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Risques de la pratique de « l'urbex »

Titre de la question
Question n° 22942 de Mme Caroline Janvier (La République en Marche - Loiret) publiée dans le JO Assemblée nationale du 17/09/2019
Contenu de la question

Mme Caroline Janvier interroge M. le ministre de l'intérieur sur les mesures déployées et déployables face aux dangers liés à l'exploration urbaine. « L'urbex » (de l'anglais urban exploration) est une activité au cours de laquelle des personnes visitent seules ou en groupe des lieux abandonnés, interdits d'accès pour la majorité d'entre eux. Un certain nombre de bâtiments désaffectés tels que des usines, prisons, carrières souterraines, métros, hôpitaux, toits, voies ferrées abandonnées ou encore bâtiments administratifs sont ainsi visités de façon plus ou moins fréquente par les amateurs « d'urbex » à travers la France. Le code pénal punit aujourd'hui la violation de domicile (article 226-4) ainsi que la dégradation de biens appartenant à autrui (article 322-1) mais ne fait pas mention de la pénétration sur un lieu hors domicile sans agissements délictueux ou vandalisme. Au-delà du seul enjeu pénal, la pratique de « l'urbex » pose une réelle question de sécurité physique des personnes s'y adonnant puisque se rendre sur un lieu désaffecté conduit souvent à un certain nombre de risques (effondrement d'escaliers, de murs, de toits ; présence d'éléments chimiques dangereux ; inondations souterraines ; chute de personnes depuis un toit ; blessures liées à des objets coupants sur le chemin ; etc.). Cette pratique peut être d'autant plus dangereuse que les personnes pratiquant « l'urbex » comptent parmi elles de plus en plus d'adolescents, voire d'enfants, à la suite de la médiatisation récente de vidéos sensationnalistes « d'urbex » sur la plateforme YouTube et fut par ailleurs à l'origine de plusieurs morts ces dernières années à Lyon et Rosporden. Elle l'interroge donc sur les mesures déjà prises et potentiellement à venir de la part des pouvoirs publics afin de limiter le nombre d'accidents liés à cette exploration urbaine de lieux désaffectés, qu'il s'agisse de mesures policières, d'arrêtés de péril, d'un partage des meilleures pratiques municipales ou encore de la sensibilisation au sujet auprès des propriétaires de lieux désaffectés.

Titre de la réponse
Réponse du ministère de l'intérieur publiée dans le JO Assemblée nationale du 16/06/2020
Contenu de la réponse

Il convient d'abord de rappeler que l'exploration urbaine présente, par sa nature même, des dangers importants dont doivent prendre conscience les personnes s'adonnant à ces pratiques. De la même manière, il appartient à chaque propriétaire de prendre les mesures propres à assurer la sécurité de ses biens, telles que la condamnation des accès, afin d'éviter toute violation du droit de propriété. Dans ce contexte, l'autorité de police (le maire ou le préfet, selon le cas) peut néanmoins prendre des mesures d'évaluation et de prévention des risques inhérents à certaines de ces pratiques. L'autorité de police peut ainsi, en fonction des lieux naturels ou industriels qui sont ainsi « explorés », s'appuyer sur certaines dispositions du code de l'environnement. Ainsi, aux termes de l'article L. 125-2 du code de l'environnement, il appartient à l'Etat et aux maires des communes concernées de porter à la connaissance des citoyens l'information sur les risques majeurs existants sur le territoire. En déclinaison de cette obligation, les articles L. 562-1 à L. 562-9 du même code prévoient l'élaboration d'un plan de prévention des risques naturels (PPRn). A cet égard, il peut être noté qu'afin d'accompagner les collectivités dans cette mission de prévention des risques, le ministère de la transition écologique et solidaire a publié un guide sur le sujet des cavités souterraines abandonnées d'origine anthropique (carrières, sapes, habitats troglodytiques, souterrains refuges, etc). Il y est signalé l'importance de la sensibilisation et de l'information des populations exposées, ainsi que de la condamnation des accès. Sur le sujet des inondations, l'article L. 562- 1 du code de l'environnement prévoit le cas échéant l'obligation d'un plan de prévention des risques d'inondation (PPRI), qui pourrait utilement intégrer cette dimension nouvelle que constitue l'exploration urbaine. Le cadre juridique applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) implique qu'une cessation d'activité d'une telle installation ne doit pas porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, qui impose de surcroît des obligations de remise en état. Ces dispositions peuvent donc être de nature à permettre à l'autorité de police d'exiger de celui qui cesse l'exploitation d'une ICPE de prendre un certain nombre de mesures, y compris de condamnation d'accès, de nature à prévenir les risques liés aux explorations urbaines. Au titre de ses pouvoirs de police en matière de péril prévus aux articles L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, le maire peut également interdire l'accès de bâtiments ou édifices quelconques qui n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique. Enfin, l'exploration urbaine impacte l'activité opérationnelle des services d'incendie et de secours (SIS), notamment sur : - les conditions opérationnelles de mise en œuvre : l'opération de secours ou de recherche de personnes s'opère dans les mêmes conditions et moyens que dans le secours en montagne dans les cavités et milieux souterrains ; - les mesures préventives : dans le cas d'une opération de secours de lutte contre l'incendie ou de secours à personne (sauvetage) dans un bâtiment ou édifice menaçant ruine ou en zone « Urbex », le « porter à la connaissance » du commandant des opérations de secours (COS), que le bâtiment ou l'édifice en cause soit soumis à un arrêté de péril ou de péril grave et imminent (article L.511-1 à L. 511-2 du code de la construction et de l'habitat) est un indicateur opérationnel sur son orientation dans sa prise de décision. Cette mesure est de nature à améliorer le niveau de sécurité des intervenants puisque le COS adaptera les opérations de secours (bénéfice/risque). Le maire dans son rôle de directeur des opérations de secours (article L. 1424-3 et L. 1424-4 du code général des collectivités territoriales) informera les services de secours par le moyen le plus approprié localement concernant la liste des arrêtés de péril et des arrêtés de péril grave et imminent présents sur son territoire. Cette initiative de bonne pratique ne doit pas occulter l'obligation de notification prévue par la voie d'affichage en mairie et sur la façade de l'immeuble (article L. 511-2 alinéa 2, du code de la construction et de l'habitation). Cette recommandation reste à être formalisée dans les conditions propres à chaque organisation des services d'incendie et de secours. Celles-ci doivent limiter les contraintes de gestion pour les services d'incendie et de secours. Par conséquent, il est indispensable de définir des règles fonctionnelles de cette diffusion d'information afin de s'assurer d'un résultat le plus efficient possible ; - les mesures de réparation et/ou de condamnation : la mise en danger de la vie d'autrui (article 223-1 du code pénal) ou la constitution de partie civile pour les SIS.