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Actualité jurisprudentielle

Nom de l'expert
M. ABDO & A. TOUACHE
Prénom de l'expert
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Fonction de l'expert
CERISC
Chapo du commentaire
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Texte du commentaire

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CONSTITUTIONNALITE

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  • Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 9 novembre 2021, juge conforme partiellement à la Constitution la loi dite de « vigilance sanitaire ». 

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Saisi, à propos de certains articles de la loi portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, le 5 novembre 2021 par plus de 60 députés et plus de 60 sénateurs, le Conseil constitutionnel a rendu une décision en date du 9 novembre 2021 en estimant que la loi dite de « vigilance sanitaire » est partiellement conforme à la Constitution. En effet, si le Conseil constitutionnel a estimé que la prorogation jusqu’au 31 juillet 2022 des régimes d’état d’urgence sanitaire et de gestion de la sortie de crise sanitaire est conforme à la Constitution (I), il a jugé, en revanche, contraires à la Constitution les dispositions relatives à l’accès des directeurs d’établissements scolaires à des données de santé concernant les élèves, ainsi que celles qui concernent l’habilitation du gouvernement à prendre des ordonnances (II).

I)- Les dispositions conformes à la Constitution

Ces dispositions concernent la prorogation du régime organisant l’état d’urgence sanitaire (Art. 1er), la prorogation du régime de sortie de crise sanitaire (Art. 2) ainsi que la prorogation de l’application des systèmes d’information pour lutter contre l’épidémie de Covide-19 (Art. 6). 

A) – La prorogation du régime juridique organisant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 31 juillet 2022 (Art. 1er)

Les requérants soutiennent que les mesures découlant de ce régime d’état d’urgence sanitaire portent atteinte à certaines libertés et droits fondamentaux (liberté d’aller et de venir ; droit au respect de la vie privée ; liberté d’entreprendre, d’expression et de communication). Ils contestent également le processus d’instauration de ce régime qui constitue une atteinte au principe même de la séparation des pouvoirs.

Or, les juges du Conseil constitutionnel estiment que la loi en question n’instaure ni l’état d’urgence sanitaire ni le prolonge. Elle reporte simplement le terme des dispositions qui organisent le cadre juridique de l’état sanitaire jusqu’au 31 juillet 2022, alors qu’elles devaient mettre fin le 31 décembre 2021, d’après la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19. D’ailleurs, le Conseil constitutionnel estime, après avoir rappelé l’article L. 3131-12 et L. 3131-19 du Code de la santé publique, qu’« en cas de mise en œuvre de l'état d'urgence sanitaire, les mesures susceptibles d'être prises par le pouvoir réglementaire ne peuvent l'être qu'aux seules fins de garantir la santé publique. Elles doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. Le juge est chargé de s'assurer que ces mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité qu'elles poursuivent » (Pt. 8 de la décision). C’est ainsi que le Conseil a pu juger que la prorogation du régime d’état d’urgence sanitaire n’est pas contraire à la Constitution.

B) – La prorogation du régime de sortie de crise sanitaire jusqu’au 31 juillet 2022 (Art. 2)

Les requérants soutiennent, à propos de cette disposition, que le contexte sanitaire ne justifie pas de proroger 8 mois le régime de sortie de crise sanitaire et que les mesures qui pourraient être prises par le gouvernement, notamment celles qui concernant le « passe sanitaire », méconnaissent la liberté d’entreprendre et le droit à une vie familiale normale ainsi que le principe de la séparation des pouvoirs et pourraient même affecter le déroulement des élections présidentielle et législative qui doivent intervenir en été 2022. Ils ajoutent que la prorogation de ce régime pendant cette période ne permet pas à l’autorité législative d’intervenir.

Cependant, le Conseil constitutionnel estime, dans le point 15 de sa décision, qu’il ne lui appartient pas de remettre en cause l’appréciation du Parlement, fondée sur l’avis émis récemment par le comité de scientifiques, qu’un risque important de propagation de l’épidémie persisterait en France jusqu'au 31 juillet 2022.

D’ailleurs, le Conseil n’a pas hésité à rappeler que la loi en question ne prive pas le Parlement de son droit de se réunir, de légiférer et/ou de contrôler l’action du Gouvernement, puisque « les mesures susceptibles d’être prononcées dans le cadre du régime de gestion de la sortie de crise sanitaire ne peuvent être prises que dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 », et surtout ces mesures « doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. Le juge est chargé de s'assurer que de telles mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité qu'elles poursuivent » (Pt. 16 de la décision). Dans le même ordre d’idées, le Conseil a tenu à préciser, dans le point 17 de sa décision, que « si ces mesures peuvent intervenir en période électorale, la présentation du (passe sanitaire) ne peut être exigée pour l’accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques » et que le juge administratif, en tant que juge du référé-liberté, pourra assurer le respect par le pouvoir réglementaire du droit d’expression collective des idées et des opinions (Ibid., Pt. 17 de la décision).

Pour tous ces motifs, les juges du Conseil constitutionnel ont jugé que la prorogation du régime de sortie de crise sanitaire jusqu’à la fin du mois de juillet 2022 est conforme à la Constitution.

C)- La prolongation de l’application des systèmes d’information pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 (Art. 6)

Dans leur recours, les députés contestent l’article 6 de la loi de « vigilance sanitaire », relatif aux systèmes d'information mis en œuvre pour lutter contre l'épidémie de covid-19, dans la mesure où il prolonge pour une durée excessive le recueil et le traitement de données de nature médicale, ce qui méconnait le droit au respect de la vie privée.

Les juges du Conseil constitutionnel estiment, à ce propos, que ces systèmes d’information « doivent être justifiés par un motif d'intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités » (Pt. 24 de la décision). D’ailleurs, les juges ont tenu à rappeler que l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 instaurant ces systèmes d’information « prévoit les conditions dans lesquelles les données relatives à la santé des personnes atteintes par le virus responsable de la covid-19 et des personnes en contact avec elles sont, le cas échéant sans leur consentement, traitées et partagées dans le cadre d'un système d'information ad hoc » (Pt. 25 de la décision) et que le Conseil a déjà jugé la constitutionnalité des dispositions de l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 (cf. ces décisions : Décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 ; Décision n° 2020-808 DC du 13 novembre 2020 ; et Décision n° 2021-819 DC du 31 mai 2021). Ainsi, le Conseil a jugé que l’article 6 de la loi de « vigilance sanitaire » n’est pas contraire à la Constitution.

II)- Les dispositions inconstitutionnelles

Ces dispositions concernent l’article relatif à l’accès des directeurs d’établissements scolaires à des données médicales relatives aux élèves (Art. 9) ainsi que les articles qui concernent l’habilitation du gouvernement à prendre des ordonnances (Art. 13 et Art. 14).

A) – L’accès à des données médicales relatives aux élèves (Art. 9)

Les requérants contestent l’article 9 de la loi de « vigilance sanitaire », qui permet aux directeurs des établissements d’enseignement scolaire d’accéder à des informations médicales relatives aux élèves et de procéder à leur traitement, dans la mesure où il méconnaît notamment le droit au respect de la vie privée et le secret médical. Ils ajoutent que ces données sensibles concernent particulièrement les mineurs et que l’article 9 entraîne une rupture d’égalité entre les élèves dans l’accès à l’instruction en fonction de leur statut vaccinal.

Après avoir rappelé l’article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et l’article L. 1110-4 du Code de la santé publique, le Conseil constitutionnel a estimé que l’article 9 permet « d’accéder non seulement au statut virologique et vaccinal des élèves, mais également à l'existence de contacts avec des personnes contaminées, ainsi que de procéder au traitement de ces données, sans que soit préalablement recueilli le consentement des élèves intéressés ou, s'ils sont mineurs, de leurs représentants légaux » (Pt. 38 de la décision). Le Conseil a ajouté, dans le point 39 de sa décision, que l’article 9 permet l’accès à ces données et leur traitement non seulement pour les directeurs des établissements scolaires, mais également pour « les personnes qu'ils habilitent spécialement à cet effet », ce qui signifie que ces données de santé sont susceptibles d’être communiquées à un grand nombre de personnes. En outre, le Conseil a précisé que le législateur s’est borné à « prévoir que le traitement de ces données permet d’organiser les conditions d'enseignement pour prévenir les risques de propagation du virus », sans avoir suffisamment défini les finalités poursuivies par ces dispositions (pt. 40 de la décision). Cela a conduit le Conseil à juger que l’article en question porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et donc contraire à la Constitution.

B) - L’habitation du Gouvernement à adopter certaines mesures par ordonnance (Art. 13 et Art. 14)

Les requérants, sénateurs, contestent les dispositions des articles 13 et 14 de la loi de « vigilance sanitaire » qui permettent au Gouvernement, jusqu’au 31 juillet 2022, de prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi visant à rétablir, à adapter ou à compléter certaines dispositions du Code du travail (cf. Art.L.1226-1-1 du Code du travail) ainsi que toutes mesures d’adaptation des dispositions relatives à l’activité réduite pour le maintien en emploi. D’après les requérants, ces dispositions méconnaissent la procédure prévue par l’article 38 de la Constitution et elles ont été « adoptées en première lecture par l'Assemblée nationale, puis supprimées par le Sénat, ne pouvaient être rétablies, en nouvelle lecture, par des amendements parlementaires.

Après avoir rappelé l’article 38 de la Constitution, le Conseil constitutionnel estime, dans les points 46 et 47 de sa décision, que « seul le Gouvernement peut demander au Parlement l'autorisation de prendre de telles ordonnances. Or, les dispositions contestées, introduites pour certaines par le projet de loi initial et pour d'autres par des amendements gouvernementaux, avant d'être supprimées en première lecture, ont été rétablies en nouvelle lecture par voie d'amendements parlementaires. Elles n'ont donc pas été adoptées à la demande du Gouvernement ». Ainsi, le Conseil a jugé que les dispositions des articles 13 et 14 de la loi de « vigilance sanitaire » ne sont pas conformes à la Constitution.

(Conseil constitutionnel, décision n° 2021-828 DC du 9 novembre 2021 : JO, 11 novembre 2021)

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LEGALITE ADMINISTRATIVE

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Acte administratif

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  • Le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble estime que les dispositions de l’article de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire ne s’appliquent pas à l’agent, placé en congé maladie à la date d’entrée en vigueur de ces dispositions, puisqu’il n’est pas en mesure d’exerce son activité.

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Il s’agissait d’un agent qui travaille dans un établissement de santé et soumis à l’obligation vaccinale contre le Covid-19 par la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire. La loi du 5 août 2021 fixe au 15 septembre 2021 la date à partir de laquelle les personnes soumises à cette obligation doivent présenter à leur employeur le certificat de statut vaccinal ou le justificatif de l’administration des doses de vaccins. L’agent, qui a été en arrêt maladie depuis le 13 septembre 2021, n’a présenté à son employeur aucun justificatif vaccinal. L’employeur l’a suspendu, par une décision en date du 14 septembre 2021, de ses activités, à compter du 15 septembre 2021 jusqu’à la production d’un justificatif de vaccination. C’est ainsi que l’agent a demandé, le 6 octobre 2021, au juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble de suspendre la décision de son employeur et d’enjoindre à ce dernier de lui verser sa rémunération à compter du 15 septembre 2021 et de la rétablir dans ses droits à avancement à compter du même jour.

L’agent soutient, dans sa requête, que la condition d’urgence est remplie, puisqu’il est privé de rémunération depuis le 15 septembre 2021 et que la décision de son employeur porte atteinte à son droit protégé d’être en congé maladie. Il soutient, d’ailleurs, qu’il existe un doute sérieux concernant la légalité de la décision du fait qu’elle est entachée de rétroactivité illégale et qu’elle méconnaît les dispositions des articles 41, 66, 82 et 83 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et les dispositions des articles 14 et 15 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière. En revanche, l’employeur, le Directeur des hôpitaux Drôme Nord, soutient que la condition d’urgence n’est pas remplie et que les arguments de l’agent ne sont pas fondés.

Le juge des référés, après avoir vérifié la condition d’urgence et les autres conditions exigées par l’article L. 521-1 du code de justice administrative et rappelé les articles 12, 13 et 14 de la loi  du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, a estimé que les dispositions de l’article 14 de la loi du 5 août 2021, qui permettent à l’employeur d’interdire à un agent public hospitalier soumis à l’obligation vaccinale d’exercer son activité et d’interrompre sa rémunération tant qu’il n’a pas présenté l’un des documents mentionnés au I de l’article 13 ou, à défaut, au A, puis au B, du I de l’article 14 de cette loi, « ne trouvent pas à s’appliquer à l’agent qui, placé en congé maladie à la date d’entrée en vigueur de ces dispositions, n’est pas en mesure d’exercer son activité ». Le jugement ajoute que ces dispositions « ne légifèrent pas non plus, en tout état de cause, sur les droits acquis au titre de l’avancement par un agent public hospitalier durant la période de suspension de ses fonctions ». Ainsi, le juge des référés a décidé de suspendre la décision du directeur  des hôpitaux Drôme Nord ; de lui enjoindre de verser à l’agent, à compter du 15 septembre 2021, la rémunération à laquelle il a droit dans le cadre de son arrêt de travail ; et d’assimiler la période d’absence du service de l’intéressé à compter de cette même date à une période de travail effectif pour la détermination de la durée de ses congés payés ainsi que pour ses droits acquis au titre de son ancienneté et de prendre en compte cette même période au titre de son avancement, dans le délai de cinq jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

(Juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble, ordonnance n° 2106636 du 26 octobre 2021)

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  • Le juge des référés rejette une requête visant à suspendre une décision de suspension des activités professionnelles d’un agent qui avait refusé de ne pas s’inscrire dans le protocole vaccinal contre la Covid-19.

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La requérante, qui travaille au centre hospitalier de Billom, a été informée des dispositions de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, notamment l’obligation vaccinale pour le personnel du centre. Elle a été convoquée à un entretien le 8 septembre avec le directeur des ressources humaines du centre hospitalier de Billom. Or, elle n’a pas accepté de s’inscrire dans le protocole vaccinal contre la Covid-19. Cela a conduit l’employeur à suspendre, par une décision datée du 15 septembre, ses activités professionnelles et, donc, la suspension de sa rémunération. Mécontente, la requérante a ainsi saisi, le 28 septembre, le juge des référés du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand afin de suspendre la décision prise par son employeur, et cela jusqu’à ce que le juge administratif soit statué au fond sur la légalité de la décision contestée.

Le juge des référés a rejeté la demande de la requérante pour deux raisons fondamentales :

La première raison tient à la condition d’urgence, exigée par l’article L. 521-1 du Code de justice administrative. Cette condition, importante pour la requête du référé-suspension, ne semble pas remplie. En effet, le juge des référés tient à estimer, dans le point 5 de l’ordonnance, que la requérante « se contente d’indiquer au tribunal que la décision de suspension entraîne le défaut du versement de son traitement sans (préjugé de la durée de la suspension), sans plus de précisions, notamment sur la possibilité dont elle disposait éventuellement de prendre des congés ». Le juge n’a pas même hésité à préciser que si la situation de la requérante ne peut être qualifiée d’urgente, « elle peut souscrire à ce protocole vaccinal et mettre ainsi elle-même un terme à sa suspension pour reprendre son activité professionnelle avec traitement ». Il a, d’ailleurs, jugé que « la condition d’urgence devant s’apprécier objectivement et globalement, la lutte contre l’épidémie de covid-19, et notamment son variant delta, commande la poursuite de l’exécution de la suspension de Mme A..., aux fins de protection générale et impérieuse de la santé publique, notamment dans cet établissement de santé ».

La deuxième raison concerne, quant à elle, l’application et l’interprétation des dispositions des articles 12, 13, 14 et 16 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire. Le juge des référés estime, dans le point 4 de son ordonnance, que d’après ces dispositions toute personne travaillant dans un établissement public de santé « est soumise à une obligation vaccinale contre la covid-19, [quelles] que soient les modalités selon lesquelles elle exerce son activité ou son service d’affectation ». Cela implique pour toute personne soumise à l’obligation vaccinale et qui refuse de s’y conformer la suspension de ses fonctions que l’employeur est tenue de prendre.

(Juge des référés du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, ordonnance n° 2102028 du 30 septembre 2021)

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STATUT

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Temps de travail

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  • La Cour de Justice s'est prononcée sur le des astreintes lesquelles ne constituent pas systématiquement des « périodes de repos » ; en l'espèce, les astreintes effectuées par le pompier tchèque durant ses courtes pauses devraient être assimilées à du « temps de travail ».

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Un pompier d’entreprise tchèque était soumis à un régime de travail posté en équipes successives de jour comme de nuit. Les temps de pause n’étaient, en principe, pas pris en compte dans le calcul de la durée du travail, et par conséquent, durant ses courtes périodes, le pompier n’était pas rémunéré alors qu’il devait garder un émetteur sur lui en vue d’une éventuelle intervention. Le pompier a contesté devant les tribunaux de son pays ce mode de calcul de rémunération. En effet, il avance que les temps de pause devraient être considérées comme du « temps de travail ».

Une nouvelle fois, la question porte sur la définition du « temps de travail » telle que mentionnée à l’article 2 de la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l’aménageant du temps de travail.

A titre liminaire, la Cour de justice a observé que « durant ses temps de pause, [le pompier] n’était pas remplacé à son poste et était équipé d’un récepteur lui permettant d’être averti au cas où il devait interrompre sa pause pour un départ soudain en intervention ».

De ces éléments factuels, elle en a déduit que l’intéressé était assujetti durant ses pauses à un régime de garde. La juridiction de Luxembourg a donc rappelé sa jurisprudence en la matière.

Elle a précisé, d’une part, que « la durée de trente minutes de chaque temps de pause, de telles restrictions étant indépendantes des contraintes liées à son obligation de se tenir prêt pour un départ en intervention dans un délai de deux minutes ».

D’autre part, elle a souligné que « la circonstance que, en moyenne, le travailleur n’est que rarement appelé à intervenir au cours de ses périodes de garde ne peut aboutir à ce que ces dernières soient considérées comme des « périodes de repos », […], lorsque l’impact du délai imposé au travailleur pour reprendre ses activités professionnelles est tel qu’il suffit à restreindre, de manière objective et très significative, la faculté qu’il a de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités ».

Enfin, elle a ajouté que « le caractère imprévisible des interruptions possibles du temps de pause est susceptible d’avoir un effet restrictif supplémentaire quant à la possibilité pour le travailleur de gérer librement ce temps ».

Au final, les juges européens ont donné raison au travailleur ; elle a jugé que « constitue du « temps de travail », au sens de cette disposition, le temps de pause accordé à un travailleur durant son temps de travail journalier, au cours duquel il doit être en mesure de partir en intervention dans un délai de deux minutes en cas de besoin, dès lors qu’il découle d’une appréciation globale de l’ensemble des circonstances pertinentes, que les contraintes imposées à ce travailleur pendant ledit temps de pause sont d’une nature telle qu’elles affectent objectivement et très significativement la faculté pour ce dernier de gérer librement le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres intérêts ».

(CJUE 9 septembre 2021, n° C-107/19, XR contre Dopravní podnik hl. m. Prahy, akciová společnost)

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