M. Patrick Chaize. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, qui appeler au secours lorsque même les secours pointent aux abonnés absents, quand aucun appel ne peut aboutir ?
Cette question, nos concitoyens ont eu de très longues minutes d'attente, et souvent d'angoisse, pour se la poser le 2 juin dernier. J'ai bien évidemment ici une pensée pour les familles touchées.
Stéphane Richard, PDG d'Orange, l'opérateur en charge de la distribution et de la continuité de ces appels, a indiqué que cet incident grave et inédit serait la conséquence d'une panne logicielle sur des équipements critiques du réseau. Je note qu'il a d'emblée exclu, sans attendre les résultats de l'enquête, tout problème de maintenance ou d'attaque cybercriminelle. Dont acte.
Il a pourtant précisé que ce service était redondé au moins cinq fois. Dans ces conditions, une panne semble statistiquement extrêmement improbable, sauf à ce que la redondance ne serve strictement à rien. C'est la première interrogation dont je souhaitais vous faire part, monsieur le ministre.
Il semblerait par ailleurs que la panne n'ait pas été détectée en premier lieu par Orange, mais par les services de l'État. Pouvez-vous nous le confirmer ?
Orange a annoncé qu'elle publierait les résultats de son enquête interne. De son côté, le Gouvernement a lancé un audit. J'ose espérer que la lumière sera faite sur l'origine de cette panne d'ampleur et que les Français en seront informés.
Cet événement dramatique doit aussi nous permettre d'envisager autre chose que de simples correctifs, par exemple en accélérant le passage de nos services publics vers le tout-IP, afin de disposer de technologies innovantes et réellement sécurisées.
Quels enseignements le Gouvernement tire-t-il de cette triste expérience ? Comment expliquer qu'une telle panne soit possible ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, le 2 juin, vers seize heures trente, les services de l'État – la préfecture de police de Paris, mais aussi les préfets de plusieurs départements – ont signalé jusqu'à 30 % d'appels en moins vers les numéros d'urgence que la moyenne habituelle. Chaque jour, en effet, 150 000 Français appellent le 15, le 17 ou le 18.
La société Orange n'était manifestement pas informée de cette panne dans un premier temps. Une heure environ après les services de l'État, elle a toutefois reconnu qu'il y avait un problème, qui se traduisait non par un arrêt, mais par une dégradation du service.
Selon les premières estimations de l'État, non confirmées pour l'instant par un quelconque rapport, nous aurions perdu environ 30 % des appels, soit que l'opérateur ne répondait pas, soit que la communication s'interrompait au bout de trente secondes.
En raison de l'essence même des numéros d'urgence, j'ai demandé très rapidement au directeur de cabinet du Premier ministre, présent à Paris – j'étais pour ma part en déplacement avec Cédric O et M. le Premier ministre à Tunis –, d'activer la cellule interministérielle de crise. Les préfets ont alors substitué aux numéros d'urgence des numéros plus longs dans les minutes qui ont suivi : 400 numéros ont été mis en place dans 80 départements. Pendant deux jours, nous avons pris en main le travail dévolu en principe au serveur Orange. Je veux d'ailleurs remercier les autres opérateurs, qui ont permis de résoudre une partie des problèmes rencontrés.
Comme vous, monsieur le sénateur, j'ai une pensée particulière pour les personnes qui ont vécu les six situations critiques, dont quatre décès, ayant peut-être un lien direct – ce n'est pas certain à ce stade – avec l'impossibilité de joindre les services d'urgence. Une enquête individuelle administrative a été demandée par M. le Premier ministre à l'ARS et au préfet pour chacun de ces cas.
La société Orange a communiqué. Pour notre part, nous n'excluons aucune cause, monsieur le sénateur. Nous ne sommes pas capables à ce stade de comprendre ce qui s'est passé exactement. Sur la base du code des télécommunications, nous avons saisi, à la demande du Premier ministre, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) et diverses inspections pour diligenter un rapport que nous rendrons public.
Nous n'excluons pas une attaque informatique, même si ce n'est pas l'hypothèse privilégiée. Ayant convoqué Stéphane Richard place Beauvau dès le lendemain matin de la panne, j'ai eu l'occasion, avec Cédric O, de dire combien cette situation était inacceptable et de demander à Orange, non seulement des explications sur cette panne, mais aussi des modifications pour que tout fonctionne à l'avenir. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour la réplique.
M. Patrick Chaize. Cette panne est en effet inacceptable. Je vous rejoins sur ce point, monsieur le ministre.
La desserte fixe et mobile est un enjeu de plus en plus urgent !