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Sécurité nucléaire

Titre de la question
Question N° : 107175 de M. André Chassaigne ( Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme )
Contenu de la question

M. André Chassaigne attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, sur la perte de confiance de la population envers l'énergie nucléaire. « Restaurer la confiance du public » envers l'énergie nucléaire, tel est le défi auquel l'ensemble de la filière nucléaire doit s'atteler d'urgence, selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui affirme vouloir « responsabiliser » les opérateurs industriels, censés tirer les premiers les conclusions de la catastrophe de Fukushima Daiichi. L'AIEA réitère sa foi dans les normes existantes de sûreté, rejetant l'opprobre sur l'opérateur japonais, Tepco, qui aurait gravement sous-estimé les risques pesant sur ses réacteurs. Falsifiant des dizaines de rapports sur l'état de ses centrales, Tepco a en effet négligé la sûreté de ses installations, comme en atteste la facilité avec laquelle le tsunami a balayé les différents dispositifs électriques à Fukushima Daiichi, tandis que la centrale voisine de Daini, à quelques kilomètres de distance, résistait, elle, beaucoup mieux à la vague géante. Le directeur de l'AIEA voudrait convaincre les 151 membres de l'Agence de confier à l'AIEA le même pouvoir coercitif que celui exercé en matière de lutte antiprolifération, pour forcer les États à coopérer et suivre des recommandations strictes en matière de sûreté des installations, par une adhésion sans failles aux critères de sécurité internationaux les plus rigoureux. Il l'interroge sur la position de la France sur cette sollicitation et les nouveaux pouvoirs dont disposerait l'AIEA.

Titre de la réponse
Question publiée au JO le : 03/05/2011 page : 4408
Contenu de la réponse

L'usage sûr et responsable de l'énergie nucléaire est une exigence absolue du recours à l'énergie nucléaire et la France tient depuis longtemps un discours volontariste en faveur des plus hauts niveaux de sûreté. Le Président de la République avait d'ailleurs qualifié en mars 2010 la sûreté nucléaire de « priorité collective ». Toutes les leçons de l'accident de Fukushima doivent être tirées d'une manière rationnelle et ordonnée. Au niveau multilatéral, la France oeuvre activement pour renforcer la sûreté nucléaire au plan mondial. Par exemple, avant même l'accident de Fukushima, elle avait lancé une initiative au sein du G8 pour porter un message politique sur la sûreté nucléaire, dans le cadre de sa présidence en 2011 ; ces discussions ont pris de l'ampleur après Fukushima, et ont abouti à des messages forts dans la déclaration du sommet du G8 des 26 et 27 mai. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) joue un rôle de premier plan dans le régime international de sûreté nucléaire et la France soutient les initiatives que cette agence pourrait porter pour renforcer la sûreté au plan mondial, tout en responsabilisant les exploitants nucléaires et les états ayant choisi de recourir à l'énergie nucléaire. Un caractère contraignant de normes de sûreté pourrait en premier lieu être envisagé dans le cadre européen, dans une approche d'exemplarité vis-à-vis du reste de la communauté internationale. Notamment, la France avait déjà promu, à l'occasion du Conseil européen du 4 février 2011, les objectifs de sûreté des nouveaux réacteurs, tels que préparés par WENRA (club des autorités de sûreté européennes). Il faut par ailleurs noter que, en vertu de la directive 2009/71/EURATOM établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires, il existe un mécanisme de vérification des objectifs de sûreté, à travers l'organisation périodique d'auto-évaluations et d'examens internationaux par des pairs, en vue de l'amélioration continue de la sûreté nucléaire. Au-delà des normes de sûreté, la priorité est de faire évoluer le cadre international existant, en optimisant et améliorant les travaux existants dans les différentes enceintes (AIEA, AEN, WEN RA, ENSREG...), en renforçant les conventions internationales pertinentes sous l'égide de l'AIEA, en favorisant la diffusion des meilleures pratiques entre responsables de différents pays (notamment en systématisant des revues par les pairs périodiques), en améliorant la gestion de crise au plan international avec notamment la mise en place de moyens de secours hors site... C'est ce renforcement substantiel des mécanismes d'évaluation des politiques de sûreté nucléaire et de gestion de crise qui est probablement la voie d'amélioration la plus prometteuse. Enfin, pour mémoire, la France estime utile de réévaluer les marges de sûreté des installations nucléaires existantes à la lumière de l'accident de Fukushima, afin de prendre le cas échéant les mesures pour renforcer encore le niveau de sûreté. Dans cette perspective, la transparence est particulièrement importante et réaffirmée : en particulier, les conclusions de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) seront rendues publiques, et seront soumises à une évaluation par les pairs conformément aux conclusions du Conseil européen des 24 et 25 mars 2011. Une concertation est également mise en place dans ce processus, notamment avec le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) et les commissions locales d'information. Enfin, sur une base volontaire, l'ASN a déjà accepté la participation d'experts belges, luxembourgeois, suisses et du land allemand de Sarre à ses évaluations complémentaires de sûreté. La réalisation de ces tests de résistance s'inscrit à la fois dans une demande du Premier ministre adressée au président de l'ASN, et dans une approche commune agréée au niveau européen. La France et l'UE promeuvent également la réalisation de tels audits dans les autres pays faisant appel à l'énergie nucléaire. La France est donc particulièrement mobilisée au plan international pour renforcer l'usage sûr et responsable de l'énergie nucléaire, source d'énergie qui reste essentielle au mix énergétique français pour répondre aux objectifs d'indépendance énergétique, de compétitivité et de lutte contre le changement climatique.