M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre Louault. Ma question s'adresse à M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le ministre, je voudrais tout d'abord saluer le travail réalisé à l'occasion de cette crise par le Premier ministre, vous-même et l'ensemble du Gouvernement, ainsi que celui qui est effectué par l'ensemble des agents des agences régionales de santé (ARS) et du personnel soignant. Ce ne sont pas ces personnels qui sont en cause au travers de ma question, mais le système.
Comment expliquer que, deux mois après les expérimentations du professeur Raoult sur la chloroquine, on ne sache toujours rien sur l'efficacité de ce traitement, alors qu'une expérimentation massive aurait sans doute apporté des réponses depuis un mois ?
Comment expliquer qu'il a fallu attendre un mois avant de répondre aux propositions des laboratoires vétérinaires pour tester plus largement les porteurs du Covid-19 ? Quinze jours après la levée des barrières administratives, leurs capacités ne sont toujours pas utilisées.
Comment expliquer qu'on casse l'initiative locale, en faisant faire demi-tour à un convoi sanitaire au péril de la santé des malades, parce que la décision n'a pas été prise au bon endroit ?
Comment expliquer que les dentistes réclament toujours les protections qui leur sont nécessaires pour exercer ?
Comment faire confiance à un système qui, demain, devra répartir les masques entre tous les Français ? Qui va coordonner tout cela ?
Tous ces dysfonctionnements sont liés à la gestion bureaucratique d'une administration qui croule sous les lois, les règlements, les protocoles, lesquels sont complètement inadaptés à une gestion de crise. Monsieur le ministre, gérer une crise, c'est oublier les contraintes administratives. Que comptez-vous faire pour accélérer le fonctionnement de notre système administratif et médical, aujourd'hui dépassé ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Louault, vous avez posé beaucoup de questions, je vais essayer de répondre à un maximum d'entre elles de manière très rapide.
Sachez d'abord que la France est le pays des études cliniques ! J'en ai cité une qui concernait la nicotine. De nombreuses autres sont en cours, dont certaines sur l'hydroxychloroquine.
La France n'est pas le seul pays à expérimenter cette molécule ; les États-Unis et d'autres pays européens le font également. Je vous invite à lire les dernières publications validées à ce sujet : elles ne sont pas du tout en faveur – hélas ! – de l'utilisation en pratique courante de ce traitement en mono ou en bithérapie associé à l'azithromycine. Néanmoins, des études continuent dans les hôpitaux sur l'ensemble du territoire national et nous aurons aussi des réponses issues d'études françaises. En tout cas, la publication américaine d'hier doit nous inviter à beaucoup de prudence.
Mme Sophie Primas et M. Bruno Retailleau. Il ne s'agit pas du protocole du docteur Raoult !
M. Olivier Véran, ministre. La question est de savoir non pas si c'est « le » protocole du docteur Raoult, mais d'étudier un médicament pour savoir s'il est efficace ou non.
Je vous assure en tout cas qu'un protocole d'étude clinique répond à des règles universelles pour que ses résultats soient publiés dans une revue scientifique internationale. En l'occurrence, si vous pouvez me citer une publication ainsi validée qui permettrait d'étendre la prescription d'un médicament au Covid-19, j'en serai ravi ! Un ministre de la santé ne peut que souhaiter la découverte d'un traitement efficace, mais ce n'est pas le cas aujourd'hui – c'est aussi mon rôle de le dire.
En ce qui concerne les laboratoires vétérinaires, ils se sont proposés et ils ont bien été mobilisés. Je peux vous dire que passer de la médecine vétérinaire à la médecine humaine est une première dans notre pays. Nous avons pu le faire grâce à la mobilisation des ARS et des préfets notamment.
Sur les évacuations sanitaires, je ne voudrais pas qu'on retienne le seul exemple d'un bus qui emportait des malades d'un hôpital à un autre sans prévenir les autorités de santé. Je voudrais qu'on retienne que notre pays a réussi à procéder par train, avion et hélicoptère à 644 évacuations sanitaires ; nous sommes le seul pays au monde à avoir fait cela. C'est une fierté française ! (Protestations sur les travées des groupes CRCE, SOCR et Les Républicains.) Des réanimateurs de l'hôpital de Strasbourg m'ont raconté le monumental chantier que cela a représenté – en tout cas, il a permis de sauver des vies. Nous n'aurions pas pu le faire sans l'intervention permanente des agences régionales de santé.
J'ajoute, en ce qui concerne les ARS, qu'elles ont payé un lourd tribut : plusieurs de leurs agents sont morts durant cette épidémie. Les agents ont continué de travailler, alors qu'ils étaient parfois malades. Tout système est bien évidemment perfectible et je pourrais écrire tout un roman sur les difficultés et les lourdeurs logistiques et administratives que connaît notre pays. D'autres les connaissent également.
M. le président. Il faut conclure.
M. Olivier Véran, ministre. Permettez-moi de rendre hommage au grand talent des agents des ARS !
En ce qui concerne les dentistes, ils auront 150 000 masques FFP2 supplémentaires. Je le leur ai écrit hier.
M. le président. Il faut vraiment conclure !
M. Olivier Véran, ministre. Je profite de l'occasion qui m'est donnée par votre question, monsieur le sénateur, pour les remercier de s'être organisés sur l'ensemble du territoire pour répondre aux urgences.
M. le président. Monsieur le ministre, sachez que c'est un vétérinaire qui, au XIXe siècle, a mis au point le charbon bactéridien…
La parole est à M. Pierre Louault, pour la réplique.
M. Pierre Louault. Monsieur le ministre, le 11 mai, on va passer d'une guerre de tranchées à une guerre d'actions. Il va falloir être prêt, et je ne suis pas sûr que ce soit le cas à cette date. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Vincent Delahaye applaudit également.)
M. Bruno Retailleau. Très bien !