M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Sol. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, les nuisances et les dégâts causés de manière récurrente par les communautés des gens du voyage qui investissent certains terrains de nos communes en toute illégalité préoccupent de plus en plus nos élus. En effet, les procédures d'expulsion, lorsqu'elles sont engagées, tardent à être mises en œuvre et se révèlent inefficaces.
M. Loïc Hervé. Tout à fait !
M. Jean Sol. De tels retards ont des conséquences environnementales, économiques et sanitaires extrêmement dommageables : dégradations et pollutions des espaces dans les zones Natura 2000 et dans les zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff), vol et gaspillage d'eau, raccordements électriques illégaux et précaires, surplus de volume de déchets à gérer à la charge des communes, atteinte à l'image et à l'attractivité de nos territoires, délinquances itinérantes, etc.
Les collectivités territoriales, alors même qu'elles sont en conformité avec le schéma départemental d'accueil des gens du voyage, subissent des occupations illicites récurrentes, sans que l'État, qui en a pourtant le pouvoir, parvienne à interrompre celles-ci et à procéder rapidement à des évacuations.
M. Loïc Hervé. C'est la double peine !
M. Jean Sol. Il nous semble donc nécessaire de réformer les modalités d'accueil et d'évacuation des gens du voyage, sans pour autant stigmatiser ces derniers, en créant notamment une procédure d'expulsion d'urgence facilitant l'enlèvement et la saisie rapide de leurs véhicules. Cette procédure pourrait être activée par les maires en cas d'occupations illicites, quelle que soit la nature du terrain.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Jean Sol. Ma question est donc la suivante : face au désarroi de nos administrés, de nos élus et de nos forces de l'ordre, et avant qu'un drame ne se produise, qu'envisagez-vous de faire, monsieur le ministre ? Il y a urgence. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement raison. Des élus de la République et des préfets signalent une multiplication de faits, singulièrement cet été d'ailleurs.
Ayant créé une aire d'accueil des gens du voyage et connu les difficultés que vous évoquez, tant sur les terrains publics que sur les terrains privés – c'est parfois la même chose pour les citoyens –, je comprends les difficultés fortes que vous mentionnez et les nuisances extrêmement importantes que vous soulignez.
Cependant, je souhaite indiquer que, si des nuisances existent, alors que les communes ou les départements ont réalisé les schémas prévus par la loi visant à la mise en œuvre du droit au logement, dite Besson I, et la loi relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, dite Besson II, de nombreux schémas intercommunaux et interdépartementaux ne sont pas encore complets.
Je veux souligner, dans cet hémicycle, que 45 projets d'aires d'accueil de gens du voyage ont été conduits l'année dernière et qu'ils ont été très largement subventionnés par l'État.
Nous avons créé une amende forfaitaire délictuelle (AFD), qui est en phase d'expérimentation et que nous allons généraliser, le garde des sceaux et moi-même. Elle permet de limiter les procédures, les policiers et les gendarmes pouvant infliger une amende de quelques milliers d'euros à chaque caravane dont la présence sur un territoire ne respecte pas la légalité.
M. Jérôme Bascher. Mais qui les paye ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Cette expérimentation sera généralisée et cette mesure, comme l'AFD pour usage de stupéfiants, sera plus efficace que le recours aux procédures.
Cependant, les procédures judiciaires et administratives comportent, sans doute, encore beaucoup de lourdeurs. S'agissant du domaine judiciaire, je laisserai évidemment le garde des sceaux vous répondre.
Pour ma part, je suis évidemment ouvert aux propositions, émises dans le cadre des travaux du Sénat ou des débats portant sur les projets de loi que je présenterai devant votre assemblée, visant à l'amélioration du processus – le préfet étant, avec les élus, le premier à subir ces difficultés –, afin d'avoir moins de « paperasse », moins de recours et moins de difficultés.
Il faut, bien sûr, entendre et écouter les gens du voyage, mais ces derniers doivent respecter les règles de la République et de chacune de nos communes. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Jérôme Bascher. Et payer les amendes !
M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour la réplique.
M. Jean Sol. Monsieur le ministre, nos communes ne doivent plus souffrir à cause d'une minorité qui ne respecte pas les lois de la République.
Néanmoins, face au contexte si tendu que je décrivais, et pour faire suite aux propos de Mme la Première ministre Élisabeth Borne, qualifiant le Sénat de « chambre d'apaisement et d'équilibre », je vous invite à soutenir la proposition de loi de mes collègues Patrick Chaize, Sylviane Noël et Alain Chatillon, votée ici même et visant à consolider les outils juridiques permettant aux maires de mettre fin aux occupations illégales des gens du voyage. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mme Véronique Guillotin et M. Bernard Fialaire applaudissent également.)