9 janvier 2015 à l'université de Droit de Montpellier, sera lue. Elle deviendra le livre de chevet des étudiants et cadres supérieurs. Elle est d'actualité en janvier 2015 : le 1 janvier 2015 est décédé le sociologue allemand Ulrich Beck qui a écrit "La société du risque" et qui a démontré que notre société devait se prémunir contre des risques et menaces dépassant le cadre local.

Sa thèse est, également, d'actualité après les actions terroristes de ce début d'année, les préfets de zone ayant été très impliqués dans les différentes mesures mise en œuvre pour préserver la sécurité nationale.

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[1] La National Security Strategy est un document officiel présentant la stratégie du pouvoir exécutif américain dans les affaires internationales et un bilan de l’exercice depuis le 11 septembre (présenté au Congrès).

[2] Les pouvoirs des maires sont toujours fondés sur les mêmes termes et ont résulté successivement de la loi du 5 avril 1884, puis du code de l’administration communale, puis de l’article L.131-2 alinéa6 du code des communes avant d’être codifiés actuellement à l’article L.2212-2 alinéa 5 du code général des collectivités territoriales.

[3] Le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoir des préfets rappelle : « le préfet de département a la charge de l’ordre public, de la sécurité et de la protection des populations ».

[4] Loi n° 2004-811 du 13 août 2004, article 17.NOR : INTX0300211L

[5] La défense en Europe, La documentation française, édition 2005, sous la direction de Patrice Buffotot (page 201)

[6] Journal Sud-ouest du 17 janvier 1998 page 39, numéro spécial.

[7] -Le commandant Rémi Capart a occupé successivement les fonctions de chef du centre de secours de Chantilly puis du centre de secours principal de Creil. Diplômé d'un D.U.T. Hygiène et sécurité, il dispose d'un esprit scientifique enrichi de qualités littéraires et juridiques. Il a en effet poursuivi la totalité du cursus universitaire de science juridique de la première année au doctorat de droit public. « Il a choisi de soutenir sa thèse sur un sujet d'actualité depuis qu'un décret du 4 mars 2010 lui a offert une consistance nouvelle : " Les pouvoirs de police administrative du préfet de zone de défense et de sécurité"

Colonel Luc CORACK, chef d'Etat-major de la zone de Défense Sud Ouest

Publié le 23/01/15 à 15:05