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LES POUVOIRS DE POLICE

Chapo
Les responsabilités de la commune et du maire dans la prévention des incendies
Texte

Lorsque, suite à un incendie, il s'avère que la fourniture d'eau a été insuffisante, la responsabilité de la commune peut-elle être engagée ? Dans une telle situation, le maire peut-il faire l'objet de poursuites pénales ? Avant un été qui risque d'être très chaud et sec, il est indispensable de faire le point.

Un pouvoir de police dévolu au maire
Conformément aux dispositions de l'article L. 2212-2(5°) du code général des collectivités territoriales (CGCT), la police municipale comprend « le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies (...) ». Le maire doit ainsi s'assurer de la suffisance des moyens de lutte contre l'incendie. Cette obligation recouvre en particulier celle de veiller à la disponibilité et au fonctionnement des points d'eau pour l'alimentation des services d'incendie et de secours.

De la faute lourde....
Lorsqu'il s'avère que la fourniture d'eau a été insuffisante, la jurisprudence administrative a, dans un premier temps, considéré que la responsabilité de la commune pouvait être engagée pour faute lourde.
La carence du maire dans l'exercice de son pouvoir de police a ainsi engagé la responsabilité de la commune pour faute lourde, en raison du défaut de pression à la bouche d'eau résultant d'une insuffisance d'entretien de l'installation (CE, 15 mai 1957, Commune de Tinqueux), de l'absence de mesure prise pour assurer une alimentation en eau suffisante de la bouche, alors que la commune avait été informée par la compagnie des eaux d'une baisse de pression importante (CE, 2 décembre 1960, Strohmaier et compagnie Le Phoenix), ou encore de l'impossibilité de fournir aux pompiers de l'eau sous pression dans les quinze premières minutes suivant leur arrivée, en raison de la vétusté de l'installation (CE, 14 octobre 1964, Ville de Pointe-à-Pitre).

....admettant des atténuations de responsabilité....
La faute de la victime peut exonérer la commune de sa responsabilité. En fonction des circonstances, cette exonération peut être partielle (CE, 15 mai 1957, précité ; CE, 13 octobre 1976, Commune de Mazières-en-Gâtine) ou totale (CE, 15 avril 1983, Fédération nationale des coopératives de consommation). La responsabilité de la commune peut également être atténuée lorsqu'en dépit d'un dysfonctionnement de la bouche d'incendie, la propagation de l'incendie et la destruction du bâtiment était inévitable en raison de mode de construction de celui-ci (CE, 13 février 1980, Dumy).

... à la faute lourde
La jurisprudence administrative a par la suite évolué de telle sorte que la responsabilité de la commune peut être engagée pour faute simple en cas de défaillance du service de lutte contre l'incendie, notamment en raison de l'impossibilité de faire fonctionner une motopompe (CE, 29 avril 1998, Commune de Hannapes).

Spécificités de communautés urbaines
En ce qui concerne les communautés urbaines, celles-ci exercent de plein droit les compétences en matière de services d'incendie et de secours à la place des communes membres (art. L. 5215-20[5°] du CGCT). Dans la mesure où le transfert de compétences à la communauté urbaine emporte transfert au président de toutes les attributions conférées au maire, en vertu de l'article L. 5215-24 du CGCT, la responsabilité de la communauté urbaine peut être engagée en cas de défaillance de la bouche d'incendie (CAA Nancy, 7 novembre 1991, req. n° 89NC 00631).

Le transfert désormais possible au président de l'EPCI
L'article 77 de la loi n°2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit a créé une police municipale spéciale de défense extérieure contre l'incendie. L'article L.5211-9-2 du CGCT prévoit ainsi la possibilité pour les maires des communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) de transférer au président de l'EPCI cette police spéciale, consistant en « l'alimentation en eau des moyens des services d'incendie et de secours par l'intermédiaire de points d'eau identifiés à cette fin ».

La responsabilité pénale du maire
Du point de vue pénal, la responsabilité du maire pourrait être recherchée pour mise en danger délibérée de la vie d'autrui sur le fondement de l'article 121-3 du code pénal, s'il est établi que le maire n'a pas accompli les « diligences normales compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi lui confie » (art. L. 2123-24, alinéa 1, du CGCT). Conformément aux dispositions de l'article L. 2123-34, alinéa 2, du CGCT, la commune est tenue d'accorder sa protection au maire lorsque celui-ci fait l'objet de « poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère de faute détachable de l'exercice de ses fonctions ».

Question écrite n° 10499 de M. Jean Louis Masson, publiée dans le JO Sénat du 15/10/2009 - page 2401, Réponse du Ministère chargé des collectivités territoriales publiée dans le JO Sénat du 02/06/2011 - page 1469

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